Mots et les Choses, les [Michel Foucault] - fiche de lecture.
Publié le 18/05/2020
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1 PRÉSENTATION
Mots et les Choses, les [Michel Foucault] , ouvrage de Michel Foucault paru en 1966.
2 « UNE ARCHÉOLOGIE DES SCIENCES HUMAINES » : IDENTITÉS ET DIFFÉRENCES
Les Mots et les Choses se présente comme une « archéologie des sciences humaines ».
L’ouvrage porte sur les sciences modernes ( XVII -XIXe siècles) et leurs nouveaux objets : le langage, le travail et la richesse, le vivant.
Il entend décrire et analyser
un système général des « transformations », qui conduit d’abord à l’émergence de ces nouveaux objets de l’investigation scientifique, puis à celle de « l’homme » en tant qu’objet possible des « sciences humaines ».
Alors que l’ Histoire de la folie à l’âge classique (1961) constituait comme une histoire de l’Autre et de la différence, les Mots et les Choses dresse l’histoire du Même et de la ressemblance.
Comment la pensée classique pense-t-elle la ressemblance
entre les choses, comment organise-t-elle ces ressemblances en système, et comment peut-elle recueillir toutes les différences dans un système d’identités ? Telle est l’interrogation initiale de ce livre.
3 ÉPISTÉMÈ ET TRANSFORMATIONS
Les Mots et les Choses repose sur une compréhension renouvelée de la notion d’ épistémè et, partant, de ce qu’est l’« épistémologie ».
Michel Foucault dit d’abord ce qu’elle n’est pas : l’épistémè n’est pas dérivée d’une invention, ni d’un système
particulier, fussent-ils ceux de Descartes, de Marx ou de Darwin.
L’ épistémè se signale d’abord par son anonymat, et ceci justifie le recours constant à une littérature scientifique tenue pour marginale dans l’histoire des idées.
Elle n’est pas non plus un espace homogène : elle n’est ni l’ensemble des conditions formelles de possibilité d’une science, comme peut l’être le transcendantal kantien ( voir Emmanuel Kant), ni un « stade général de la raison ».
Immanente aux
discours, aux systèmes — toujours pluriels —, elle est, comme l’auteur l’explicite ailleurs, « un espace de dispersion, un champ ouvert et sans doute indéfiniment descriptible de relations ».
Il ne s’agira donc pas d’établir l’étude comparée de systèmes
autonomes, mais d’étudier ces transformations spécifiques qui, dans l’espace indéfini de l’ épistémè , produisent de nouvelles formations discursives.
3. 1 De la ressemblance à l’ordre
La première transformation est celle qui mène de « l’ épistémè du XVIe siècle », fondée sur le jeu infini des ressemblances, à l’ épistémè classique, fondée sur l’ordre et la mesure.
Les médecins de la Renaissance prescrivaient de l’extrait de noix pour
guérir les maux de tête, en raison de la ressemblance entre la forme des noix et celle du cerveau.
La possibilité d’un tel savoir, nécessairement « pléthorique et absolument pauvre », reposait sur l’existence de telles ressemblances et de telles affinités
sympathiques entre les choses.
La place ici réservée à l’analyse du Don Quichotte de Cervantès témoigne simultanément de la rupture qu’introduit la science classique avec ce mode de représentation et du lien structurel entre les Mots et les Choses et l’ Histoire de la folie .
Don
Quichotte est possédé par le démon de l’analogie, prisonnier des ressemblances.
L’œuvre de Cervantès, en cela moderne, renvoie la ressemblance au domaine de l’irrationnel et de la folie.
Avec Francis Bacon, puis René Descartes, s’ouvre la critique
philosophique puis l’exclusion de la ressemblance au profit d’une science générale de l’ordre.
3. 2 Ordre des choses et ordre du discours : la représentation à l’âge classique
De là, il devient possible de décrire l’ épistémè classique comme un système articulant une « mathesis » (science des égalités, et plus largement, science de la vérité dans le jugement), une « taxinomie » (science de la classification des êtres) et une
« analyse génétique » (théorie de la « constitution des ordres à partir des suites empiriques »).
Dans un tel dispositif, l’opposition polémique entre l’empirisme des uns et le rationalisme des autres n’a plus cours.
Toutefois se fait jour la nécessité
d’appréhender simultanément la grammaire, l’économie et la science naturelle car, en dépit de la diversité de leurs objets, elles ont dans la pensée classique une parenté essentielle, et pour présupposé commun que l’ordre des choses, nature ou
marchandise, en tant qu’il correspond à l’ordre du discours, peut être entièrement manifesté par les signes.
Ce n’est nullement un hasard si le XVIII e siècle a parallèlement produit une ontologie de la transparence de l’être pensé comme intégralement
représentable et connaissable, une pensée de la continuité sans faille entre la pensée et l’être, entre les mots et les choses.
3. 3 Aporie de l’ontologie et naissance des sciences humaines
Il reste à décrire par quelle transformation prit fin l’épistémè qui avait rendu possible la grammaire, la science des vivants et des richesses, et comment survint celle qui allait leur substituer la philologie, la biologie et l’économie politique.
Michel
Foucault explique cette mutation en s’appuyant sur le vocabulaire de l’ontologie : c’est le moment où l’être se dérobe à la représentation, ou bien encore « l’affranchissement, à l’égard de la représentation, du langage, du vivant, et du besoin ».
Ce
sont ces trois nouvelles formations disciplinaires qui vont fournir exhaustivement les « catégories » et les « modèles constituants » pour des sciences humaines qui, quelle que soit la variété et souvent la confusion de leurs méthodes, appréhendent
toujours l’homme comme un être ayant des fonctions (biologiques), des besoins (économiques) et un langage (système linguistique, rituels, « codes », etc.).
Après avoir montré comment les sciences humaines puisent leur possibilité dans un dispositif dont Michel Foucault a méticuleusement analysé la formation, il ne reste plus qu’à en tirer l’étrange conclusion : l’homme est une invention récente, et une
« transformation » supplémentaire de l’ épistémè pourrait bien provoquer sa disparition.
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