Olympe de Gouges DECLARATION DES DROITS DE LA FEMME ET DE LA CITOYENNE1
Publié le 11/04/2024
Extrait du document
«
Olympe de Gouges
DECLARATION DES DROITS DE LA FEMME ET DE
LA CITOYENNE1
(orthographe modernisée ; saisie Éliane Viennot)
Les droits de la femme
Homme, es-tu capable d'être juste ? C'est une femme qui t'en fait la question ; tu ne lui
ôteras pas moins ce droit.
Dis-moi ? Qui t'a donné le souverain empire d'opprimer mon
sexe ? Ta force ? Tes talents ? Observe le créateur dans sa sagesse ; parcours la nature
dans sa grandeur, dont tu sembles vouloir te rapprocher, et donne-moi, si tu l'oses,
l'exemple de cet empire tyrannique*.
Remonte aux animaux, consulte les éléments, étudie
les végétaux, jette enfin un coup d'œil sur toutes les modifications de la matière
organisée ; et rends-toi à l'évidence quand je t'en offre les moyens.
Cherche, fouille et
distingue, si tu le peux, les sexes dans l'administration de la nature.
Partout, tu les
trouveras confondus, partout ils coopèrent avec un ensemble harmonieux à ce chefd'œuvre immortel.
L'homme seul s'est fagoté un principe de cette exception.
Bizarre, aveugle, boursouflé de
sciences et dégénéré, dans ce siècle de lumières et de sagacité, dans l'ignorance la plus
crasse, il veut commander en despote sur un sexe qui a reçu toutes les facultés
intellectuelles ; il prétend jouir de la Révolution, et réclamer ses droits à l'égalité, pour ne
rien dire de plus.
DECLARATION DES DROITS DE LA
FEMME ET DE LA CITOYENNE
A décréter par l'Assemblée nationale dans ses dernières séances ou dans celles de la prochaine
législature
PREAMBULE
Les mères, les filles, les sœurs, représentantes de la Nation, demandent d'être
constituées en Assemblée nationale ; considérant que l'ignorance, l'oubli ou le mépris des
droits de la femme, sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des
gouvernements, ont résolu d'exposer, dans une déclaration solennelle, les droits naturels,
inaliénables et sacrés de la femme, afin que cette déclaration, constamment présente à tous
les membres du corps social, leur rappelle sans cesse leurs droits et leurs devoirs, afin que les
actes du pouvoir des femmes, et ceux du pouvoir des hommes pouvant être à chaque instant
1
.
Rédigée en septembre 1791, publiée dans Les Droits de la femme, adressée à la reine, s.n., p.
5-17.
De Paris au Pérou, du Japon jusqu’à Rome,
Le plus sot animal, à mon avis, c’est l’homme.
[Boileau, Satire VIII, note de l’autrice]
*
Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, 1791
© SIEFAR
comparés avec le but de toute institution politique, en soient plus respectés, afin que les
réclamations des Citoyennes, fondées désormais sur des principes simples et incontestables,
tournent toujours au maintien de la Constitution, des bonnes mœurs, et au bonheur de tous.
En conséquence le sexe supérieur en beauté, comme en courage dans les souffrances
maternelles, reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l'Etre suprême, les
Droits suivants de la Femme et de la Citoyenne :
ARTICLE PREMIER
La Femme naît libre et demeure égale à l'homme en droits.
Les distinctions sociales
ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune.
II
Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et
imprescriptibles de la Femme et de l'Homme : ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté
et surtout la résistance à l'oppression.
III
Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation, qui n'est que
la réunion de la Femme et de l'Homme : nul corps, nul individu, ne peut exercer d'autorité,
qui n'en émane expressément.
IV
La liberté et la justice consistent à rendre tout ce qui appartient à autrui ; ainsi
l'exercice des droits naturels de la femme n'a de bornes que la tyrannie perpétuelle que
l'homme lui oppose ; ces bornes doivent être réformées par les lois de la nature et de la
raison.
V
Les lois de la nature et de la raison défendent toutes actions nuisibles à la société :
tout ce qui n'est pas défendu par ces lois, sages et divines, ne peut être empêché, et nul ne
peut être contraint à faire ce qu'elles n'ordonnent pas.
VI
La Loi doit être l'expression de la volonté générale ; toutes les Citoyennes et Citoyens
doivent concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation ; elle doit être
la même pour tous : toutes les Citoyennes et tous les Citoyens, étant égaux à ses yeux,
doivent être également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leurs
capacités, et sans autres distinctions que celles de leurs vertus et de leurs talents.
VII
Nulle femme n'est exceptée ; elle est accusée, arrêtée et détenue dans les cas
déterminés par la Loi.
Les femmes obéissent comme les hommes à cette Loi rigoureuse.
VIII
La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne
peut être puni qu'en vertu d'une Loi établie et promulguée antérieurement au délit et
légalement appliquée aux femmes.
IX
Toute femme étant déclarée coupable, toute rigueur est exercée par la Loi.
X
Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, mêmes fondamentales ; la femme a le
droit de monter sur l'échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la tribune :
pourvu que ses manifestations ne troublent pas l'ordre public établi par la Loi.
2
Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, 1791
© SIEFAR
XI
La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus
précieux de la femme, puisque cette liberté assure la légitimité des pères envers les enfants.
Toute Citoyenne peut donc dire librement : « Je suis mère d'un enfant qui vous appartient »,
sans qu'un préjugé barbare la force à dissimuler la vérité ; sauf à répondre de l'abus de cette
liberté dans les cas déterminés par la Loi.
XII
La garantie des Droits de la Femme et de la Citoyenne nécessite une utilité majeure ;
cette garantie doit être instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de
celles à qui elle est confiée.
XIII
Pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses de l'administration, les
contributions de la femme et de l'homme sont égales ; elle a part à toutes les corvées, à toutes
les tâches pénibles ; elle doit donc avoir de même part à la distribution des places, des
emplois, des charges, des dignités et de l'industrie.
XIV
Les Citoyennes et Citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes, ou par leurs
représentants, la nécessité de la contribution publique.
Les Citoyennes ne peuvent y adhérer
que par l'admission d'un partage égal, non seulement dans la fortune, mais encore dans
l'administration publique, et de déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée
de l'impôt.
XV
La masse des femmes, coalisées pour la contribution à celle des hommes, a le droit de
demander compte, à tout agent public, de son administration.
XVI
Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation
des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution : la Constitution est nulle, si la majorité
des individus qui composent la Nation n'a pas coopéré à sa rédaction.
XVII
Les propriétés sont à tous les sexes, réunis ou séparés ; elles sont pour chacun un
droit inviolable et sacré ; nul ne peut en être privé, comme vrai patrimoine de la nature, si ce
n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la
condition d'une juste et préalable indemnité.
POSTAMBULE
Femme,....
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- LID3 « Declaration des droits de la Femme et de la Citoyenne » (1791) Olympe de Gouges « Postambule »
- LL1 Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne Olympe de Gouges Préambule et articles I et II
- En quoi la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d'Olympe de Gouges peut-elle être considérée comme un texte engagé?
- Déclaration des droits de la femme Olympe de Gouges
- La déclaration des droits de la femme et de la citoyenne de Olympe de Gouges