Le temps une notion philosophique
Publié le 29/05/2024
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«
LE TEMPS
Gustav KlimtLes trois âges de la
femme, 1905
Hans Baldung GrienLes Trois Âges
et la Mort, 1510.
INTRODUCTION
• Définir le temps n’est pas simple.
On peut à première vue :
➢ affirmer que le temps est le passage des choses, leur changement,
leur écoulement.
➢ remarquer que le mot « temps » est dérivé du latin tempus, qui
désigne d’abord une division du temps, une période ;
➢ainsi, on pourrait distinguer le temps et la durée, le premier étant la
mesure de la deuxième.
➢Cependant, cela ne fait que repousser la difficulté, car qu’est-ce que
la durée, si ce n’est d’abord un intervalle précis de temps ?
• Une première réponse à cette difficulté à définir le temps pourrait
consister à dire que le temps n’a pas besoin d’être défini car nous
sentons et expérimentons tous les jours ce qu’il est.
• Une autre réponse consisterait à rappeler que nous observons
quotidiennement toutes sortes de mouvements, de changements, et
que le temps est précisément la succession de ces mouvements.
• Ces deux points de vue dessinent deux orientations opposées pour
répondre à la question de la définition et donc de la nature du temps :
1.
pour l’une, le temps se présente d’abord comme une succession
d’états psychologiques (un principe, une forme ou un mouvement
subjectif ou psychologique) ;
2.
pour l’autre, le temps est une succession d’états de la nature, de
corps inertes ou vivants et à ce titre il est un mouvement objectif.
Nous pouvons donc poser le problème
suivant :
le temps appartient-il à la subjectivité
humaine ou bien à la sphère de la
nature ?
Goya, Saturne dévorant l’un de ses fils,
1819-1823
Le temps de la conscience
• Si nous pouvons d’abord définir le temps à partir du sentiment que nous en
avons, c’est qu’il est interne à notre esprit.
Le temps se mesure dans l’âme Saint Augustin,
Confessions, livre XI.
Mais si le temps est dans l’esprit, n’est-il à comprendre qu’en fonction de nos
états psychologiques comme le souvenir, l’attention ou l’attente ?
• Le temps n’aurait donc pas d’autre réalité que celle du présent, mais le
présent ne dure pas, alors que seuls passé et/ou futur peuvent nous sembler
+ ou – longs.
Ils ne peuvent cependant être mesurés, alors que l’on mesure le
présent quand il passe.
Ex.
La course
• C’est pourquoi Saint Augustin distingue au fond le temps du monde et le
temps de la conscience, en distinguant 3 parties : le présent du passé, le
présent du présent et le présent du futur.
Cette division suppose une
instance qui se représente le passé, le futur et le présent
• Ces 3 temps = 3 intentions qui nous donnent à comprendre que l’âme n’est
jamais indifférente à ces pôles et qu’elle vise l’absent dans tous les cas, sans
quoi le présent serait réduit à rien.
La réflexion augustinienne inspire à Pascal (cf.
Pensées, 72) sa propre méditation sur le temps…
Nous ne nous tenons jamais au moment présent.
Nous rappelons
le passé; nous anticipons l'avenir comme trop lent à venir, comme
pour hâter son cours, ou nous rappelons le passé pour l'arrêter
comme trop prompt, si imprudents que nous errons dans des temps
qui ne sont point nôtres, et ne pensons point au seul qui nous
appartient, et si vains que nous songeons à ceux qui ne sont rien, et
échappons sans réflexion le seul qui subsiste.
(…) Nous ne pensons
presque point au présent, et si nous y pensons, ce n'est que pour en
prendre la lumière pour disposer de l'avenir.
Le passé et le présent sont
nos moyens; le seul avenir est notre fin.
Ainsi nous ne vivons jamais,
mais nous espérons de vivre, et nous disposant toujours à être heureux
il est inévitable que nous ne le soyons jamais.»
«
Le temps est l’étoffe de notre vie psychologique
Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience, ch.
II.
• Paradoxalement, Kant se rapproche du sens commun en comprenant le temps
comme un milieu homogène composé d’états successifs distincts.
• Car selon Bergson, la durée pure, qui n’est accessible que par la conscience,
n’est pas une succession d’états de conscience juxtaposés, mais une
«pénétration mutuelle » d’éléments, autrement dit une succession sans
distinction.
• Toutefois, Bergson reconnaît que la succession n’appartient pas qu’à la
conscience, mais qu’elle s’observe aussi dans le monde matériel, dont les
objets ont pourtant des caractères inverses aux états psychologiques.
