MACHIAVEL

« MACHIAVEL Machiavel est un révolté solitaire.

A vingt-neuf ans, en 1498, il était secrétaire du gouvernement républicain deFlorence.

Ses fonctions l'amenèrent à remplir de nombreuses missions auprès des souverains de l'époque.

Mais lesMédicis, soutenus par le pape guerrier Jules II, intriguent pour reprendre Florence et s'emparent d'Etats voisinsassociés à la république florentine.

Machiavel, résolument républicain, organise la résistance.

En vain, les Médicisprennent Florence.

Il est arrêté, emprisonné, soumis à la torture, puis banni et exilé.

Il se retire à San Casciano où ilreste dix ans.

Il écrit pendant ce temps deux livres : Le Discours sur la première décade de Tite-Live et Le Prince,ce dernier rédigé en 1513, entre deux périodes de rédaction du précédent.

Tout se passe comme si, alors qu'il étaiten train de décrire la constitution et la beauté idéale de la République de ses rêves (dans le Discours), Machiavelavait senti brusquement la lacune fondamentale de son système et découvert qu'il n'avait pas traité de la fondationd'un tel Etat dans les circonstances historiques de son temps, le temps des Borgia et des Médicis, des condottieri,des tueries incessantes et des guerres de rapaces entre Pise, le pape, Venise, Florence, etc...

et c'est pourquoi ilécrit le Prince. Machiavel écrit aussi vers 1520 Y Art de la guerre, où il prône le remplacement des mercenaires par les milicesnationales.

Il se rapproche des Médicis par la suite, reçoit la mission d'écrire l'histoire de Florence.

Il restecependant assez suspect.

Il meurt en 1527. le prince C'est l'œuvre la plus célèbre de Machiavel, celle qui a fait passer le machiavélisme dans le langage courant.

Lejugement sévère de Frédéric II qui écrivit L'anti-Machiavel a orienté malheureusement le jugement de la postérité : iltendait à montrer le livre comme un manuel de technique politique d'un réalisme satanique, qui ne se posait jamaisles questions de la justice, du droit, de l'autorité légitime, de la morale. En vérité on ne peut comprendre l'ouvrage que par rapport, d'une part, à la situation historique de l'Italie et, d'autrepart, au rêve de Machiavel imaginant une Italie unifiée enfin débarrassée des pillages et des chefs de bandes, etrégénérée dans une nouvelle république.

Pour que se réalise un tel rêve, il ne faudrait ni un prophète palabreur ni unnouveau tyran, mais un libérateur inspiré et réaliste, un prophète armé.

C'est lui le prince.

Sa mission sera triple :prendre le pouvoir, assurer la stabilité politique, construire la République unifiée.

Faisant le tour des hommes de sontemps capables d'être ce libérateur de l'Italie, Machiavel pense à Laurent de Médicis et lui dédie l'ouvrage. Pour aboutir, il faudra tenir compte de la malignité de la nature humaine (les hommes sont méchants, égoïstes,ingrats, changeants), de l'inconstance de la Fortune (il y a des chances, des malchances, des occasions, desconcours de circonstances qui mènent l'histoire).

Le bon prince sera un héros tragique qui agira en conséquence,impitoyable et rusé, résolu et froid parce qu'il le faut, parce que c'est la seule manière de juguler l'instabilité politiqueet la perversion des hommes, pour instaurer la cité juste, qui est, à la fin du livre, évoquée comme la justification duprince. Le pessimisme de Machiavel le rend méfiant aussi bien à l'égard des hommes qu'à l'égard des idéaux moraux.

Il veutse garder de l'utopie ; il ne cherche pas à « éveiller les consciences », il veut agir pour le bien de la patrie encommençant par un coup de force.

L'ouvrage en donne la technique.. »