Moctezuma II
Publié le 16/05/2020
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Moctezuma II
Savant, astrologue, sagace, versé dans tous les arts, militaires et autres..., quand on le compare avec ses prédécesseurs, nul ne parvint à posséder autantde pouvoir et de majesté que Moctezuma Xocoyotzin.
Telle est l'image que nous laissa du souverain aztèque le commentateur du C odex Mendoza, manuscritdestiné à renseigner C harles Quint sur l'histoire et la culture du Mexique indigène.
De son côté, le conquistador Bernal Diaz del C astillo, évoquant l'aspectphysique de celui qu'il appela le grand Moctezuma, fit de lui ce portrait : "Il était de belle stature, bien proportionné, élancé, et d'une couleur même pas trèsbrune...
et il portait les cheveux pas très longs, et guère de barbe, noire et bien plantée, et le visage un peu long et jovial, et les yeux ayant bel air, et ilmontrait dans sa personne, dans son regard, d'une part de l'affection et, quand besoin était, de la gravité.
Il était très soigné et propre.
Il se baignait une foispar jour.
Il avait de nombreuses femmes.
Si une personne venait pour lui parler, elle devait entrer déchaussée et les yeux baissés fixés vers le sol, sans leregarder en face, et dire, en lui faisant trois révérences : "Seigneur, mon seigneur, mon grand seigneur."
Plus grande que jamais était alors la puissance de la nation aztèque que Moctezuma II avait commencé de gouverner à dater de l'an 10 du Lapin, 1502.
LesAztèques, il ne faut pas l'oublier, étaient les héritiers d'un monde de cultures ayant de profondes racines dans le passé.
Ils avaient eu leurs institutions etleurs croyances venues des temps toltèques et d'époques encore plus reculées.
En fait, ils avaient procédé à un amalgame du legs culturel de Quetzalcóatlet de leurs propres traditions, la mystique guerrière d'un peuple qui se considérait l'élu du Soleil.
M exico-Tenochtitlan, la métropole édifiée au milieu deslacs, était parvenue au zénith de sa splendeur.
Dans le grand centre urbain, s'élevait l'enceinte du Grand T emple avec nombre d'autres édifices consacrésaux dieux ; on y voyait aussi les palais royaux ainsi que ceux des nobles ou pipiltin, les maisons des guerriers, les écoles, les marchés, les jardins avec desanimaux et des plantes provenant de contrées lointaines.
Tous les arts florissaient : sculpture, peinture murale, ouvrages en plumes fines, orfèvrerie,céramique.
On célébrait des fêtes religieuses et pratiquait des sacrifices humains pour alimenter de sang la force du Soleil.
Le temps se calculaitrigoureusement au moyen des systèmes de calendriers antiques.
Les sages conservaient jalousement les manuscrits peints, l'histoire et la tradition.
DeMexico-Tenochtitlan, partaient les armées en marche pour soumettre d'autres peuples et les marchands qui pratiquaient le commerce dans des régions trèséloignées.
La ville était à l'époque de Moctezuma le centre d'un vaste empire s'étendant des côtes du golfe du M exique à celles du Pacifique et qui vers lesud atteignait presque la frontière actuelle avec le Guatemala.
Tel était le monde où fut appelé à vivre et à oeuvrer le dernier des Moctezuma.
Fils d'Axayacatl, autre souverain aztèque, Moctezuma II naquit vers 1467 àMexico.
Homme de grand talent, il occupa des situations élevées, finissant par exercer les fonctions de prêtre et de sage.
Quand, en 1502, il fut choisicomme monarque du Peuple du Soleil, on dut l'aller chercher dans le Grand Temple où il disposait d'un logement pour s'y consacrer à la méditation et àl'étude.
Dès qu'il fut installé comme monarque, M octezuma prit des mesures qui permettent de découvrir en lui une personnalité bien définie, celle d'un hommesachant ce qu'il veut.
D'abord, il ordonna que soient congédiés tous les anciens serviteurs et fonctionnaires royaux du temps de son prédécesseur.Moctezuma fournit la preuve qu'il voulait gouverner en suivant la voie qu'il s'était tracée et d'une façon différente de celle de son prédécesseur.
Il se fitamener divers jeunes gens, issus de famille nobles, qui avaient étudié dans les écoles où il avait lui-même enseigné.
Il voulut attribuer à ses anciens élèvesles postes de plus grande responsabilité du gouvernement.
Le but principal de Moctezuma fut de faire prospérer la nation aztèque à tous les points de vue.
C 'est ainsi qu'il veilla aux besoins de Mexico-Tenochtitlan.Les nouvelles constructions qu'il entreprit et l'importance toujours croissante des tributs des peuples asservis étaient la conséquence de son systèmed'administration sage et ferme.
De nouvelles conquêtes furent aussi menées du côté d'O axaca et de Chiapas.
Des alliances furent sagement conclues et enmême temps le commerce se développa.
Étant extrêmement religieux, Moctezuma voulut aussi honorer en quelque sorte les divinités des peuples soumis aux A ztèques.
