Nouveau Roman (exposé de littérature)

« 1 / 2 21 avril 1965 Série N• 40 Fiche N• 480 Nouveau roman 1.

L'expression "nouveau roman ..

désigne un phénomène littéraire particulier, né en France, mais qui s'étend aujourd'hui à la plupart des littératures occidentales.

Elle est apparue pour la première fois dans les articles de critique littéraire qui ont suivi la publication du premier livre d'Alain Robbe-Grlllet, " Les Gommes ..

(1953).

L'ouvrage fut abondamment discuté et commenté.

Il valut à son auteur d'être considéré comme le chef de file d'une nouvelle école, ou tout au moins comme le théoricien des nouveaux principes de la création romanesque (ce dont Alain Robbe-Grillet s'est toujours défendu).

2.

" Les Gommes,.

diffèrent radicalement du modèle du roman traditionnel.

Les personnages n'y sont pas expliqués par leur passé.

Ils n'ont pas d'histoire.

Ils sont de pures " présences " au lieu d'être les instruments actifs du destin (à la façon, par exemple, des personnages de Balzac ou de Dostoïevski).

L'écrivain n'utilise plus les ressources de la psychologie ou de !'.anecdote comme on l'avait toujours fait.

Le " nouveau roman " se définit moins par une méthode uniforme que par souci de rupture avec le passé.

3.

Ce souci de rupture fut confirmé par la suite des œuvres d'Alain Robbe-Grillet: "Le Voyeur..

(Prix des Critiques, 1955), "La Jalousie ..

(1957).

Ce dernier livre apporte un élément supplémentaire de dépaysement.

Le récit n'est fait ni à la pre­ mière ni à la troisième personne.

La description est impersonnelle.

L'existence des divers personnages est seulement suggérée par la présence des choses, minutieusement décrites.

Les personnages ne se définissent plus par rapport au monde.

Leur liberté est problématique.

4.

La qualité de " nouveau roman ..

a été étendue aux œuvres d'un certain nombre d'autres écrivains contemporains, de talents très divers.

Ceux-ci ont en commun la volonté de rejeter le héros romanesque du passé pour ne considérer que ces person­ nages aléatoires, qu'ils estiment être le produit du monde actuel.

Parmi ces écrivains, les critiques citent surtout Claude Simon (• Le Vent "• 1957; «L'Herbe "• 1958; "La Route des Flandres "• 1960; "Le Palace "• 1962), Nathalie Sarraute, Robert Pinget et Michel Butor («Passage de Milan "• 1954; "L'Emploi du Temps "• 1956; "La Modifi­ cation "• 1957).

5.

Michel Butor a écrit: " Il est indispensable que le récit saisisse l'ensemble de la société non point de l'extérieur comme une fouie que l'on considère avec le regard d'un individu isolé, mais de l'intérieur comme quelque chose à quoi l'on appartient.

" 6.

Certains critiques et sociologues accordent une grande importance au phéno­ mène du " nouveau roman "· L'apparition de ces œuvres, disent-ils, n'est pas fortuite, si l'on veut bien voir dans le roman de forme traditionnelle l'expression d'un univers privilégié, à l'existence duquel nous ne croyons pius que par complaisance.

L'homme n'est pius aujourd'hui un être spirituel indépendant du monde matériel.

D'autres volx, également nombreuses, considèrent au contraire cette entreprise de dépersonnali­ sation (de l'auteur et de ses personnages) comme la négation même de l'œuvre litté­ raire.

Dans le " nouveau roman "• ils ne voient qu'une mode nouvelle. 2 / 2. »