Manet, Olympia
Publié le 16/05/2020
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Manet, Olympia
Par le retentissement provoqué lors de sa première exposition au public, cette femme nue est la plus célèbre del'histoire de la peinture.
Plus précisément, le sujet est une prostituée qui reçoit un bouquet de fleurs d'un amantreconnaissant.
Le modèle, très souvent représenté par Manet, s'appelle Victorine Meurent.
Il correspondparticulièrement au sujet, car ce corps ramassé aux formes pleines inspire plus la sensualité instinctive que la grâce.Son aspect non idéalisé est en partie responsable des réactions violentes du public.
L'Académie exige une facture plusunie, et surtout impose une transposition du nu dans un contexte mythologique.
Rien de tout cela n'a été respecté ici,ce qui entraîne l'explosion furieuse de la critique.
On a peine à imaginer que « si la toile de l'Olympia ne fut paslacérée et crevée, ce fut grâce aux précautions prises par l'administration », comme l'écrit Antonin Proust, le fidèleami d'enfance du peintre.
Même si le tableau est typiquement contemporain par son sujet, Manet, qui est un hommeinstruit de l'histoire de l'art, se réfère par-delà les siècles aux nus somptueux de Titien ou Giorgione qu'il a eul'occasion d'admirer lors de ses voyages.
Ce tableau est à la fois une provocation contre le bon goût de l'époque et unclin d'œil d'un artiste cultivé à ses semblables.
Il est caractéristique de la volonté du peintre de marier les leçons duclassicisme avec l'époque moderne et sa poésie particulière.
Présenté au Salon de Paris de 1865, l'Olympia d'Edouard Manet suscite un des plus grands scandales de l'histoire de la peinturemoderne.
Le tableau sera objet de dérision et de colère de la part du public, qui en menace même l'intégrité, ce qui oblige à unesurveillance spéciale.
La presse spécialisée publie des commentaires sarcastiques ou des éreintements en règle.
C'est le cas parexemple de La Presse : "lorsque l'art s'abaisse à de tels niveaux, il ne mérite même pas le mépris".
Les raisons pour lesquelles cetableau, que l'on considère comme un des plus grands chefs-d'oeuvre de la modernité, est perçu comme une provocation outrancièrede la part des contemporains de Manet, sont multiples.
En premier lieu, le sujet est tenu pour indécent : une prostituée nue qui reçoitdes fleurs en cadeau d'un de ses clients.
En deuxième lieu, la référence à la Vénus d'Urbin de Titien, auquel Manet empruntel'agencement général et la pose de la femme, est interprétée comme un geste de dérision, blasphème à l'égard du grand maître.
Lepersonnage féminin constitue une autre source de scandale, avec son corps nu réaliste et provoquant et son regard en même tempsfroid et enjôleur.
Enfin, on critique les violents contrastes de clair-obscur et l'absence de modelé, tandis qu'on ignore les incontestablesqualités formelles de l'oeuvre, comme l'harmonie de la composition, la maestria dans le dessin, et les accords chromatiques raffinés.
Peintre français.
Provenant d'une riche famille bourgeoise, il fait des études classiques au lycée Rollin à Paris, où il se lie d'amitié avecle futur écrivain Antonin Proust, à qui l'on doit de précieux renseignements sur sa vie et sur son activité (Souvenirs).
A l'âge de seizeans, il abandonne ses études pour entreprendre la carrière d'officier de marine, mais il n'est pas reçu aux épreuves d'admission; ildécide de s'embarquer pour Rio de Janeiro sur un navire marchand, comme pilotin.
Pendant le voyage, il commence à se consacrer audessin, en exécutant les caricatures des membres de l'équipage.
Ayant échoué une deuxième fois aux épreuves d'admission à l'ÉcoleNavale, il convaint son père de le laisser entreprendre des études artistiques: en 1850, il entre dans l'atelier du peintre académiqueThomas Couture, où il reste pendant six ans, malgré de violents désaccords avec son maître.
