Les Désarrois de l'élève Törless Robert Musil
Publié le 09/12/2021
Extrait du document
« Une petite gare sur la ligne de Russie. » Madame la conseillère Törless souffrait une fois de plus à l'idée de laisser son fils dans cette petite ville loin de la capitale, dans les campagnes arides, presque inhabitées. La ville abritait une des écoles les plus réputées du pays où étaient formés les fils des meilleures familles. A l'heure du départ, dans un ultime accès de sollicitude maternelle, elle confia son fils au jeune baron Beineberg. Sur le chemin du retour vers l'école, les deux jeunes gens s'arrêtèrent dans une pâtisserie. Installé confortablement, Törless écoutait, à demi-attentif, Beineberg ressasser son sujet favori. Il parlait des Indes, dont son père avait rapporté d'étranges connaissances qu'il transmit à son fils dès qu'il fut en âge de comprendre... Celui-ci fut dès lors persuadé que d'extraordinaires énergies psychiques lui permettraient un jour une quelconque suprématie. Il ne remarqua pas que ses propos n'intéressaient plus Törless. Captivé par ses propres pensées, le jeune garçon se laissait envahir par un sentiment de vide. Une tension, l'attente d'un secret décisif l'avaient un instant frôlé avant de le replonger dans l'isolement. Cette prédilection pour les états d'âme s'épanouit plus tard en un étonnement devant les êtres et les choses, comme si la vraie vie se cachait derrière les apparences du monde quotidien.
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Les Désarrois de l'élève Törless Robert Musil
(1880-1942)
Roman, Autriche, 1906
Résumé
« Une petite gare sur la ligne de Russie.
» Madame la conseillère Törless souffrait une fois de plus à l'idée de laisserson fils dans cette petite ville loin de la capitale, dans les campagnes arides, presque inhabitées.La ville abritait une des écoles les plus réputées du pays où étaient formés les fils des meilleures familles.
A l'heuredu départ, dans un ultime accès de sollicitude maternelle, elle confia son fils au jeune baron Beineberg.
Sur lechemin du retour vers l'école, les deux jeunes gens s'arrêtèrent dans une pâtisserie.
Installé confortablement,Törless écoutait, à demi-attentif, Beineberg ressasser son sujet favori.
Il parlait des Indes, dont son père avaitrapporté d'étranges connaissances qu'il transmit à son fils dès qu'il fut en âge de comprendre...
Celui-ci fut dès lorspersuadé que d'extraordinaires énergies psychiques lui permettraient un jour une quelconque suprématie.
Il neremarqua pas que ses propos n'intéressaient plus Törless.
Captivé par ses propres pensées, le jeune garçon selaissait envahir par un sentiment de vide.
Une tension, l'attente d'un secret décisif l'avaient un instant frôlé avantde le replonger dans l'isolement.
Cette prédilection pour les états d'âme s'épanouit plus tard en un étonnementdevant les êtres et les choses, comme si la vraie vie se cachait derrière les apparences du monde quotidien.Ils quittèrent la pâtisserie et se rendirent chez Bozena qui, de temps en temps, recevait.
Mais là encore, Törless neparvenait pas à s'intéresser aux mêmes choses que son camarade.
Ce qui le fascinait, c'était qu'en face de cettefemme veule, il ne parvenait pas à ne pas penser à sa mère.
Cette association le terrifiait mais sans qu'il pût s'endétacher.
A peine rentrés au collège, Reiting, l'inséparable complice de Beineberg, leur annonça qu'il venait de découvrir levoleur qui, depuis quelque temps, visitait leurs casiers personnels.
Tous trois gagnèrent rapidement les combles où,lors de leurs fréquentes expéditions nocturnes, ils s'étaient aménagé une cachette.
Tôrless n'aimait pas cette pièce,il ne comprenait pas les conspirations romantiques des deux autres qui, dans ces instants où ils prétendaient menerune vie dangereuse, lui semblaient parfaitement ridicules.
Il jouait le jeu, pour ne pas rester en arrière.Si Beineberg méditait sans cesse sur la philosophie indoue, Reiting, lui, ne mettait rien au-dessus du plaisir dedresser les élèves les uns contre les autres, de tirer les ficelles d'incroyables intrigues qu'il mettait en scène pours'exercer, prétendait-il.
