On n'attend pas l'avenir comme on attend un train: on le fait (Bernanos).
Publié le 09/12/2021
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PLAN ADOPTÉ DANS LE DEVOIR
I.
La construction de l'avenirA.
L'homme responsable de soi : contre la passivitéB.
L'homme maître de son destin : la volontéC.
L'homme agent de son destinIL Les limites d'une telle conceptionA.
Les paramètres non maîtrisables : illusion de tout savoirB.
Les conditionnements : illusion de la libertéC.
Où la volonté s' exerce-t-elle ?
DEVOIR RÉDIGÉ
En toutes occasions, certaines personnes font appel aux services d'astrologues et autres spécialistes des sciencesoccultes afin d'apprendre de quoi sera fait leur lendemain.
Elles agissent exactement comme si le futur, tantindividuel que collectif, était déjà écrit : la vie de l'homme ne serait alors que le parcours d'une route entièrementpavée.
Georges Bernanos s'insurge contre cette conception de l'existence et affirme: «On n'attend pas l'avenircomme on attend le train : on le fait.
» Derrière son ironie, cette phrase contient de la véhémence et pose l'hommeau centre de sa vie, constituée par la série de ses choix.Pour Georges Bernanos, l'homme n'est pas l'instrument d'un destin qui se fait sans qu'il y participe.
Une attitude depassivité est scandaleuse : il n'existe pas de fatalité.
Ainsi un individu qui se prend à détester ce qu'il fait peut-ilchanger de métier : prenant des cours du soir, ou suivant une formation au sein de l'entreprise qui l'emploie, ilapprendra de nouvelles techniques et acquerra de nouvelles compétences qui lui permettront de postuler comme ill'entend, pour un métier qui convient mieux à sa personnalité.
Celui qui reste là, sans rien faire, à se lamenter surson sort ne changera jamais de condition, alors que c'est à lui, et à lui seul, de trouver les moyens de se satisfaire.Georges Bernanos s'insurge donc contre une certaine vision du temps : pour attendre l'avenir, il faudrait encore qu'ilexiste, de même qu'un train est un objet qui préexiste à son arrivée en gare.
Il n'en va pas de même pour l'avenirqui, non content d'être inconnu, n'a pas non plus de forme ou de contenu autres que ceux qu'on lui donne.
Lasagesse populaire semble s'accorder avec les injonctions de notre auteur : « Aide-toi, le ciel t'aidera », dit-elle, ouencore « Les cailles ne tomberont pas toutes rôties ».
Ces adages invitent l'homme à prendre en main sa destinée.La volonté joue ici un rôle essentiel : rien ne peut s'accomplir sans elle.
Quand en 1936 le Front Populaire est arrivéau pouvoir, ce n'était pas un hasard ; mais même une fois Léon Blum à la tête du gouvernement, les ouvriers semirent en grève pour faire entendre leurs revendications et prendre part au grand mouvement social qui devaittransformer la France.
Sans doute, sans un tel soutien populaire, le Président du Conseil aurait eu beaucoup plus demal à imposer la réduction du temps de travail et les congés payés, car le patronat et toutes les puissances de lafinance comptaient bien étouffer les exigences du peuple.
Il arrive ainsi dans l'Histoire que des groupes prennentsoudain conscience que leur avenir dépend d'eux et qu'ils ne sont pas entièrement à la merci des plus puissants quiprétendent penser pour eux.
Toutes les grandes révoltes participent de cet état d'esprit : l'action, violente ou non,succède toujours à une prise de conscience des forces en présence et renvoie à la volonté de l'homme.
Il suffitparfois de se battre contre l'oppression pour triompher d'elle : une fois encore, aucune fatalité ne pèse sur lesindividus s'ils ont la volonté de parvenir là où ils veulent.
On reconnaît là les théories militaires de Mao Tsé Toung :alors que son armée ne disposait pas d'armes ni même de soldats bien formés, que cette bande en fuite était desurcroît grosse de femmes, de vieillards et d'enfants, que les troupes nationalistes semblaient devoir triompher à telpoint que l'Occident ne lui donnait aucune chance, le chef rédigeait des textes sur la nécessaire victoire de seshommes, animés d'une volonté indestructible.Paradoxalement, l'homme fait également son destin, même s'il reste passif.
Refuser d'agir, c'est accepter que lesautres prennent des décisions, c'est consentir : la fatalité n'intervient pas à ce niveau, mais l'homme délègue sespouvoirs à autrui, qui fait l'avenir pour lui.
Il y a seulement une insigne lâcheté : l'individu croit pouvoir s'abriterderrière la volonté d'autrui pour justifier les éléments de sa vie qui ne lui plaisent pas.
On a vu qu'une telle attituderelève de la mauvaise foi.
Mais le paradoxe va encore plus loin, et le mythe d'Œdipe le prouve.
Après que l'oracle deDelphes lui a prédit qu'il tuerait son père et épouserait sa mère, le jeune homme, horrifié, quitte sans même leur direadieu ceux qu'il prend pour ses parents véritables.
Comme il n'en est rien (car ses véritables parents, informés dumême oracle, l'avaient exposé dans la montagne pour qu'il meure, ou du moins ne se trouve pas sur leur route),croyant fuir son destin, il va en réalité au devant de lui.
Ainsi, même si l'avenir est tracé quelque part (peut-êtredans le grand rouleau de Jacques le Fataliste, de Diderot), l'homme doit encore accomplir ce qui est écrit.Quel que soit le prétexte que présente l'individu pour justifier sa passivité, raisonnements et explications ne sontdonc que des alibis qui cachent de la paresse ou la faiblesse de la volonté.
Néanmoins, n'est-il pas un peu présomptueux de croire que l'on est entièrement maître de son avenir ? En effet, biendes paramètres déterminent ce que sera le lendemain, et tout ne dépend pas de la volonté de l'homme.Il n'en faut pour preuve que le même mythe d'Œdipe : le héros qui croit pouvoir échapper à son destin et luttercontre lui fait tout en sorte de ne pas accomplir l'oracle.
Mais sa volonté n'est pas la plus forte.
Bien des donnéeséchappent donc au contrôle de l'homme, qu'il ne les voie pas ou qu'il n'ait pas prise sur elles.
Celui qui a choisi de seconstruire une vie familiale heureuse et met tout en œuvre pour y parvenir peut très bien voir sa femme et sesenfants lui être ravis par un accident de la route.
Tel autre voulait devenir Président de la République, mais il n'a pasprévu que son concurrent proposerait un programme qui conviendrait mieux aux aspirations des citoyens.
Sur le planindividuel, il est impossible de décider exactement non seulement des événements, mais encore des réactions qu'on.
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