LUCRÈCE
Publié le 16/05/2020
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LUCRÈCE
98 ?-53 ou 55 av.
f-C
LE PREMIER DES POÈTES MAUDITS
LE grand Lucrèce, esprit sain, raison offensive, intelligence cosmique, n'en incarne pas moins
ce monstre
romantique moderne que l'on appelle un Poète Maudit, comme le fut Rimbaud,
ou, dernier en date, Artaud.
Ses contemporains plus jeunes, auxquels son génie a servi : Virgile,
Horace,
ne l'ont pas nommé, ayant secrètement horreur de son impiété; mais la malédiction qu'il
porte est autrement grave que la méconnaissance et le silence, car il s'agit d'une fatalité intérieure
qui l'aurait dévoré lui-même et poussé au suicide.
En vérité, on en est réduit à des conjectures;
mais les conjectures, ici, agitent
de lourdes draperies tragiques.
Nous
ne possédons qu'un texte biographique sur Lucrèce, composé plus de quatre cents ans
après sa
mort par un Père de l'Église, saint Jérôme.
Après avoir bu un philtre d'amour qui lui fit
perdre la raison, il écrivit quelques ouvrages dans les intervalles de sa folie, et se tua, de sa propre main, à
quarante-quatre ans.
Ovide évoque les sorcières expertes en bouillons d'herbes magiques, en liquides de cavales
en chaleur.
Et Horace dit de Canidie, sa maîtresse, qu'elle tirait des philtres du sang d'un petit
enfant enterré vivant.
Suburre, à Rome, abondait en spécialistes.
Au cas où philtre il y eût, l'important serait de savoir si l'on fit boire le philtre au poète à son
insu, ainsi
qu'il advint pour Tristan et Iseut, ou s'ille but volontairement, s'il le commanda lui
même.
Bref, l'intérêt est mieux qu'historique : psychique.
On peut se demander si l'amour ne
laissait pas à Lucrèce une impression d'incomplétude allant
jusqu'à l'angoisse.
Il était dès lors
logique
qu'en épicurien sévère il cherchât, par un philtre approprié, beaucoup moins à se donner
une volupté qu'à éviter la souffrance, point essentiel de la doctrine.
Bien
que le De Natura n'ait rien qui ressemble à une confession ou à un journal intime,
c'est
pourtant lui qu'il faut interroger.
On n'y a pas manqué.
Dès qu'il s'agit d'un dérangement
dans
les rouages subtils de l'amour ou que l'horloge sonne la névrose, on trouve toujours, au
xxe siècle, un psychanalyste de service.
Un grand psychiatre et un lettré, le docteur Logre, a
étudié
l'Anxiété de Lucrèce dans un livre remarquable qu'on ne peut négliger, moins pour en adopter
toutes les conclusions que pour voir les vers du poète latin prendre une physionomie nouvelle à
la faveur des lumières sourdes, des feux de fouille étranges de la psychanalyse..
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