Des trois, Törless était l'esprit le plus mobile.
Il bénéficiait de leur protection en échange dudon qu'il avait de prévoir les réactions des élèves dans telle ou telle situation.
Reiting leur dévoila que Basini étaitleur voleur et qu'ils devaient à présent décider de son sort.
En échange de son silence, Reiting avait obtenu deBasini qu'il se prêtât à tous leurs caprices, en un mot, qu'il fût leur esclave.
Cet état de chose bouleversa Törlessqui voyait avec fascination le même homme n'être plus le même.
La honte, le reflet des apparences quitourmentaient Törless, Basini, lui, les avait vécus.Une nuit, Beineberg vint tirer Törless de son lit.
Les nouvelles étaient graves, Reiting les trompait, il profitait del'ascendant qu'il avait sur Basini pour lui imposer des relations peu avouables.
Beineberg proposa d'attendre et devoir les choses évoluer.
Il voulait garder Basini comme sujet d'expérience afin de pouvoir, par la souffrance,déterminer la route de l'ascétisme.
Törless considérait la chose comme puérile mais trouvait important de ne paslaisser échapper Basini.
Quelques jours plus tard, ils convoquèrent leur « chose » au grenier et après l'avoir corrigé,exigèrent de lui qu'il affirme être un voleur.
Törless était fasciné : comment un être humain pouvait-il être descendusi bas sans se révolter?Pendant la leçon de mathématiques qui suivit, Törless fut troublé par les nombres imaginaires qu'il comparait à unpont dont on aurait construit l'arche de départ et d'arrivée en omettant son centre mais que, pourtant, on pouvaittraverser sans dommage.
Peut-être était-ce là l'accès aux choses cachées qu'il pressentait autour de lui mais neparvenait pas à définir? Tout à son nouvel espoir, il se confia à son professeur qui ne put rien lui répondre si ce n'estqu'il comprendrait plus tard — dit-il en passant la main sur un ouvrage de Kant.
Un nouvel espoir envahit alors lejeune Törless vite déçu par la lecture du livre entrevu.
Malgré toute sa volonté, il n'y comprit rien.
Un seul fait letourmentait : son professeur, qu'il jugeait minable, gardait ce livre sur son guéridon comme si cette lecture étaitpour lui un divertissement.
Il s'en ouvrit à Beineberg qui l'assomma sous les lieux communs et la philosophieindouiste.
Excédé, il lui fit face et, pour la première fois, trouva le courage de s'opposer à son ami.
« C'est le naturelau contraire que je cherche, quelque chose en moi...
» La nuit même, il fit un rêve étrange et entrevit le sens deses inquiétudes : pour la première fois, il comprit qu'il avait de la sensualité, que l'attention qu'il portait aux détailstels un rectangle de lumière ou un grain de poussière, était quelque chose de bien plus important que tout le reste.Le lendemain, Tôrless entreprit la rédaction d'un « De Natura hominum ».
Mais il avait beau s'appliquer, les idées quilui paraissaient évidentes s'effilochaient jusqu'à n'être plus que phrases creuses.Vinrent quatre jours de vacances.
Reiting et Beineberg laissèrent Törless seul avec Basini qu'il était censé surveiller.En réalité, Basini le fascinait plus qu'il n'osait le prétendre.
La nuit même, il l'emmena à la chambre secrète dugrenier.
A peine arrivé, Basini, comme s'il obéissait à un rituel, se déshabilla.
Tôrless, stupéfait, lui fit raconter ceque les autres lui faisaient subir mais il ne put rien obtenir qu'une explication qui relevait plus de la nécessité banaleque de la découverte philosophique.
Déçu, il se retrouva dans son lit.
Basini l'y rejoignit et malgré sa fermerésolution, il succomba à cette nouvelle vague de sensualité qui s'insinuait en lui.Les premiers élèves revinrent le mardi soir.
Beineberg et Reiting décidèrent de punir définitivement Basini etentreprirent sur lui une expérience d'hypnose qui se solda par un échec mais Törless ne s'y intéressait plus; l'énigmeétait résolue : « Les choses arrivent, voilà l'unique sagesse.
» Découvrant que ses amis étaient animés moins par la.
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