Pascitur in vivis livor, post fata quiescit
Publié le 06/01/2022
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«
Pascitur in vivis livor, post fata quiescit
L'Envie se repaît des vivants mais se tait lonqu'ils sont morts
Cette maxime, empruntée aux Amores d'Ovide ( 1, 15, 39) est à rattacher
au topos précédemment évoqué, qui interdit de dire du mal des morts
(n.
1020), puisqu'elle constate qu'habituellement on montre davantage
de bienveillance vis-à-vis des morts que des vivants.
Les précédents
grecs sont nombreux (cf.
la fine interprétation psychologique et histo
rique de J.-P.
Vernant, la mort dans les yeux, Paris, 1985, 92): rappe
lons surtout la célèbre expression de I
'Epitaphe de Péric/es selon
Thucydide
(2, 45, 1): ct,86vos yàp TOÎS 'b>Ol npos TO àvT( lTO~ov.
TO
6è µ11 ȵTT6wv àvaVTaywv(oT, phrase qui
t-u, citée et répertoriée de nombreuses fois : cf.
Théon
(P1·ogymnasmata, 63 ; 110), Stobée ( cf.
3, 38, 41 ), Arrien (Anabase, 4,
8, 3), Libanios (Déclamations, 2, 1, 9) et Dion Cassius (69, 4, 6), lequel
parle d'une
86vs si grande qu'elle peut s'exprimer envers la per
sonne ainsi jalousée autant de son vivant qu'après sa mort.
On trouve
une dernière attestation de cette sentence dans un fragment au texte
incertain de Timoclès (33
K.-A.
: Tois µfv Tf8vewaLv ËÀt:os ÈTTLELKflS
t)Eoç, / Toi~ CwaL 6'- ËTEpov àvooLwTaTov 4>86vos, cc la divinité des
morts est la pitié, celle des vivants et la plus impie, l'envie>>), alors que
pour Théopompe
(115 B 395 Jacoby) l'envie ne disparait qu'avec le
temps.
La littérature latine fait souvent allusion à la renommée qui croit
après la mort de quelqu'un: cf.
en particulier Properce (3, 1, 24: Maius
ab exequiis nomen in ora venit., >) ou Ovide ( Tristia, 4, 10, 121 sq.
; Epistulae ex Ponto, 3,
4, 73 sq, qui parle de livor).
Les citations du vers d'Ovide sont nom
breuses, tant au Moyen-Age (cf.
par exemple, Albert
le Grand, De_fato.,
19 ; Pierre le Chantre, Verbum abbreviatum, Pl 20S, 52a ; Thomas de
Chobham,
Summa de conmendatione et eitirpatione virtutum, 5, 837;
Alain de Lille, Distinctiones dictionum theologica/ium, PL 210, 893a,
et la préface du Voyage de l'archevêque Baldwin au pays de Galles de
Giraud de Cambrai) soit
à l'époque humaniste (cf.
une élégie de Pie Il
[ln laudem Homeri,.
2, 17] et l'un des Colloquiafamiliaria d'Erasme le
Philodoxus) soit à l'époque moderne (le vers servit de titre à Wl madri
gal à quatre voix de l'Harmoniae morales de Jacob Handl, compositeur
de
la seconde moitié du seizième siècle ; au dix-septième siècle il fut
cité par Robert Burton (Anatomie de la mélancolie, 3, 1, 2., 2] et par le
pasteur William Gumell [The Christian in Complete Armour, 2, 1, 4],
et Carl von Linné l'utilisa dans
la conclusion des Species plantarum, le
2 mai 1753).
Le vers est aussi présent dans la tradition des Emblemata
où il apparait aux côtés de Post mortem cessai invidia (cf.
Vaenius,
Q.
Horati Flacci Emblemata, 83 ).
Erasme cite un autre hexamètre éga
lement inspiré d'Ovide
(Epistulae ex Ponta, 4, 16, 3): Post hominum
cineres oritur clarissimafama,
c< La renommée grandit après la mort>>.
De nos jours ce topos est toujours bien vivant dans nos proverbes euro
péens (cf.
en italien.
Dio li guardi da/ di della Iode; en allemand lob
erhalt manch · toter Mann, der s im Leben nie gewann ; en anglais We
are al/ clever enough al envying a famous man, while he is yel a/ive.
and at prising
him, when he is dead [cf.
Arthaber 709] et Envy ceases
on/y after
the death, qui traduit exactement un lemme des Emblemata),
de même que dans la littérature (cf.
Ne/le nozze della sore/la Paolina
de G.
Leopardi (4, 30] : Virtù vivo sprezziam, /odiamo estinta).
Pour le
topos complémentaire du sot qui ne se rend compte de l'importance de
ce qu'il possédait qu'après l'avoir perdu, cf.
n.
1850..
»
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