Le théâtre en Iran
Publié le 30/10/2022
Extrait du document
«
(le théâtre en).
L'Iran, pays d'an
cienne culture religieuse et profane, est la
seule nation musulmane à posséder à la fois
un théâtre rituel naguère encore très vivace
et un théâtre populaire (ombres et marion
nettes, comédie improvisée) qui, jusqu'à la
fin du XIXe siècle, ne doit rien à l'Occident.
C'est Molière* [voir MOLIÈRE EN ÜRIENT], très
adapté, qui initie l'Iran à un théâtre réaliste
l,
et social, volontiers � satirique.
De 1941 à
1978 Rezâ châh Pahlévi ouvre largement le
théâtre à l'influence et 'aux échanges inter
nationaux.
La République islamique a replié
le pays sur lui-même.
THÉÂTRE RITUEL
A
et les
narrateurs, les moindres épisodes de "son
martyre > forment l'essence de
-�
.;
la piété populaire chiite.
.
î
[
Les étapes du rituel
�
t
.j
•1
> - des séances de montreurs d'images
(pardeh-dâri/ shamayel-gardâni) ; le conteur
chante en dévoilant les scènes.
-Sens et portéè du ta'zieh
La plupart de ces éléments sont repris
dans les commémorations officielles organi
sées avec faste, surtout à .,Téhéran, .au
Tekieh Dowlat ( qui
complètent l'action dramatique par leurs
pleurs, lamentations, frappements de poi
trine, naguère par des mortifications san
glantes.
Fondés sur les traditions, les récits
de dévotion (pèlerinages, ziyârat ; élégies,
marthieh) et les textes épico-religieux (dits du
meurtre de Hosseyn, maqtal/maqâtel/ maqtal
nâmeh)
fournissent
une
abondante
littéra>
ture aux> de ta/zieh, pour la
plupart anonymes.
Abolissant les barrières
du temps et de l'espa�e, les thèmes se répar
tissent autour de !'Evénement.•• Commençant au pacte rédempteur, le cycle cosmique
culmine avec le drame de I(arbalâ et les thè
mes associés : souffrance d'Ahl-e beyt avec
participation des prophètes depuis Adam et
J
�
de toute la Création, tribulations des captifs,
miracles divers dont ceux accomplis par la
tête coupée de Hosseyn.
Il se conclut par
le thème de la vengeance terrestre et celle
repoussée au Jugement dernier,� châtiment
final _.des coupables, accès au paradis des
fidèles de Hosseyn.
Par le biais du >, n'importe
quel
.,
thème peut être rattaché à !'Evénement.
Il
n'existe pas de livret, chacun des rôles d'une
séance (majles = texte et représentation)
étant écrit sur une étroite feuille de papier
que les acteurs tiennent dans la paume de la
main.
L'index (fehrest) des rôles, comportant
rarement des indications scéniques, est
détenu par le régisseur (ostâd, maître;- •ta/
zieh-gardân; mo/in-ol bokâ, auxiliaire des
larmes), souvent coauteur ou adaptateur.
Rédigés en vers, les ta/zieh suivent le style
épico-lyrique persan classique, avec des
mètres appropriés aux répliques des
qui chantent sur des modes musicaux classi
ques,
les
>
déclamant
sur
un
ton
.
.
.,
1rnte.
-:
L'organisation spectaculaire du rite
Par la valorisation des pleurs, bienfaits,
aumônes, à la mémoire des martyrs de Kar
balâ, ces séances sont de véritables rites
communautaires fournissant un exutoire
aux tensions psychosociales; riches et pau
vres, hommes et femmes communient dans
une .- atmosphère �d'apparente liberté.
Les
gro1:1pes religieux citadins (quartiers, mé
tiers) et villageois rivalisent pour édifier,
recouvrir de tentes ou décorer les tekieh.
Leur ardeur rituelle entraîne parfois des
affrontements violents.
Les séances sont
données dans un espace circulaire polyva
lent.
Processions, cortèges, combats se
déroulent autour d'une plate-forrr1e centrale
(sakou) symbolisant le camp des assiégés;
les s'installent autour de cet
espace, les notables dans des loges, le peu
ple par terre ou sur des gradins, hommes et
femmes étant séparés mais se voyant.
Très
adaptable, le lieu �scénique s'est agrandi :
utilisation de scènes annexes (sakou >), de loges d'apparat (tâqnemâ), de traver
sées du public.
Les rites déambulatoires
précèdent la séance qu'ouvre le sermon du
rowzeh-khân.
Des boissons (eau, thé, café).et
-des mets appropriés au deuil (dont des len
tilles grillées, adjuvant desi pleurs), sont dis
tribués.
Décors et accessoires sont très
1
t
réduits : une bassine-d'eau pour l Euphrate1
une branche d'arbre pour une palmeraie ;
chevaux, armures: armes, étendards •s,ont
toutefois indispensables: Les 1 >., sont
vêtus de vert, couleur sacrée de l'islam, les
> de rouge, 'symbole de cruauté
mais aussi de sang innocent clamant ven
1
geance (couleur.
de 1 étendard de Hosseyn).
Les acteurs sont choisis en fonction de leur
voix ou de leur physique.
Les rôles féminins
(dont Zaynab, sœur de Hosseyn, aux.
cétè
bres imprécations) s·ont tenus par des hom
mes·� voilés rou ·· de jeunes garçons.
Des
séances de déploration et de ta'zieh exclusi'
1
vement féminines étaient aussi organisées.