Convaincu que le renouveau de lapeinture doit se faire dans le cadre de la tradition, il étudie les oeuvres des grands maîtres conservées au Louvres et, entre 1852 et1856, il effectue de nombreux voyages en Hollande, Allemagne, Autriche, Italie.
Il s'intéresse en particulier à des artistes commeGiorgione, Titien, et les Hollandais du XVIIe siècle, qui ont placé la couleur au centre de leurs recherches picturales.
Les grandspeintres espagnols, comme Francisco Goya y Lucientes et Diego Velázquez, qu'il a l'occasion d'étudier profondément au cours d'unséjour en Espagne en 1865, joueront un rôle fondamental dans sa formation.
Ses premières oeuvres importantes représentent desscènes de la vie parisienne, en partie inspirées par son ami Charles Baudelaire (Buveur d'absinthe, 1858, Copenhague, Ny CarlsbergGlypotek; Musique aux Tuileries, Londres, National Gallery).
Le Buveur d'absinthe est refusé au Salon de Paris de 1859, malgré l'avisfavorable d'Eugène Delacroix.
Deux ans plus tard, il obtient avec le Guitariste espagnol (New York, Metropolitan Mus.) une des trèsrares récompenses officielles de sa carrière.
Après la série de tableaux de 1862 inspirée par une compagnie de ballet espagnole,Manet exécute en 1863 deux de ses tableaux les plus célèbres, qui constitueront un jalon pour la peinture impressionniste et post-impressionniste: Le Déjeuner sur l'herbe, et Olympia (Paris, Musée d'Orsay).
Ces deux tableaux suscitent un des scandales les pluséclatants de l'histoire de la peinture moderne, aussi bien par les sujets traités que par le style anti-académique qui les caractérise.Manet abolit les volumes, la perspective, le clair-obscur, et le "sfumato", et applique les couleurs à plat, dans des contours nettementcernés, en rapprochant les tonalités claires et sombres pour obtenir d'audacieux contrastes de couleurs.
Le manque de profondeur del'espace provient de son analyse des estampes japonaises, tandis que la palette et certains éléments de la composition sont à rattacherà l'influence de la peinture espagnole.
Au cours des années suivantes, Manet peint une série de natures mortes et, après son voyageen Espagne de 1865, il exécute des tableaux inspirés par la peinture de Goya et de Velázquez, comme le Fifre (1866, Paris, Muséed'Orsay), les différentes versions de l'exécution de l'empereur du Mexique Maximilien (1867; la plus intéressante se trouve àMannheim, Kunsthalle), Le déjeuner dans l'atelier (1868, Munich, Bayerische Staatsgal) et le Balcon (1868, Paris, Musée d'Orsay).
Apartir de 1863, il participe aux réunions du café Guerbois et de la Nouvelle Athènes, avec les jeunes peintres qui donneront naissanceau mouvement impressionniste.
Malgré sa courte adhésion à l'Impressionnisme, dont témoignent des toiles comme Couple en barque àvoile (1874, New York, Metropolitan Mus.), et Monet et sa femme (1874, Munich, Neue Pin.), Manet reste délibérément en dehors dugroupe, en refusant de participer aux expositions collectives.
Contrairement aux jeunes peintres impressionnistes, il préfère la figurehumaine au paysage, et il a recourt à des tonalités et à des rapprochements de couleurs qui ne suivent pas les règles de lacomplémentarité propres à la peinture impressionniste.
Ses principaux interlocuteurs restent ses amis écrivains Baudelaire, Zola,Mallarmé, qui lui inspirent une série de tableaux teintée de naturalisme, comme le Bar des Folies Bergères (1881, Londres, Tate Gall.)et Nana (1877, Hambourg, Kunsthalle), qui précède de peu la publication du roman homonyme de Zola.
Tout au long de sa carrière,Manet exécute des portraits de ses amis ou connaissances, en représentant toujours les personnages de façon très immédiate et avecune grande acuité psychologique (Portrait d'Émile Zola, 1867-68, Paris, Musée d'Orsay)..
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