Léo Strauss Le besoin du droit naturel
Publié le 12/03/2022
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Mais de quel droit s’agit-il ? S’agit-il du droit positif ou du droit naturel ? Faut-il considérer qu’il n’y pas d’autre source du juste et de l’injuste que ce que décrètent les lois en vigueur, celles du droit que l’on appelle positif parce qu’il est posé par les législateurs de telle société ? Léo Strauss s’oppose à cette idée. Il défend, au contraire, l’idée de droit naturel et soutient la thèse selon laquelle le droit naturel correspond à un besoin des hommes : il se situe au-dessus du droit positif et des idéaux culturels, qu’il permet d’évaluer à l’aide de la raison. Le texte contient trois moments. Un premier temps, lignes 1 à 9, dans lequel Léo Strauss affirme le « besoin » du droit naturel. Cette idée de besoin est le fil conducteur de l’ensemble de son analyse. L’homme a besoin du droit naturel car il est possible et nécessaire d’évaluer la justice du droit positif à l’aide d’un « étalon », un critère. Dans un deuxième temps, lignes 9 à 20, Léo Strauss critique la réduction du critère ou étalon de la justice à l’idéal culturel d'une société historique donnée à cause de la relativité que cela supposerait. Le dernier moment, lignes 20 à 26, précise le sens de cet étalon supérieur au droit positif et le sens du besoin auquel il répond. Ce droit supérieur ne peut être établi que par une faculté universelle, la faculté du jugement, en laquelle réside la liberté de l’homme.
«
Léo STRAUSS, Droit naturel et histoire , 1953.
« Le besoin du droit naturel est aussi manifeste aujourd’hui qu’il l’a été
durant des siècles et même des millénaires.
Rejeter le droit naturel revient à
dire que tout droit est positif, autrement dit que le droit est déterminé
exclusivement par les législateurs et les tribunaux des différents pays.
Or il est
évident qu’il est parfaitement sensé et parfois même nécessaire de parler de
lois ou de décisions injustes.
En passant de tels jugements, nous impliquons
qu’il y a un étalon du juste et de l’injuste qui est indépendant du droit positif et
lui est supérieur : un étalon grâce auquel nous sommes capables de juger le
droit positif.
Bien des gens aujourd’hui considèrent que l’étalon en question n’est
tout au plus que l’idéal adopté par notre société ou notre « civilisation » tel qu’il
a pris corps dans ses façons de vivre ou ses institutions.
Mais, d’après cette
même opinion, toutes les sociétés ont leur idéal, les sociétés cannibales pas
moins que les sociétés policées.
Si les principes tirent une justification suffisante
du fait qu’ils sont reçus dans une société, les principes du cannibale sont aussi
défendables et aussi sains que ceux de l’homme policé.
De ce point de vue, les
premiers ne peuvent être rejetés comme mauvais purement et simplement.
Et
puisque tout le monde est d’accord pour reconnaître que l’idéal de notre société
est changeant, seule une triste et morne habitude nous empêcherait d’accepter
en toute tranquillité une évolution vers l’état cannibale.
S’il n’y a pas d’étalon
plus élevé que l’idéal de notre société, nous sommes parfaitement incapables de
prendre devant lui le recul nécessaire au jugement critique.
Mais le simple fait
que nous puissions nous demander ce que vaut l’idéal de notre société montre
qu’il y a dans l’homme quelque chose qui n’est point totalement asservi à sa
société et par conséquent que nous sommes capables, et par là obligés, de
rechercher un étalon qui nous permette de juger de l’idéal de notre société
comme de toute autre.
»
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Dans ce texte extrait de Droit naturel et histoire (1953), le philosophe américain Léo
Strauss examine la question du droit et de la justice.
La justice est la conformité au droit.
1.
»
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