La théâtralisation
du
ta'zieh
•
r
Pour beaucoup de fidèles chiites, le terme
de théâtre ne peut s'appliquer aux ta�zieh,
acteurs, spectateurs et communauté chiite
formant.
un .tout indissociable:"Mais malgré
leurs conventions et images stéréotypées,
ces drames ,.
comportent, de par leur jeu
mi-réaliste mi-symbolique, d'intéressantes
innovations scéniques et dramatiques.
Bien
que les méchants, par piété ou par crainte
justifiée de la colère des fidèles,· participent
aux1 lamentations, leur déclamation plus
naturelle que le chant, leurs gestes et mimi
=1
ques outrés rendent leur jeu très, spectacu
laire.
L'existence de thèmes ..
tragi-comique-s
(tels que les noces de Qâssem, neveu --de
Hosseyn, à I(arbalâ), ).
Voir aussi J.
Calmard: le Culte
de l'imam Hus.ayn, thèse, université de Paris III, Paris,
1975;
(Magophonia) ou le cortège grotesque de ) ou > (Dey beh Mehr)
ont lieu dans différentes régions.
Dès le
règne cl'Alexandre- (334-323 av.
., J.-C.) des
troupes grecques ·jouent -des auteurs de leur
pays devant des princes iraniens.
,.Ceux-ci
connaissent aussi des ménestrels-conteurs et
poètes (gôsân) aimés du peuple, qui chantent
!'·épopée et content des histoires satiriques.
L'usage de masques zoomorphiques- se per
pétue -et, aux XVI et XVII siècles, des mysti
ques islamiques (malâmatijr à la 'recherche
du blâme public et de mortification, se
déguisent en boucs et vont danser dans les
villes et les villages.
0
1
e
e
Ombres et• marionnettes
•,
Originaire de l'Asie de l'Est, le théâtre
cl'ombres arrive en Iran et le poète Omar
I Les
représentations ..
se font souvent sous une
tente, cl'où le·" terrr1e persan de Kheymeh
Shabbâzi (la tente du jeu ..
nocturne).
Les
marionnettes à gaine servent le jour, celles à
fils la nuit.
Au XVII siècle, un homme seul,
debout, la tête recouverte, fàit sortir de la
grande poche de son tablier, tel un kangou
rou, des poupées qu'il manie: Le principal
personnage du théâtre de marionnettes s'ap
pelle -le Héros chauve.
(Pahlavân katchaO,
sorte de matamore couard et trompé.
par �a
'
femme.
Les pièces moquent les mollahs,
trop attachés aux plaisirs terrestres.
Les con1
1·-
e
teurs (naqqâO, continuateurs des gosâns, ont,
sur les places publiques ou dans les maisons
de-�thé, une grande réputation et narrent
avec force gestes et à voix forte; des légen
des, histoires épiques ou romans picares
ques.
Ils sont encore populaires aujourd'hui.
La comédie traditionnelle
�
.
Les bouffons (dalqak ou maskhareh), chez
les princes et les châhs, sont sans doute à
l'origine des jeux mimés puis dialogués qui
prennent en de courtes saynètes dansées le
nom de taqlid (imitation), traitées par Jean
Chardin, le célèbre voyageur français (16641677), de -> et >.
L'interdiction par le clergé chiite de laisser
jouer les femmes impose de nouveau la
mode des travestis interprétés par de jeunes
gens.
Conrrne dans la commedia* dell'arte,
dont certains se demandent encore si elle est
née dans le Bassin méditerranéen ou si elle
�st venue ·ëi'Asfe, le taqlid est un théâtre oral
d'improvisation collective sur un canevas*
donné.
Les formes·.
de cette comédie sont :
le jeu du chauve {Katchalak bâzij, le jeu du
muet (Lâl bâzij, le jeu du masque (Ruband
bâzij sur..
des échasses et en robes longues,
et surtout le jeu del'épicier (Baqqâl bâzij, qui
devient le genre le plus célèbre.
Les_;comé
dies sont jouées aussi· dans des maisons
privées à l'occasion des mariages, des nais
sances ou des circoncisions.
Au milieu du
xvm siècle, pour gagner ·de la place, on
recouvre de planches et de tapis le bassin au
centre de la cour et ce théâtre en rond prend
le nom de ruhôzi (sur le bassin) ou Takht-e
Hozi (planches sur le bassin), terme généri
que pour ce style de comédie improvisée.
Le héros en est un domestique noir (siyâh)
qui se maquille avec de la suie et de· la
graisse, parle avec l'accent des anciens escla
ves venus! d'Afrique: emploie souvent des
mots crus pour lancer des critiques contre
les possédants, les ·~mollahs et les plaies
sociales.
Pour dire librement ces choses, -il
se fait passer· pour.>.
Il a un maître riche et âgé
qui a une femme et une fille, laquelle sou
pire après =son prétendant.
Les fourberies du
siyâh au franc-parler amusent beaucoup le
peuple et les ruhôzi du théâtre en rond pase
sent vers 1920 dans des salles où le public
se tient sur les trois côtés et où un rideau
de fond peint rapproche le tout du théâtre
élisabéthain.
Parallèlement, des troupes
féminines avec un répertoire spécial assez
osé jouent dans les gynécées.
Le châh Nâse
reddin (1848-1896) a deux boufffons célè
bres et s'intéresse à la comédie.
Le premier,
I(arim Shire'i (I(arim le Sucré), est le person
nage d'un Baqqâlbâzi en présence du châh
(vers 1872), écrit apocryphe, violent et fort
drôle, très utile pour connaître la manière
dont s'exécutait ce genre d'improvisation.
Le second, Esmâ'il Bazzâz (Esmâ'il le dra
pier), entre 1880,et 1892, sous l'influence de
Molière dont....
»
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