Les prisons
Publié le 18/05/2020
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«
UNE
PRATIQUE
ANCIENNE
Toute société cherche à se protéger
contre ceux qui rompent le pacte
social.
Il s'agit de les neutraliser,
de les punir, de les rééduquer, enfin,
pour les réinsérer.
La prison a de nos jours pour
vocation de remplir ces fonctions.
De l'Antiquité jusqu'à la fin du
XVIr siècle, un individu condamné
pouvait être banni, envoyé aux
galères ou supplicié.
La pratique de l'enfermement,
utilisée principalement pour la mise
à l'écart des opposants politiques,
mais aussi des pauvres ou des
malades, est très ancienne.
LA GÉNÉRALISATION
D 'UN SYSTÈME EXISTANT
Dans Surveiller et punir, naissance
de la prison (1975), Michel Foucault
montre que c'est à l'extérieur
du système judiciaire qu'est
réellement née la prison, dans
le développemen� tout au long
des XVIr et XVIII' siècles, de pratiques
d'enfermement et de surveillance
généralisées : Foucault souligne ainsi
le rôle répressif de l'Hôpital général,
créé en 1654, et des dépôts
de mendicité, créés en 1764.
Il replace l'enfermement
pénitentiaire dans une perspective
plus vaste.
Cette pratique de
l'enfermement n'allait pas de soi
dans les théories juridiques sur
lesquelles reposait ce système :
aucun des grands réformateurs
de la seconde
moitié du XVIII'
siècle, comme
lemorquis
deBeccorio
ou Brissot de
Warville, ne la
concevait comme principe général
ni même seulement préférentiel
de la pénalité.
Ainsi, la généralisation de la prison
comme forme pénale du châtiment
est en fait la généralisation d'un
système destiné à rendre les
individus dociles et utiles à la société :
ces mécanismes de contrainte,
à l'œuvre dans tout l'espace social,
ont tout simplement fini par investir
l'institution judiciaire au moment de
son intégration dans un appareil
d'État centralisé.
UNE INSTITUTIONNALISATION
RÉCENTE
L'institutionnalisation de la prison
dans le système pénal français date
des XVIII' et XIx' siècles.
Elle
correspond à la décision de substituer
la peine privative de liberté aux
châtiments corporels qui étaient de mise
sous l'Ancien Régime.
Le Code
d'instruction criminelle de 1808 et le
Code pénal de 1810 (dont la révision,
commencée en 1974, a abouti à un
nouveau Code, adopté en 1992 pour
être appliqué à partir de 1994) font
alors de la prison la forme générale
de la pénalité.
Quant à la condamnation à mo�
elle est limitée dès la fin du XVI Ir siècle
à un nombre réduit de crimes,
et rendue moins cruelle.
En France, la
guillotine est
spécifiquement
l'homme et
du citoyen
reconnaissant
les principes
de liberté et
d'égalité expliquerait la
généralisation du système de la
prison : une peine unique et
quantifiable, susceptible d'être
appliquée à tous les individus en
réponse à tous les types
d'infractions.
L'ARCHITECTURE CARdRALE
Les techniques spécifiques de
surveillance commandaient une
architecture nouvelle, dont le modèle
- qui sera adapté à toutes
les institutions
d'enfermement
est le Panopticon,
conçu par Jeremy
Benthom en 1791 :
il s'agit d'u n
bâtiment conçu de
telle manière que les occupants de
chaque cellule, séparés les uns des
autres, soient tout à la fois en état
de visibilité permanente et dans
l'impossibilité de voir le surveillant
qui les observe à partir d'un point
central.
C'est encore sur ce modèle
panoptique que fut construite
en 1969 la prison de Fleury·
Mérogis (91).
UNE PRATIQUE BAS�E SUR DES
R�FLEXIONS THÉORIQUES
Du début du xiX' siècle à aujourd'hui,
l'histoire de la prison française se
confond avec celle des débats
théoriques, des projets de réforme
et des programmes de réalisation, généralement
par�lll.
inaboutis, auxquels elle a donné lieu.
li s'agi� dans un double mouvemen�
de faire correspondre à chaque
statut pénal un type déterminé
d'établissement e� d'autre pa�
de doubler la peine d'une fonction
thérapeutique, la mise à l'écart
des condamnés s'accompagnant
de tentatives de resocialisation.
Au début du XIx' siècle, une division
fut instituée entre les établissements
à la charge du département
(maisons d'arrêt, maisons de justice
et maisons de correction,
regroupées assez rapidement pour
des raisons financières dans un
unique établissement) et les maisons
centrales (de correction d'une part et
de réclusion d'autre par�=,.
Sous la Restauration, on construisit
des prisons pour remplacer les
édifices religieux (cloîtres,
monastères, abbayes) utilisés
auparavant.
Puis, sous le Second
Empire, les conditions de vie dans
les prisons départementales furent
réglementées.
En 1854, on décide le
transport outre-mer, en Guyane puis
en Nouvelle- Calédonie, des
condamnés aux travaux forcés: c'est
le fameux bogne.
