Montaigne, Essais, Livre I, chapitre 23 « De la coutume et de ne changer aisement une loi reçue »
Publié le 17/05/2020
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Montaigne, Essais, Livre I, chapitre 23« De la coutume et de ne changer aisement une loi reçue »
Montaigne engagé dans son temps (fonction de magistrat, de maire)- Question de l'intérêt de changer une loi- Peut-on accepter qu'un protestant soit roi (alors que traditionnellement le roi de France est catholique ?- Les sujets protestants d'un roi catholique doivent-ils lui obéir ?- Quand un roi trahit son devoir, est-il juste de l'assassiner ?- Interrogation de Montaigne (qui s'appuie moins sur une théorie politique que sur son expérience personnelle) sur la discussion des lois qu'ont entraîné les guerres dereligion.
texte très connu qui a amené à parler de « conservatisme » à propos de Montaigne.Réflexion de Montaigne sur les rapports entre les citoyenset sur l'individu, indépendant.
I – Le sage dans la cité
Les coutumes, les lois, loin d'être fondées sur la raison, sont le fruit d'un hasard capricieux, d'où leur diversité et leur variation.Le sage, qui a une conscience particulièrement lucide, pourrait être tenté de se singulariser.Montaigne propose une pensée qui a été méditée, celle d'un sage ( personne singulière).
Secret de la sagesse = distinction entre le dedans (vie privée) et le dehors(vie publique).
Montaigne conservateur ?Plutôt une position de repli, à cause des circonstances de l'époque.En effet, le sage doit retirer son âme de la presse, de la foule.Retrait = obligation morale.
Argument d'autorité : citation de Platon, ex.
de Socrate, préférant la mort à la désobéissance, acceptant le caractère inique du jugement.
Esprit libre intérieurementqui sait cependant se plier aux lois de la cité.Méta-règle : « observer les lois du lieu où l'on est ».La 1ère règle = le bon sens, c'est l'obéissance.
II – Justification de cette attitude,ou le respect de l'ordre social et politique
a) les inconvénients de toute révolutionmétaphore, en guise de transition : « En voici une autre cuvée.
»La société est très vieille.
On a beaucoup de mal à changer une loi car les lois qui régissent la société ne sont pas indépendantes : chaque loi est la partie d'un tout.Donc modification d'une seule = changement total.Prudence de Montaigne : le progrès est hypothétique (*1), tandis que le mal entraîné par le changement est certain.De +, une réforme de détail est aussi dangereuse qu'une révolution, car cela se répercuterait sur tout le corps.
Les lois, même imparfaites, sont préférables à un changement de régime.(Montaigne énonce un principe général et ne veut pas entrer dans le détail ;il est tout à fait conscient de l'infinité de chaque loi.)
b) Les leçons de l'HistoireTout réformateur doit être conscient des risques qu'il fait encourir à l'ensemble de la population lorsqu'il songe à une réforme.Il doit assumer sa part de risque (cf.
image de la corde au cou).Les lois, les Etats, se fondent sur un consensus ; on ne peut être sûr qu'un nouvelle loi améliore un Etat (*1).Valeur d'une loi = le fait qu'elle soit communément acceptée, et non pas sa valeur intrinsèque.ex.
de Lycurpe : législateur des Spartes, célèbre pour son intégrité et son équité.
3ème ex., les cordes de la cithare :Le changement n'est pas condamné à cause des résultats, mais parce qu'il est changement.Il suffit pour le condamner qu'il soit une altération de l'ancienne façon.(cf.
Montaigne, Essais, III, 13 : « Il faut respecter les lois non parce qu'elles sont justes mais parce qu'elles sont lois.
»)Valeur symbolique de l'ex.
: pour un pays il vaut mieux qu'il y ait des lois que le lige appliquera… ?(cf.
III, 13 : L'éphore refuse de se poser la question de savoir si la harpe est meilleure, il coupe les deux cordes pour rester dans la tradition.)
l'épée rouillée :l'épée = symbole de la justice ; son caractère « vetuste » signifie qu'elle ne sert plus à trancher mais qu'elle garde sa force de symbole, c'est-à-dire l'essentiel.
anecdotes : fruit des lectures des auteurs anciens ; charme particulier des Essais.Livre I, chapitre 23 : rédigé essentiellement en 1572 Humanisme : on vient de redécouvrir les textes de l'Antiquité ; dans ce contexte, la mode est aux récits (parles historiens, voyageurs, moralistes) de coutumes singulières.
L'originalité de Montaigne est qu'il ne se contente pas d'accumuler les faits, il les compare et il les juge.
III – L'expérience de Montaigne
Aux ex.
empruntés au passé succède l'expérience (directe) de Montaigne, et l'expression de sa lassitude à l'égard du changement.
Il a vagabondé dans le passé letemps de quelques lignes, mais le problème dont il parle est d'actualité pour un Français du XVIème s.Montaigne ne s'embarrasse pas de questions : la Réforme a tort parce qu'elle est « nouvelleté ».
Elle n'a pas tout exploité, on ne saurait l'accuser de tous les maux ;mais elle a tout produit et engendré.
Montaigne pousse le raisonnement à son extrême puisque la Réforme est selon lui responsable de ce qui se fait même sans elle, etcontre elle.
IV – Les méfaits des révolutions.
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