Il fit édifier dans l'enceintedu Grand Temple un lieu de culte, qu'il nomma Coateocalli, "la maison des divers dieux".
Profondément versé dans les doctrines et les traditions, héritagedes temps toltèques, il s'appliqua à connaître les moindres indices de la volonté divine, raison pour laquelle on a souvent dit qu'il avait une tendance àl'hésitation et à la superstition.
Les livres de peintures et les chroniques indigènes mentionnent des prodiges et des présages dont le grand souverain desAztèques affirma avoir été témoin en diverses occasions.
C e genre de préoccupations dut certainement exister dans son esprit et finit par être pour lui unevéritable obsession.
Un jour, Moctezuma se sentit étrangement attiré par un oiseau cendré que lui avaient apporté ceux qui l'avaient abattu dans la lagune.Il découvrit un miroir dans la tête de cet oiseau.
Il y regarda et y vit le ciel étoilé.
Il regarda de nouveau et vit dans le miroir des groupes d'hommes quivenaient vite en se bousculant ; ils avançaient, montés sur des sortes de cerfs.
Moctezuma consulta les sages et ceux qui connaissaient les chosesoccultes, mais ils ne surent rien lui dire.
Bientôt, ce ne fut plus lui seul mais tout le peuple qui commença de voir d'autres prodiges : une sorte d'épi de feu pénétrant dans le ciel, la foudre sanstonnerre tombant sur l'un des temples, une étoile fumante, l'eau du lac se mettant à bouillir.
O n entendait aussi les cris d'une déesse pleurant dans la nuit.
En l'an I du Roseau, 1519, Moctezuma apprit l'arrivée de certains hommes blancs mystérieux qui étaient sortis de barques grandes comme des montagnessur les côtes orientales de l'eau infinie.
Le souverain consulta à ce sujet les prêtres.
Il en fit venir à lui de contrées lointaines comme Mitla dans Oaxaca.
Laquestion qu'il posait était si par hasard Quetzalcóatl et les dieux ne seraient pas revenus.
Les chroniques indigènes relatives à la conquête parlent des allées et venues des émissaires envoyés par M octezuma à la rencontre des Espagnols.
Ellesrelatent aussi son souci d'empêcher qu'ils s'approchent de Mexico-T enochtitlan.
Le souverain redouté de tous, l'homme sagace, véritable expert desquestions politiques, se désola au-delà du prévisible.
Un texte nous rapporte "qu'il était prêt à s'enfuir, qu'il aspirait à échapper à la vue de ces étrangersqui pouvaient être les dieux s'en revenant".
M ais finalement il ne put se dissimuler.
Il maîtrisa son coeur, il voulut voir et admirer ce qui devait arriver.
Ilreçut les Espagnols dans sa ville comme des hôtes.
Quand il se rencontra avec Hernán C ortés, le retour de Quetzalcóatl sembla se vérifier.
M octezumaparla ainsi : "Ce n'est pas que je rêve, je ne sors pas d'un rêve...
Je t'ai vu, j'ai posé les yeux sur ton visage...
Depuis cinq jours, depuis dix jours, j'ai étédans l'angoisse, j'avais le regard fixé dans la région du mystère.
M aintenant, c'est réalisé ; tu es revenu...
Prends possession de la terre..."
Logés dans les palais de la ville, les Espagnols purent se rendre compte de la grandeur et de la puissance des A ztèques.
Mais le séjour des conquistadoresà Mexico-Tenochtitlan fut brutalement interrompu par l'attaque perfide perpétrée par Pedro de A lvarado en l'absence de Cortés.
En fait, Moctezuma étaitdéjà prisonnier des étrangers qu'il avait accueillis chez lui.
P endant la grande fête de Toxcatl, qui se célébra à une date voisine de Pâques 1520, eut lieu cequi est connu sous le nom de "Massacre du Grand Temple".
A son retour dans la ville, Hernán Cortés comprit qu'il était nécessaire d'en faire sortir au plustôt ses gens.
Sous la contrainte du conquistador, Moctezuma dut parler au peuple pour essayer de l'apaiser.
Et, selon certains chroniqueurs, les A ztèqueseux-mêmes le lapidèrent et il en mourut.
D'autres affirment que les Espagnols le mirent à mort.
La fin tragique de Moctezuma devint une nouvelle forme de présage : bientôt la nation aztèque devrait succomber elle aussi.
Le monarque sagace, qui avaitaffermi mieux que quiconque la puissance du Peuple du Soleil, n'était pas parvenu à comprendre ce que signifiaient des hommes et des réalités d'une originesi différente qui avaient surgi soudain sur la terre d'Anahuac.
Dans l'affrontement de cultures et de forces dissemblables, l'univers des symboles indigènes,avec son faix de croyances magiques, se dissocia à jamais.
La grandeur tragique de M octezuma fut de demeurer jusqu'au bout obstinément attaché à sescroyances comme si en lui-même il avait pu sauver au moins la vérité d'un monde inexorablement condamné à cesser d'exister..
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