Lecture analytique Camus La Peste - L'agonie de l'enfant de « La lumièere s'enflait » à « de larmes sur son visage »
Publié le 02/12/2021
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Question: étudier la manière dont le récit bouleverse le lecteur.
INTRODUCTION
(situation large) Résistant, rédacteur en chef du journal Combat , exilé à Paris loin de l'Algérie, Camus se consacre pendant la guerre à l'écriture de son roman qui sera publié en 1947 . Ce récit symbolique et mythique raconte une épidémie imaginaire à Oran . Ce fléau représente le nazisme , la guerre, mais de façon plus générale toute forme de mal contre laquelle les hommes doivent lutter.
(situation du passage par rapport à ce qui précède) Le docteur Rieux ,son ami Tarrou, le journaliste Rambert , l'employé Grand , le vieux médecin Castel , et le père Paneloux , luttent tous à leur manière contre la maladie qui fait rage et se retrouvent autour du fils Othon , cas jugé désespéré. Il s'agit de sauver l'enfant en lui administrant un sérum.
LECTURE
( identification idée générale et lien avec la question de l'examinateur, annonce des pistes d'étude)Dans cette scène les personnages principaux assistent à la lutte tragique de l'enfant contre la peste , à sa longue agonie insoutenable. De quelle manière, le récit bouleverse-t-il le lecteur ?Nous étudierons la progression dramatique du récit , puis la dimension imagée , symbolique de la description.
A) La progression dramatique
Gradation en quatre étapes qui souligne la lutte de l'enfant ( agonie du grec agôn : lutte) : le combat , la rapide rémission , le cri , la mort
Attente de cette mort inéluctable: impuissance tragique des hommes cf « Tous attendaient «
Tension croissante , insoutenable rendue par l'alternance des cris et des silences:de la « discrétion « des malades , les « petites exclamations « d'un des malades à leur agitation croissante ( « les malades s'agitèrent «). Son paroxysme à travers le « vrai cri « du malade accompagné de gémissements «( « gémissaient de plus en plus fort «) Cri infernal de tous les hommes , de la souffrance humaine qui s 'abat en une « marée de sanglots « , puis silence mortuaire de l'enfant et des malades ( « bouche ouverte, mais muette «)
Puissance d'évocation romanesque: lutte de l'enfant magnifiée, héroïque (dimension épique) :adjectif « Seul « antéposé+ réseau lexical du combat: « se débattait de toutes ses forces « ( hyperbole) , « agitation « , « labouraient «,puis retour aux détails réalistes implacables du corps chétif ,recroquevillé sur lui-même: « l'enfant plia ses genoux,ramena ses cuisses près du ventre et s'immobilisa « , « rapetissé tout d'un coup «: impuissance , pitié et terreur chez le spectateur //tragédie ( théâtre)
lutte du médecin Rieux: sa souffrance à l'unisson de celle de l'enfant , fraternité; paradoxe: récit atroce mais en même temps hymne à la fraternité « où il était, sentait , en fermant les yeux, cette agitation se mêler au tumulte de son propre sang «, « les pulsations de leurs deux coeurs «
Mais terrible impuissance: registre tragique cf réseau lexical:« impuissant «, « tentait de la soutenir « , métaphore « et son effort sombrait dans le vide «. Réactions physiques d'impuissance, significatives de l'échec et dérisoires:« Il lâchait le poignet et retournait à sa place «, « serrait les dents « « ivre de fatigue et de dégoût «.
pas de notations sur les états d'âme , pas de discours explicatif du narrateur mais l'observation des gestes de chaque personnage , le jeu des regards et des silences qui suffisent à traduire le désespoir ; Epure qui permet d'éviter le pathos : le lecteur plonge dans la solitude des hommes face à l'absurde; « Rieux serrait les dents...Tarroux se détourna...Paneloux regarda « Chacun réagit en fonction de son tempérament , ses convictions Paneloux se met à prier , Grand quitte la salle
récit par le filtre du regard des personnages: proximité du lecteur avec ces hommes engagés à leur manière dans leur lutte contre le fléau. Point de vue interne : la souffrance de l'enfant perçue par Rieux médecin impuissant (« sentait en fermant les yeux, cette agitation «); la bouche de l'enfant pourtant innocent « souillée par la maladie «, observée par le regard du prêtre Paneloux : ce qui entraine celui-ci aussitôt à prier ( la conjonction « et « marque le caractère instantané de la réaction ce qui traduit implicitement l'interrogation du religieux qui ,dans un premier prêche adressé aux fidèles, considérait la peste comme une punition divine que les hommes avaient à payer pour leurs péchés et face à {text:soft-page-break} l'innocence,n' a plus que le recours d'implorer la grâce de Dieu).
Simple constat terrible de Rambert qui ne peut endurer ce calvaire « il faut que je m'en aille « + discours indirect de Grand « en disant qu'il reviendrait «. Peu de paroles donc mais la confrontation bien réelle avec la mort atroce.
terme générique qui désigne l'enfant, peu de détails , pas un enfant en particulier « l'enfant « = figure archétypale de l'innocence, « bouche enfantine « . Métonymie « la bouche s'ouvrit « identité de l'enfant , individu disparaît pour laisser place à un « seul cri continu « jailli des profondeurs ,infernal qui perd de son humanité , « voix si peu humaine «. Série de propositions subordonnées relatives qui donnent de l'ampleur à la phrase « que la respiration...et qui emplit... «
Humanité détruite : comparaison « mains «//« griffes «, oxymore « labouraient doucement « visage = « figé dans une argile grise « (argile connotation religieuse : la glaise qui servit à pétrir Adam? , terre des cimetières?) violence= réaction instinctive , connotation infernale: le mal qui s'empare du corps.
enfant innocent sacrifié: enfant « supplicié «= image du Christ mais dans passage qui précède = « pose de crucifié grotesque « = expression péjorative ( sens religieux du Christ qui se sacrifie pour sauver les hommes mais ici ce récit biblique pas de sens car pas de transcendance , pas d'espérance d'une vie après la mort. Que la souffrance et incompréhension face à la mort= absurde)
corps de l'enfant devient un corps de souffrance qui n'est plus que douleur , qui n'a plus d'âge,figure de l'enfant = ce cri de tous « les hommes à la fois «, ce « cri de tous les âges «, « plainte anonyme « , « marée de sanglots «=figure universelle de la souffrance de tous les hommes face à la mort cfPériode ( rythme ample de la phrase): « Au creux de son visage...de tous les hommes à la fois « .
décor symbolique :lieu clos ,la lumière « s'enflait « ( métaphore qui évoque la peste) « couvertures en désordre «cf lit « dévasté « terme de guerre employé dans passage précédent , dimension cosmique du fléau métaphores filées de la tempête et de la chaleur qui assaillent ceux qui luttent contre la peste pendant tout l'épisode de l'agonie. Ici « chaleur commençait à crépiter «, « une marée de sanglots déferla «, rReux « accroché à sa barre de lit « comme à celle d'un bateau.
CONCLUSION ( réponse à la question en soulignant l'originalité du texte , puis élargissement)
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