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LES LIENS SOCIAUX DANS LES CITÉS

Publié le 29/08/2022

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« LES LIENS SOCIAUX DANS LES CITÉS INTRODUCTION: Enfants d’ouvriers et d’immigrés pour la plupart, les jeunes dits « de cité » sont les déshérités du monde ouvrier et de son système social.

Depuis plus de deux générations, ces jeunes ont développé des modes de vie qui leur sont, en partie, spécifiques : entre « culture de rue »,et, pour contrecarrer le chômage et la précarité, entrée dans une petite délinquance de masse.

Bien que les trajectoires sociales soient diverses chez les « jeunes de cité », ces derniers sont confrontés à des difficultés économiques et sociales auxquelles s’ajoutent les effets des discriminations et de la ségrégation urbaine qui en font irrémédiablement des « boucs émissaires ».

En réponse à ces nombreux obstacles émerge chez ces jeunes un sentiment d’injustice unanimement partagé. Nous verrons comment fonctionne la sociabilité dans les cités? Pièges et obstacles de la notion de territoire La question du « territoire » est un thème classique de la sociologie urbaine, et, de ce point de vue, on peut souligner les pièges que cette notion tend à toute personne qui voudrait explorer les dimensions identitaires des conduites sociales en fonction des cadres spatiaux.

Le premier obstacle est que l’on considère généralement l’existence d’un « effet quartier » sous une dimension purement négative : on peut montrer qu’il existe un mécanisme de renforcement des inégalités sociales du seul fait de la concentration spatiale des difficultés. Enfermés dans leur quartier, les jeunes développeraient des comportements auto-ségrégatifs, notamment vis-à-vis de l’emploi.

On peut alors évoquer la « culture de ségrégation » ou la « culture de ghetto », à condition qu’elle soit définie non comme une culture de l’isolement, mais comme le produit de l’isolement social.

Cette vision est cependant très réductrice, car elle ne concerne pratiquement qu’une minorité d’individus sur laquelle se fixe toute l’attention médiatique.

Elle favorise la production d’une image dominée par la violence et la délinquance et présente l’inconvénient de ne concerner que la minorité la plus exclue des jeunes des cités sans tenir compte de l’hétérogénéité des situations et des parcours ni de la mobilité des individus dans l’espace urbain.

Elle ne rend pas compte de l’existence d’un rapport positif au quartier, qui ne se réduit pas seulement à être un facteur d’exclusion. PENSEZ VOUS QUE LA BANLIEUE SOIT UN TERRITOIRE PLUS VIOLENT QUE LE RESTE DU PAYS ?Document qui montre le taux de personnes qui considèrent la banlieue comme un lieu dangereux (82%) est beaucoup plus élevé que le taux de personnes pensant le contraire (18%). Une logique d’identification et d’attachement Le quartier a beau être un lieu de stigmatisation et de ségrégation, il donne lieu aussi à un très vif sentiment d’attachement.

La cité est unanimement vécue, pour les filles et les garçons, comme lieu de leurs racines et d’une histoire qui témoigne d’une communauté d’expérience.

Cet attachement dénote bien le mode de socialisation spécifique des adolescents des cités.

Il est endémique et fait totalement partie de leur existence quotidienne.

D’une part, la charge affective du territoire de l’enfance et la dimension familière d’un espace connu depuis toujours expliquent en grande partie cette vision largement positive que ces adolescents ont de leur cité.

D’autre part, celle-ci est définie comme un lieu unique où se déploie une sociabilité intensive, dominée par la convivialité et le sentiment de solidarité.

Cette sociabilité paraît si dense et si attractive qu’elle offre un contrepoint à la désorganisation et à l’exclusion. Cet attachement explique que les adolescents s’affirment comme les principaux acteurs de la vie collective de leur quartier.

Ils sont partout, investissent les équipements de leur ville, s’auto-organisent par l’échange de services ou d’opportunités diverses, et construisent ainsi tout un réseau autonome de ressources.

Ils cherchent des locaux, bousculent les élus pour l’amélioration des structures extérieures, avec une liste de revendications.

Les jeunes se sentent les véritables interlocuteurs critiques des institutions locales, surtout les jeunes Français d’origine immigrée, qui parlent aussi au nom de leurs parents.

D’une certaine façon, les jeunes sont les quartiers et accaparent de fait l’image de la banlieue.

Aussi les adolescents transforment-ils l’espace public de leur cité en véritable espace privé.

Ils y sont en « terrain conquis », colonisent les lieux et en font clairement un monde en soi qu’ils conservent à part comme un bien précieux.

En cela, la cité fixe le cadre et les repères essentiels de la vie quotidienne et constitue le pôle d’attraction majeur de l’existence. Le territoire, c’est aussi un enjeu des rapports entre les sexes.

En effet, l’espace public des cités fonctionne, au moins partiellement, en séparant les groupes par âges et par rôles sexués.

Ainsi, dans les quartiers, les garçons, les filles, les hommes et les femmes n’occupent pas les mêmes espaces.

Par exemple, une monographie réalisée dans un quartier d’habitat social de Toulouse montre comment les relations entre les filles et les garçons, le plus souvent d’origine maghrébine, s’expliquent moins par un héritage culturel et religieux que par une logique de quartier avec son organisation sociale spécifique « extrêmement codifiée et structurée ».

Se met en place, dans cet espace, un fort contrôle social distribuant des rôles masculins et des rôles féminins. Les garçons perdent leurs privilèges attachés à leur condition d’homme et à leur statut social (absence d’emploi).

Ils sont de moins en moins de « bons maris ».

Les filles peinent à les envisager comme époux.

Au chômage, ils manquent de prestige. Les filles n’ont pas grand « intérêt » à épouser des hommes dépourvus d’emploi stable.

Les garçons, dès lors, se raidissent et s’arcboutent sur leur identité virile pour compenser un manque d’intégration sociale.

Ils sont tenus à une obligation de virilité sous peine d’être mis à l’écart du groupe de leurs pairs.

Ainsi, les jeunes garçons manifestent leur volonté de se construire eux-mêmes comme la source de l’autorité au sein de leur territoire : là où ils peuvent encore exercer un peu de leur pouvoir.

Ils instaurent un mode de contrôle interne à la zone habitée et s’affirment, notamment, par le contrôle des filles, qui sont le plus souvent invisibles et fortement incitées à rester à la maison.

Les jeunes filles deviennent comme une sorte d’enjeu de l’honneur des garçons : à travers elles, se joue surtout un rapport de force entre les hommes eux-mêmes, ces derniers ne pouvant pas accéder au rang de la virilité, vis-à-vis du regard des autres hommes, s’ils perdent le contrôle de leur sœur.

Les jeunes hommes comparent leur pouvoir respectif à travers le contrôle des femmes. Cette attitude n’est pas le simple reflet d’une coutume culturelle traditionnelle, mais doit se comprendre comme une stratégie d’adaptation des garçons pour résister à leur situation de ségrégation. Le business dans les cités : un lien social de compensation Dans les quartiers populaires d’aujourd’hui, marqués par des caractéristiques socio-économiques précaires, le cumul des difficultés – ségrégation, chômage, précarité, sentiment d’exclusion – structure et façonne les manières de.... »

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