Sous la Ill' République, des lois
impor�l#.
relatives au régime
cellulaire (5 juin 1875), à la
relégation en Guyane des
multirécidivistes (27 mai 1885),
à la libération conditionnelle
(14 août 1885), au sursis et à la
récidive (26 mars 1891), sont votées.
UNE PRISON MODERNE
À partir de 1945, la dégradation du
système pénitentiaire -résultant de
la rétrocession à l'État des prisons
dépar�lll.
et des effets de la
surpopulation pénale -conduit à
une réorganisation administrative et
à une réforme du régime de
détention.
Elle engendre aussi la
mise en œuvre effective d'un
programme de nouvelles
constructions, l'institution d'un juge
d'application des peines (1959) puis,
en 1975, une nouvelle réforme visant
à améliorer les conditions de vie
carcérale, à diversifier le régime de
détention et à favoriser la réinser�.
sociale des détenus.
Enfin, la loi du
11 juillet 1975 marque l'amorce
d'une nouvelle politique pénale,
fondée notamment sur des mesures
alternatives à l'emprisonnement.
En 1981, la peine de mort est abolie.
S'en suivent 20 ans d'amélioration
des conditions de vie dans les prisons.
Conditions
aujourd'hui
encore largement insatisfaisantes,
notamment à cause de la vétusté des
locaux, malgré plusieurs plans de
construction.
LA POPULATION CARCÉRALE
En 1993, La France comptait une
population carcérale qui avoisinait
52 000 individus -environ 21 000
prévenus et 31 000 condamnés,
pour près de 58 millions d'habitants.
Ce chiffre est sensiblement supérieur
à celui du début du XIx' siècle
(43 000) et nettement inférieur
à l'année 1945 (63 000}.
Mais les
statistiques confirment une tendance
à l'augmentation de la population
carcérale, très nette depuis 1975.
Cette croissance est liée
à la hausse des durées de détention
et à l'augmentation du poids relatif
de la détention provisoire, dont la
durée moyenne s'allonge de
manière constante.
Le phénomène de l'impor�l.
de la détention préventive est
peut-être la caractéristique
principale du système pénitentiaire
français :à l'exception de Malte, la
France est l'État dont le taux de
prévenus est le plus élevé de tous
ceux du Conseil de l'Europe.
Cette spécificité est directement
à l'origine de la surpopulotion
que connaissent les maisons d'arrê�
et qui impose aux prévenus et aux
condamnés à de courtes peines
une promiscuité aux effets
criminogènes avérés.
AMÉLIORER LA SITUATION
En 2002, un secrétaire d'État
aux programmes immobiliers
de la Justice a été nommé.
LE CAS DES MINE URS
L'ordonnance du 2 février 1945
sur l'enfance délinquante prône
la primauté de l'éducatif sur la
répression.
Mais, en 2002,
pour mieux lutter contre le
" rajeunissement et l'aggravation
de la délinquance des mineurs>> et
" combler les insuffisances
du dispositif pénal actuel >>,
un projet du gouvernement
privilégie les mesures répressives
sur l'accompagnement éducatif.
Les mineurs délinquants étant
de plus en plus jeunes,
le gouvernement crée des
" sanctions éducatives » pour les
enfants de 10 à 13 ans.
En
avril 2003, 59 155 personnes
étaient détenues dans les
établissements_pénitentiaires,
pour une capacité d'accueil de
47 933 places.
Pour remédier à cette
insuffisance, le programme prévoit
la livraison de 13 200 places, dont
10 800 places par la construction
de prisons nouvelles,
2 000 places réservées à
l'application d'une nouvelle
conception de l'enfermement,
et 400 places destinées à l'accueil
des mineurs.
cc Pour les personnes
détenues, la priorité est donnée
à la qualité de vie et à l'hygiène.
Des aménagements par�l
.à
l'intérieur de la prison sont prévus :
lieux de vie en commun pour
préparer une meilleure réinsertion,
facilités d'accès et d'information
des familles de détenus », précise
le projet.
LE BRACELET ÉLECTRONIQUE
Le dispositif du placement sous
surveillance électronique a été
expérimenté depuis octobre 2000.
Au 1" octobre 2002, 393 mesures
avaient été prononcées avec un taux
d'échec très faible.
Le brocelet
électronique
constitue une
alternative
pertinente à
l'emprisonnement et une modalité du
contrôle judiciaire
de nature à limiter le nombre des
détentions provisoires.
C'est pourquoi la loi du 9 septembre
2002 a prévu d'étendre ce dispositif
à 3 000 bracelets.
En élargissant la détention
provisoire en cas de délit
aux mineurs de 13 à 16 ans,
le gouvernement prend le risque
de confronter des très jeunes gens
à la violence de la prison,
considérée pourtant comme
" criminogène » par les
spécialistes de l'enfance.
Selon
une étude statistique datant de
1994, 77 %des mineurs récidivent
dans les cinq années après
leur sortie
de prison
et 40%
dans les
trois mois..
»
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