Paraguay (1986-1987)

« Au Paraguay, le général Alfredo Stroessner a fêté le 4 mai 1987 le trente-troisième anniversaire du coup d'État qui l'a porté au pouvoir.

Des lézardes sont cependant apparues dans l'édifice bâti par ce régime aussi anachronique qu'immuable.

Cinq tendances rivalisent au sein du Parti colorado qui règne à Assomption, et ces divisions au sommet se sont répercutées dans les sections de base qui quadrillent le pays.

La contestation sociale n'a pas été annihilée.

Les paysans ont multiplié les occupations de terres.

En 1986, les médecins des hôpitaux publics, et les étudiants, bravant la répression, sont descendus dans la rue. Dans une conjoncture économique morose - la croissance n'a pas dépassé 1,5% en 1986 -, l'ampleur de la contrebande (bétail, voitures, ordinateurs...), désormais supérieure aux échanges commerciaux officiels, a provoqué des critiques grandissantes chez les entrepreneurs privés.

Le gouvernement s'est efforcé d'isoler les protestataires.

En butte à d'incessants brouillages, la radio Nanduti, véritable "porte-parole des sans-voix", a dû interrompre ses émissions le 14 janvier 1987.

L'ambassadeur américain à Assomption, Clyde Taylor, s'est élevé contre cette mesure, provoquant un net regain de tension entre les États-Unis et le Paraguay. Les principaux partis d'opposition, regroupés au sein de l'Accord national, n'ont pas encore su capitaliser tous les mécontentements.

Ils hésitent aussi sur la conduite à tenir lors des élections présidentielles de février 1988.

Le boycottage des précédents scrutins, marqués par la fraude, n'a pas empêché le maintien du régime.

La levée, le 8 avril 1987, de l'état de siège, décrété pendant la guerre civile de 1947, encourage les partisans d'une participation aux élections.

Reste un obstacle de taille: Alfredo Stroessner.

Sa santé chancelante alimente les rumeurs.

Mais en dépit de la guerre de succession déjà ouverte sous ses yeux, le vieux caudillo, âgé de soixante-quinze ans, n'a pas renoncé à briguer un nouveau mandat.. »