L’œuvre d’art peut-elle être utile ?

« L’œuvre d’art peut-elle être utile ? Au sens le plus large (qui prend en compte l’étymologie du mot « art » - c’est-à- dire « habileté ») on peut appeler « œuvre d’art » tout résultat produit d’un procédé maîtrisé.

La table fabriquée par un menuisier est une œuvre d’art, un autoportrait de Rembrandt est aussi une œuvre d’art.

Ainsi, on peut appeler œuvre d’art toute chose artificielle , tout ce qui est au monde par un projet et par habileté de l’homme.

A l’intérieur de l’art en général l’histoire a distinguée l’art de l’ artisan que l’on appelle plutôt technique (que nous plaçons du côté de l’utile, de la répétition) et l’art de l’ artiste auquel nous avons tendance à réserver l’usage du mot « art » (et que nous plaçons du côté du beau et de la recherche de la nouveauté – la répétition y devient un défaut).

A l’évidence lorsqu’il s’agit de l’œuvre de l’artisan, l’œuvre d’art est utile puisque c’est sa définition même, l’artisan produit de l’utile . La question prend plus de profondeur lorsqu’on la pose au sujet de ce qu’on appelle les « Beaux-Arts », depuis le 17° siècle (précisément pour les distinguer de l’art utile).

Les Beaux-Arts relèveraient de la création, viseraient le beau, feraient exister des objets uniques là où l’artisanat produit, vise le beau, fait exister des objets dont la ressemblance avec d’autres objets peut être une qualité. L’œuvre de l’artiste peut-elle être utile ? Sur cette question des représentations assez contradictoires nous viennent à l’esprit : d’un côté nous dirions facilement qu’une œuvre d’art ne sert à rien : si j’ai froid la photographie d’un manteau ne me réchauffera pas, pas plus qu’’un tableau représentant une pomme ne me nourrira.

Pourtant, en même temps, chacun reconnaît le manque profond qui résulterait pour lui de la privation d’une œuvre à laquelle il tient.

De même, il est remarquable parfois que nous avons l’impression de nous orienter, de nous repérer dans une situation, en prenant appui sur une œuvre d’art : par exemple nous éclairons une situation en l’associant à un personnage de théâtre, à un film ou à un auteur. Nous pourrions même, pour commencer, trouver des raisons de juger que l’œuvre d’art est utile au sens le plus élémentaire du mot c’est-à-dire au sens où elle aurait une forme d’ efficacité pour la penser pour l’action. I) L’efficacité de l’œuvre d’art Dans le cas de l’œuvre de l’artisan la question de l’utile est tranchée de manière évidente mais on peut trouver aussi des raisons d’admettre une dimension « utilitaire » de l’œuvre de l’artiste : - L’œuvre d’art est parfois un « véhicule d’information » (formule proposée par Panofsy dans L’œuvre d’art et ses significations ).

Cela signifie qu’elle nous informe sur quelque chose, un évènement de l’histoire, un certain état de la société,… Par exemple le tableau La liberté guidant le peuple de Delacroix (illustration 1) expose l’événement historique des « trois glorieuses », journées de soulèvement populaire qui ont conduit à la destitution de Charles X.

La littérature de Zola, un film biographique sur tel ou tel grand homme de l’histoire ou encore une chanson. »