«Le Sillon»Un idéal suspecté.

« 1 / 2 «Le Sillon» Un idéal suspecté A la fin du XIX• siècle, le catholicisme français est en plein renouveau.

Stimu­ lés par la politique de ralliement à la Ré­ publique préconisée par Léon XIII et par l'enseignement social contenu dans l'encyclique Rerum novarum, des fidè­ les, de jeunes prêtres - les «abbés dé­ mocrates» - se passionnent pour les questions politiques et sociales et ces­ sent d'associer l'avenir 'de l'Eglise au parti monarchiste.

Dans cette nouvelle orientation, Le Sillon va jouer un rôle considérable.

Il s'agit d'une revue fon­ dée en 1894 par trois jeunes gens, Etien­ ne Isabelle, Paul Renaudin et, surtout, Marc Sangnier devenu, en raison de sa foi ardente et de son rayonnement, le guide de la petite équipe.

L'objectif du Sillon est de faire con­ naître aux masses populaires la véritable nature du message du Christ par l'inter­ médiaire d'instituts populaires, bases d'un rapprochement social.

Dès le dé­ part, le supcès du Sillon est grand.

Des étudiants, des normaliens, des polytech­ niciens, de jeunes ouvriers, se côtoient dans les cercles d'étude.

Les autorités ecclésiastiques admirent l'esprit d'apos­ tolat qui anime ces groupes et le pape Pie X encourage, en 1903, l'élite du mouvement, les «Jeunes Gardes».

Mais des inquiétudes ne tardent pas à se manifester.

De nombreux adhérents s'éloignent du Sillon, découragés par l'autoritarisme de Marc Sangnier et, surtout, inquiets de l'orientation du mouvement qui cesse d'être religieux pour devenir politique.

Pour Sangnier, 1894-1910 Le Sillon a pour but de réaliser en Fran­ ce la République démocratique, «seule capable d'inaugurer le règne de la par­ faite justice» et de servir les intérêts de l'Eglise.

Dans cette perspective, l'eucha­ ristie apparaît comme l'image de la fra­ ternité démocratique! Il y a plus inquié­ tant encore: Sangnier remet en cause la légitimité de la propriété, des hiérarchies sociales, des inégalités naturelles.

Se laissant entraîner par le souci de récon­ cilier l'Eglise avec la Révolution, il en arrive à assimiler les doctrines de Dan­ ton et de Robespierre à la «substance de l'Evangile»! Ces déviations et la confusion du poli­ tique et du religieux conduisent à la con­ damnation du Sillon par Rome, le 25 août 191 O.

En chrétien exemplaire, San­ gnier fait acte de soumission.

Il poursui­ vra cependant une action purement poli­ tique, dans le cadre du mouvement de la «Jeune République» dont l'audience res­ tera très limitée.

En dépit de la condam­ nation, le bilan du Sillon est loin d'être négatif.

Il a contribué à accélérer la prise de conscience de l'Eglise en face des problèmes politiques et sociaux du monde moderne.

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