MONTAIGNE « Des Cannibales » extrait L1 Ch.31
Publié le 08/02/2022
Extrait du document
«
Montaigne, Les essais , 1595,
« Des Cannibales » extrait L1 Ch.31
introduction :
Lorsque Montaigne écrit ses Essais de 1571 à 1592, les guerres civiles et religieuses qu’il qualifie
d’« imbécillité », en raison de leurs « cruautés inouïes » ravagent la France.
Parallèlement
l’Europe débat du bien fondé et des conséquences des guerres de Conquête qu’elle a menées
dans le Nouveau monde, décidée à évangéliser les peuples et notamment les amérindiens jugés
barbares.
Auteur humaniste dans l’âme, l’essayiste se fait l’écho de ces débats et propose dans
« Des Cannibales » ou « Des coches » son point de vue sur cette prétendue barbarie.
Structure du texte :
L 1 à 11 « extrême vengeance » : Description des pratiques guerrières honorables de ce peuple.
L 11 à 17 « suivre cette-ci » : Mais influence européenne sur ces pratiques et basculement dans la
barbarie.
L 17 à la fin : Opinion de Montaigne et mise en accusation de l’Europe
Montaigne glisse progressivement d’une description impersonnelle à la manière des ouvrages des
géographes à l’expression d’un jugement personnel.
Phrase 1 : Le pronom « ils » désigne les habitants du Brésil, les indiens.
Après avoir décrit
précédemment leur mode de vie, il aborde leurs habitudes guerrières : champ lexical des armes et
du combat : leurs guerres / armes / arcs/ épées/ épieux.
Guerre pratiquée = possiblement
défensive (la seule tolérée par Montaigne) : « contre les nations qui sont au-delà de leurs
montagnes », critique implicite des guerres civiles ou des guerres de religion qui deviendra
explicite en fin de texte.
Avec l’expression « ils vont tout nus », M convoque l’image surprenante de
la nudité costume peu adapté à la circonstance aux yeux d’un Européen.
La nudité renvoie à un
certain état naturel de ce peuple (longuement développé auparavant), mais suggère aussi qu’ils ne
sont pas militaires de profession donc pas habitués à se battre.
L’adverbe d’intensité
« tout » renforce cette idée.
La formule restrictive « ne que » dans la proposition
participiale« n’ayant autres armes que » va dans le même sens, ils n’ont pas développé d’art de la
guerre, pas d’armes sophistiquées.
Pour mieux souligner ces particularités, M recourt à
une comparaison , comme s’il voulait aider le lecteur à visualiser ce qui est hors de portée de son
regard : « à la mode des langues de nos épieux »
Phrase 2 : « C’est chose émerveillable » : l’adjectif souligne une certaine admiration de
Montaigne, qui peut surprendre lorsqu’on connait son point de vue sur cette activité humaine.
"émerveillable" = formé à partir du radical « merveille » qui désigne un fait ou une chose qui
étonne par son caractère étrange et extraordinaire, mais qui peut aussi susciter de l’admiration /
Le préfixe é indique un changement tandis que le suffixe « able » signifie qui a la possibilité de » =
qui a la possibilité de faire passer dans un état d’étonnement admiratif.
Pour renchérir sur cette
idée M recourt à la formule emphatique « c’est … que » qui met en relief l ’attribut « chose
émerveillable » en début de phrase.
Il ménage ainsi le paradoxe à venir : apparente contradiction
entre les termes « combats », « meurtre et effusion de sang » et cet adj émerveillable.
Ce
paradoxe est renchéri par un jeu sur les sonorités : allitérations en {ch], [S] et [z] qui laissent
entendre l’admiration et qui contrastent avec une allitération en [R] suggérant la violence :
« chose », « finissent » // meurtres/ effroi… Le recours au présent de l’indicatif , à valeur itérative
(habitude) ainsi que l’expression « qui ne finissent jamais que comme » signifient une habitude.
Loin de condamner ces pratiques, Montaigne salue leur vaillance, leur bravoure : « fermeté de
leurs combats» + idée selon laquelle ils ignorent la peur (« effroi ») .
P as militaire de profession
mais toutefois combattants efficaces, ils ignorent les déroutes (défaites).
Donc peuple victorieux en
toute simplicité !
Phrase 3 : « Chacun » : pronom indéfini ( évoque la globalité, la totalité sous l’angle du singulier : 1
+ 1 +1 … = tous / la communauté) : indique qu’il s’agit d’une attitude générale, commune à chacun
d’eux, donc peuple globalement brave.
Le terme « trophée » connote en effet la victoire.
A l’origine
le mot désigne la dépouille d’un ennemi vaincu (« l’ennemi qu’il a tué ») ou un objet attestant d’une.
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