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Lecture linéaire n°1 - La Bruyère, Les Caractères, Livre V, « De la Société et de la Conversation », « Acis », remarque 7.

Publié le 18/06/2024

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« Lecture linéaire n°1 - La Bruyère, Les Caractères, Livre V, « De la Société et de la Conversation », « Acis », remarque 7. Introduction : la démarche est identique pour toutes les lectures linéaires. -Contextualisation et présentation des Caractères: La Bruyère est un moraliste classique.

Il n'a écrit qu'un seul livre qu'il publie pour la première fois en 1688 alors qu'il a 43 ans.

Son ouvrage compte 420 remarques dans cette première édition.

Mais l'auteur ne cesse de l'augmenter pour atteindre les 1120 remarques qui constituent l'œuvre complète, éditée pour la neuvième fois de façon posthume en 1694. Ces remarques de forme et de longueur variables sont classées en 16 livres abordant chacun un aspect précis de la vie en société.

Elles comportent des analyses satiriques des caractères humains, sous forme d'observations générales, de maximes, de paradoxes mais aussi de nombreux portraits. Présentation du passage: Le livre V des Caractères est consacré principalement à l'art de la conversation, essentiel à la vie de cour, puisqu'un courtisan doit être agréable et divertissant dans ses propos sans ennuyer par de grands discours sérieux et pédants.

Sous le règne de Louis XIV, l'idéal de clarté et de simplicité s'impose.

Mais certains courtisans continuent par prétention à pousser les raffinements du langage de façon extravagante, au point de devenir incompréhensibles.

Ce sont les précieux (dont Molière se moque dans sa comédie Les Précieuses ridicules).

Dans ce portrait d'Acis, La Bruyère fait lui aussi la satire de cet excès, faisant de ce personnage le type même du précieux ridicule. Lecture expressive Problématique : comment le moraliste procède-t-il pour rendre son portrait satirique ? Annonce des mouvements du texte : 1.40 à 48 « parler comme tout le monde »: un dialogue pris sur le vif 1.

48 à 54: la satire générale des précieux 1.54 à la fin : le conseil du moraliste et la pointe ironique finale. I-Un dialogue pris sur le vif.

1.40 à 48 « parler comme tout le monde » Le portrait commence in medias res, au milieu d'une conversation fictive entre le moraliste et son interlocuteur.

Dimension vivante et presque théâtrale de ce début de portrait.

C'est le moraliste qui parle le premier et on ne sait pas encore à qui : il est fréquent que La Bruyère prenne la parole à la première personne dans son livre.

Opposition vous/je.

Nous sommes au milieu d'une conversation, ce qui correspond bien au titre général du livre V. Le moraliste illustre son sujet de façon concrète: mise en abyme. Il commence par des questions directes marquant son incompréhension, face aux propos précédents de son interlocuteur, non mentionnés.

Ce petit mystère suscite la curiosité du lecteur, crée un effet d'attente. On observe une gradation « je n'y suis pas », « j'y suis encore moins », « je devine enfin » : ceci suppose un propos difficile à comprendre, obscur et peut-être abstrait, qui nécessite une certaine finesse d'esprit ou une intelligence profonde. 1.42« vous voulez Acis, me dire qu'il fait froid »: le moraliste introduit ses informations : le nom de l'interlocuteur et le sujet de sa remarque, celui du langage (répétition du verbe dire).

Il ne fait pas parler Acis directement mais traduit en termes simples son propos précédent.

Ceci crée undécalage comique par la banalité/trivialité du propos, avec ce qui précède qui semblait très compliqué. Le moraliste répète ce procédé trois fois de suite : comique de répétition.

« vous voulez me dire »; « vous voulez m'apprendre »; « vous me trouvez ». Il donne une leçon de langage à Acis, lui apprend à parler, mais pour dire des choses très banales avec un langage très simple.

Emploi du « que » adverbe interrogatif au sens de pourquoi : « que ne disiez-vous » et des impératifs « dites ».

Comme s'il lui réapprenait à parler normalement. Satire comique du langage précieux par antithèse avec la complication des phrases d'Acis que le lecteur doit imaginer.

Il répète pour cela ces formules très simplistes « il pleut, il neige » ; « je vous trouve bon visage » 1.43-44 Pendant ces 6 premières lignes, le moraliste n'a pas fait entendre la parole du précieux, mais il l'a fait deviner, ce qui est une façon très habile de s'en moquer par l'absence.

En revanche, on comprend bien qu'il met en avant la simplicité et la clarté du langage, qui sont deux vertus caractéristiques du classicisme. 1.45 : la parole est donnée à Acis sous la forme d'une objection rapportée par le moraliste, introduite par la conj.

de coord.

« mais » et l'incise « répondez-vous ».

Le précieux se défend et justifie son langage obscur par deux raisons : 1ère raison « cela est bien uni et bien clair ».

Les deux adjectifs sont péjoratifs selon lui, car ce langage simple et compréhensible manque de raffinement, de recherche et lui paraît donc plat, commun, ordinaire. La deuxième raison est mentionnée par une question rhétorique 1.46 : « qui ne pourrait pas en dire autant » : La Bruyère énonce ici la volonté des précieux de se distinguer des hommes qu'ils jugent inférieurs par leur langage recherché et presque codé.

Mais il en fait la satire, en rendant le précieux prétentieux et surtout excessif au point de ne plus être compris du tout.

C'est une mode du passé. On peut remarque que le précieux n'a presque plus la parole et que c'est le moraliste classique qui la lui prend et la monopolise pour lui donner un exemple de ce style classique qu'il faut adopter désormais. -1.47 : la conversation fictive se termine sur la dernièrela dernière réplique du moraliste, qui a le dernier mot et termine par une autre question rhétorique marquant son opinion, qui paraît évidente : « est-ce un si grand mal...comme tout le monde? » Eloge de la fonction première du langage, qui est de communiquer clairement ses pensées pour être compris. Chiasme « être entendu quand on.... »

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