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Peut-on parler pour ne rien dire ?

Publié le 16/05/2022

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« Peut-on parler pour ne rien dire ? Parler de la pluie et du beau temps, ne pas savoir « tenir sa langue », faire du bruit avec la bouche, autant d’expressions qui servent à dénoncer le fait qu’on parle parfois sans qu’on n’ait rien à dire.

Tout se passe comme si l’on constatait que le flot de parole qu’on prononce ne se charge ni d’un message, ni d’une intention de signifier.

Si parler, c’est parler de quelque chose à quelqu’un, force est de reconnaître que parler pour ne rien dire viderait de son contenu le sens de la parole.

Peut-on parler pour ne rien dire ? Est-ce à dire qu’on puisse à ce point vider la parole de toute intention de signifier, c’est-à-dire disjoindre le fait de parler et le fait de dire vraiment quelque chose qui a du sens, de l’importance ou même renvoie à quelque chose qui est ? Parler pour ne rien dire rendrait possible le bavardage creux et disqualifierait la parole qui veut sérieusement dire quelque chose au sujet de quelque chose.

Mais est-ce bien légitime de défaire la parole de son sens ? Est-ce le signe que la parole est tenue de manifester du sens, même lorsqu’elle n’a apparemment pas de sens immédiatement visible et que l’on occupe le terrain de la parole sans avoir rien à dire ? Ou bien estce la concrétisation d’une parole délivrée de la charge du sens, une parole libérée de son sérieux pour jouer avec les effets du langage ? Que vaut alors une parole qui ne cherche pas à dire ? De quoi estelle le signe ? Il s’agira d’abord de revenir à la possibilité de parler pour ne rien dire et étudier ce que révèle le bavard sur cette situation de parole.

Cela nous conduira à examiner la passion de parler : parler pour ne rien dire ne signifie pas nécessairement rien.

Il s’agira d’apprendre à déchiffrer cette parole délivrée d’une exigence interne de sens. *** Les termes « parler » et « dire » sont pris comme synonymes.

Sont-ils pour autant équivalents ? Et sinon à quoi tient leur différence ? Au sens large, parler, c’est recourir à des signes conventionnels qu’on assemble en empruntant aux ressources d’un code ou d’une langue particulière qui en définit les règles syntaxiques et sémantiques.

La parole définit une situation d’échange : on parle de quelque chose à quelqu’un.

« Dire » consiste à s’exprimer et user du langage à l’écrit comme à l’oral et communiquer dans une langue particulière.

La nuance est liée au sens de ce que l’on dit quand on parle.

On a quelque chose à dire, soit parce qu’on cherche à transmettre une pensée, ou un ordre, ou une information.

En « disant », on ne se contente pas de prendre la parole. On exprime une pensée ; on cherche à signifier quelque chose, à transmettre.

Dire de quelqu’un qui ne parle « pour ne rien dire », c’est lui prêter des intentions contradictoires : pourquoi faire du bruit avec la bouche, et faire l’effort de prendre la parole si l’on ne veut rien signifier ? Et surtout, pourquoi parler si le résultat est quasiment nul ? Parler pour ne rien dire, c’est annuler l’intention d’avoir des effets et de transmettre du sens par le fait de prendre la parole. Cette inquiétude quant aux effets rebondit sur le fait de s’adresser à quelqu’un pour rien.

On dira alors qu’il faut savoir « tourner sept fois sa langue dans sa bouche » pour dire effectivement quelque chose : il vaut mieux réfléchir, preuve que l’on se soucie de son destinataire.

C’est à quelqu’un que l’on s’adresse : « parler pour ne rien dire » rendrait l’adresse inauthentique et reviendrait à se moquer de celui auquel on s’adresse, lui faisant perdre son temps. 1. »

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