C’est
ainsi l’une des tâches de L’évolution créatrice que de rendre compte de ce
simple fait que « l’univers dure » (p.
11).
Le temps est une forme a priori de la sensibilitéKant, Critique de la
raison pure, esthétique transcendantale, Ak.
III, 59-61.
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Kant ne se contente pas d’affirmer que le temps se mesure dans l’esprit.
Il affirme que le temps est une forme de la sensibilité humaine qui détermine
formellement a priori la totalité des phénomènes.
Avec l’espace, le temps constitue l’une des deux « intuitions pures » qui contiennent
la forme sous laquelle quelque chose en général est intuitionné ; le temps est plus
précisément la forme du sens interne.
Mais, contrairement à l’espace, qui ne vaut que pour les intuitions externes, le temps
est une forme s’appliquant à toutes les intuitions, dans la mesure où, en tant que
déterminations de l’esprit et de « l’état interne », elles sont par conséquent régies par
des rapports temporels.
Cette validité universelle du temps comme forme de la sensibilité est cependant
restreinte aux phénomènes ; abstraction faite de notre esprit, le temps n’est
rien.Néanmoins, cette manière d’envisager le temps comme succession d’états n’estelle pas tributaire de l’espace et donc des choses matérielles ?
•
Le temps de la nature : vers l’objectivité
Si le temps n’est jamais complètement séparable de la nature, alors le
temps de la conscience n’en est qu’un cas particulier, en tant que
l’homme fait partie de la nature.
Le temps n’est pas séparable du mouvement Aristote, Physique, IV.
• Le Stagirite part du principe qu’il n’y a pas de mouvement sans temps
ni de temps sans mouvement.
Plus précisément, nous ne parlons de
temps que lorsque nous distinguons dans le mouvement l’antérieur et
le postérieur.
Au terme d’un raisonnement serré, il parvient à la
définition suivante : le temps est « le nombre d’un mouvement selon
l’antérieur et le postérieur » (219b).
• Aristote s’étonne de l’évanescence des parties du temps : comment le temps, qui est composé de
parties qui ne sont plus, et d’autres qui ne sont pas encore, peut-il participer à l’être ? Et s’il n’y a de
temps que dans le « maintenant », ce « maintenant » est-il identique ou différent?
• Les « maintenant » qui composent le temps doivent être différents.
Car si les instants sont les mêmes,
alors on ne peut plus distinguer d’avant et d’après.
« Et rien ne sera plus antérieur ni postérieur à rien
».
Mais, si le maintenant est différent, quand devient-il donc différent ? Ce ne peut pas être à l’instant
même où il est, puisque à ce moment-là il est ! Ça ne peut pas non plus être à un autre instant, car il
n’est plus.
• Après ces contradictions, concernant l’existence évanescente du temps, Aristote interroge la nature du
temps.
Cette deuxième approche compare le temps et le mouvement.
Car le mouvement est propre à
la chose mue, tandis que le temps est toujours le même partout.
Le temps n’est pas plus ou moins
rapide, car c’est la vitesse et la lenteur qui se définissent en fonction du temps.
Mais, le temps est
quelque chose du mouvement.
Car là où il n’y a pas de conscience de mouvement, Il n’y a pas de
temps.
Donc le temps est quelque chose du mouvement.
• Il possède la continuité et la succession du mouvement, mais il est aussi ce qui sert à mesurer le
mouvement en le délimitant par un avant et un après.
Autrement dit, il n’y a du temps que lorsque
l’âme détermine, mesure, nombre un antérieur ou un postérieur dans le mouvement.
Aristote définit
donc le temps comme « le nombre du mouvement selon l’antérieur – postérieur.
»
• Aristote précise enfin que c’est l’âme qui nombre le mouvement selon l’antérieur-postérieur, Ou encore
c’est elle qui va déterminer, au moyen du nombre, une antériorité- postériorité du mouvement.
• Nous conclurons donc qu’il n’y a de temps que parce qu’il y a du mouvement ainsi qu’une unité de
référence = cette unité de référence est le mouvement céleste et uniforme de la première sphère (la
terre).
La physique classique
L’un des points de rupture essentiels de la physique
classique réside dans la nouvelle conception de l’espace et
du temps qui est exprimée par Newton dans ses Principes
mathématiques de la philosophie naturelle.
• Newton distingue en effet le temps absolu, nommé
durée, du temps relatif.
Le temps relatif est une mesure
sensible, effectuée grâce à certains mouvements, d’une
partie déterminée du temps absolu.
Il est possible....
»
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