Les nations riches et les peuples pauvres
Publié le 06/07/2020
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« Les peuples continuent à penser « nation » au lieu de penser « monde >>; les peuples riches continuent de croire que le monde entier est à leur discrétion pour leur permettre d'accroître à rythme régulier leurs niveaux de vie déjà si élevés; les peuples pauvres n'ont pas conscience de la gravité de leurs désordres internes, de leurs ambitions irréalisables, de leurs appels contradictoires. Les politiques des uns et des autres restent courtes, extrêmement courtes, du fait que ni les uns ni les autres ne perçoivent clairement les obligations qui devraient découler des complémentarités économiques et culturelles et de la propagation universelle du savoir scientifique et technique occidental. Les dirigeants sont noyés dans l' « immédiateté >> devenue pour eux un absolu qui leur voile toute grande perspective. Un fait majeur devrait attirer l'attention. L'exemple de l'Occident a provoqué la contagion du désir de savoir. Il n'est aucun peuple, si peu développé qu'il soit, qui ne cherche à multiplier ses écoles primaires, à fonder des écoles secondaires, à créer des écoles supérieures. Par le savoir, pour la première fois, l'humanité prend conscience de sa réalité totale, et cela constitue une révolution aussi importante que celle des communications et des transports. On ne dispose pas encore de données très précises sur l'effort d'alphabétisation et d'instruction dans les pays sous-développés ou non développés... L'effort de l'Inde [par exemple] est considérable : de 8 p. cent il y a seulement quelques années, le taux d'alphabétisation était monté à 16,6 p. cent en 1954 1 [...] Dans le rapport de 1957 sur la situation sociale dans le monde, les renseignements fournis par des pays représentant go p. cent de la population mondiale, la proportion d'enfants inscrits dans les écoles a augmenté de 18 p. cent entre 1950 et 1954. En apprenant à lire, à observer, à comparer, à conclure, les peuples pauvres apprennent aussi à réagir. Les couches de population à bas niveau de vie entrent en réaction contre les couches de population dominantes. [...] Les peuples sous-développés s'aperçoivent de la distance qui les sépare des peuples développés en fait de satisfaction des besoins et du mépris et de l'exploitation dont ils ont été l'objet. En conséquence, ils entrent en réaction contre l'Occident tout entier. Mais, habitués que sont les Occidentaux à interpréter toute situation dans leurs perspectives, ils accordent trop peu d'importance à l'agressivité qui s'exprime aujourd'hui contre leurs errements. Quand, par exemple, Mamadou Dia 1 analyse l'économie africaine sous l'influence de l'Europe, son interprétation parfois excessive choque les gens d'Europe. Elle est cependant plus objective que l'interprétation naïvement conservatrice à laquelle se raccrochent encore trop d'Européens. [...] Qu'il nous suffise de nous reporter ici à la revue française Études et Conjonctures, publiée par un service officiel particulièrement objectif dans ses jugements : « Malgré les efforts incontestables faits par les Européens pour améliorer la culture en certaines zones de l'Afrique Noire, on ne peut nier qu'ils ont aussi des responsabilités en regard de la réduction des cultures vivrières en plusieurs régions. Parmi les causes de ce recul, on peut citer les migrations temporaires de main-d'oeuvre, pratiquées quelquefois sur une grande échelle, l'alcoolisme que les blancs ont contribué à répandre, l'abattage parfois excessif des arbres, le développement de cultures industrielles épuisantes : arachide, canne à sucre, coton. [...] Les Européens. ont prélevé dans certain cas une fraction importante des terres les plus riches et les plus accessibles et les ont utilisées, parfois, jusqu'au stade ultime de latérisation. Il est vrai que certaines de ces terres, en fait, étaient inutilisées ou presque, par les autochtones. En tout cas, ces pratiques ont parfois repoussé les populations, pour les cultures vivrières, sur des sols de moindre rapport à travail égal. L'économie de traite, même quand elle profitait financièrement aux indigènes, a eu souvent pour conséquence, lorsque des précautions n'étaient pas prises, de réduire le niveau alimentaire 2. » Ce n'est pas le moment de chercher si l'attaque de Mamadou Dia porte contre le régime capitaliste ou contre tout impérialisme quel que soit son régime économique; il suffit de signaler les faits fondamentaux pour s'expliquer qu'avec la prise de conscience provoquée par l'accès à la culture occidentale, la réaction des nationalismes, peut-être prématurée et peut-être finalement nocive sous l'aspect « développement », était devenue inévitable. L. J. Lebret : Suicide ou Survie de l'Occident? (pp. 143-148) Collection « Économie et Humanisme », Éditions Ouvrières. ...»
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Les
nations riches et les peuples pauvres
Les peuples continuent à penser cc nation >) au lieu de penser « monde >>; les
peuples riches continuent de croire que le monde entier est à leur discrétion
pour leur permettre d'accroître à rythme régulier leurs niveaux de vie déjà
si élevés;
les peuples pauvres n'ont pas conscienc� de la gravité de leurs
désordres internes, de leurs ambitions irréalisables, de leurs appels contra
dictoires.
Les politiques des uns et des autres restent courtes, extrêmement
courtes, du fait que ni les uns ni les autres ne perçoivent clairement les obli
gations qui devraient découler des complémentarités économiques et
culturelles et de la propagation universelle du savoir scientifique et technique
occidental.
Les
dirigeants sont noyés dans l' « immédiateté >> devenue pour
eux un absolu qui leur voile toute grande perspective.
Un fait majeur devrait attirer l'attention.
L'exemple de l'Occident
a provoqué la contagion du désir de savoir.
Il n'est aucun peuple, si peu
développé qu'il soit, qui ne cherche à multiplier ses écoles primaires, à
fonder des
écoles secondaires, à créer des écoles supérieures.
Par le savoir,
pour la première fois, l'humanité prend conscience de sa réalité totale,
et cela constitue une révolution aussi importante que celle des communi
cations et des transports.
On ne dis�Wg.
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- Les électeurs de troisième classe avaient alors tout loisir de constater que les riches, eux aussi, suaient et sentaient le bouc malgré leur après-rasage et leurs bonnes manières. Raphaël Korn-Adler, la Vie aux enchères, Québec Amérique