Libye (1983-1984)

« Libye (1983-1984) La Libye, l'un des pays les plus pauvres du monde au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, est devenu grâce à ses réserves pétrolières un de ceux dont le revenu par habitant est le plus élevé.

Cette manne a permis au colonel Kadhafi, à la suite de sa prise de pouvoir en septembre 1969 (renversement du roi Idriss Al-Senoussi), d'asseoir un régime à maints égards original.

Sous le vocable de "troisième théorie universelle", il s'agit pour le président libyen d'inventer une voie entre le capitalisme et le communisme, faite à l'intérieur de "démocratie directe", et ordonnée à l'extérieur autour d'un grand dessein panarabe et islamique. Si le pétrole a permis au "guide de la Révolution" d'obtenir un crédit populaire certain auprès des Libyens, ses tentatives pour mettre en oeuvre ses prophéties se sont en revanche soldées par des échecs.

Pis, ses foucades, ses renversements d'alliances, ses prises de position abruptes, lui ont valu de solides inimitiés, sinon des adversaires résolus tels les États-Unis, dont le président Reagan a pu décréter Kadhafi "ennemi n° 1 de l'Amérique".

Une image que l'imprévisible leader cultive avec machiavélisme.

Soutien aux groupes terroristes (IRA, dissidents palestiniens) et aux tentatives de coup d'État dans la région (Tchad, Centrafrique), commandos infiltrés (Tunisie), chasse à ses opposants: le prophète de la Jamahiriyah (assemblée islamique) fait feu de tout bois, multipliant ses cibles au premier rang desquelles l'"impérialisme", le sionisme, et les États arabes jugés complices.

Facettes paradoxales en tout cas d'un homme qui vilipende l'URSS "patrie de l'athéisme" mais utilise ses conseillers ; prône un retour à l'islamisme originel mais mobilise les femmes en faveur du divorce par consentement mutuel, quand il ne dénigre pas Khomeiny ; soutient les terroristes italiens mais prend d'importantes participations dans la Fiat... Le 8 mai 1984, un commando d'une quinzaine d'hommes tentait de prendre la caserne d'Azizia à Tripoli.

Mais ce coup de force échouait et se soldait par la mort des rebelles.

Cet épisode s'est inscrit dans une conjoncture interne rendue plus difficile par une légère détérioration de la situation économique.

En effet, les recettes pétrolières sont passées de 22 milliards de dollars en 1980 à 11 milliards en 1983.

Le gouvernement a donc décidé de mettre en place une politique de rigueur, et le budget de développement a été réduit en 1984 de 9% pour la troisième année consécutive.

De même, de nombreux grands projets d'aménagement ont été reportés.

Les salaires ont été bloqués et parfois diminués.

L'austérité succédait ainsi à une décennie d'aisance.. »