Le romantisme (1820-1850)
Publié le 30/04/2024
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«
Le romantisme (1820-1850)
« Le romantisme n’est précisément ni dans le choix des sujets ni dans la vérité exacte, mais dans la
manière de sentir.
Ils l'ont cherché en dehors, et c'est en dedans qu'il était seulement possible de le trouver.
Pour moi, le romantisme est l’expression la plus récente, la plus actuelle du beau.
[...]
Qui dit romantisme, dit art moderne, - c’est-à-dire intimité, spiritualité, couleur, aspiration vers
l’infini, exprimées par tous les moyens que contiennent les arts ».
Curiosités esthétiques - Salon de 1846 - p.
84 à 87
- Charles Baudelaire
Le romantisme est un mouvement littéraire qui naît en Allemagne à la fin du XVIIIè siècle.
Il se
répand ensuite dans toute l'Europe jusqu'au milieu du XIXè siècle.
Il est au départ un courant
littéraire, qui s'exprime peu à peu dans le théâtre, la musique, la peinture, ou encore la sculpture et
ainsi devient également un mouvement artistique.
En réaction au classicisme, ses auteurs placent
l’expression du « moi » et la liberté du sentiment au-dessus de la raison, de la morale et des règles.
Le
romantisme français se constitue au début du XIXe siècle et se distingue ensuite par une doctrine forte
et assumée, qui le rend indissociable des événements historiques et politiques de la période.
Contexte historique et artistique du romantisme
Un phénomène européen
Dans la deuxième moitié du siècle des Lumières, trois œuvres majeures annoncent un changement
dans la littérature européenne : les Poèmes d’Ossian de James Macpherson (1760), La Nouvelle
Héloïse de Jean-Jacques Rousseau (1761) et Les Souffrances du jeune Werther de Johann Wolfgang
von Goethe (1774).
Cette période est même qualifiée de « révolution esthétique » par Anne-Marie
Thiesse (dans La Création des identités nationales).
Le Werther de Goethe est représentatif du mouvement Sturm and Drang (« tempête et passion ») qui
annonce le romantisme allemand.
Illustration des Souffrances du jeune Werther de Goethe
Celui-ci se développe ensuite dans les années 1790 avec d’autres œuvres de Goethe, des frères
Schlegel, de Herder et de Schiller et apparait en 1795 en Allemagne.
Du côté de l’Angleterre, c’est la
période du roman gothique – considéré comme précurseur du romantisme noir – où des châteaux
médiévaux sont le lieu d’histoires mythiques et surnaturelles, mais vécues par des personnages
contemporains.
Entre 1789 et 1799, l’héritage des Lumières, la Révolution française et ses conséquences politiques
expliquent la rupture et le souffle de liberté qui caractérisent le romantisme et favorisent la poursuite
de grands changements esthétiques en Europe.
En France néanmoins, le mouvement littéraire ne s’impose pas d’emblée en raison du consulat et de
l’Empire, qui à partir de 1800 laissent peu de place à la liberté des auteurs (Mme de Staël, qui tient
tête au consul Bonaparte, est contrainte à l’exil en 1803).
Nouvelle étape dans cette « dynamique romantique européenne » (Chantal Allier), le mouvement se
singularise en France sous la Restauration, à partir de 1815-1820.
Il s’agit d’un moment décisif car il
se dote alors d’une doctrine affirmée, qui accordera un prestige exceptionnel à la poésie.
Le premier mouvement conscient de lui-même mais dont la définition résiste
La période allant de 1330 à 1580 ne s’appelle « Renaissance » que depuis la deuxième moitié du xixe
siècle (par Michelet dans son Histoire de France).
La période allant de 1580 à 1660, que l’on nomme
« Baroque », n’est ainsi appelée que depuis le xxe siècle.
Le terme classicisme n’est employé pour
désigner la deuxième moitié du XVIIe siècle que depuis le XIXe siècle
Le romantisme, lui, est d’emblée conscient de sa naissance et de son développement.
Cela signifie que
ses auteurs savent qu’une rupture nette est à l’œuvre dans les arts (la Révolution française aidant) et
ils nomment cette nouvelle ère romantisme ou romanticisme.
Mais l’emploi, fréquent, de l’adjectif romantique montre pendant quelques années un flottement
sémantique.
Il renvoie au nom masculin roman dans le sens de « langue romane » en ancien français,
c’est-à-dire la langue vulgaire (le français) par opposition à la langue noble (le latin).
Il renvoie
ensuite aux ouvrages écrits en français, en « roman », qui sont donc qualifiés de « romanesques ».
Dès lors, « romantique » et « romanesque » sont souvent employés dans des sens proches.
Le flou
perdure jusqu’au XIXe siècle, car des « paysages romantiques » sont soit 1) des paysages qui
pourraient donner lieu à une description romanesque ; soit 2) des paysages susceptibles de faire naître
un sentiment et un épanchement de l’âme (le sens de romantique qui s’est maintenu jusqu’à
aujourd’hui).
Les grands principes du romantisme en littérature
Cette variété des acceptions rend la définition du romantisme délicate, mais une communauté de
thèmes apparaît au fil des œuvres :
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le goût pour l’exotisme et la couleur locale ;
la valorisation de la mélancolie à la fois dans l’abattement et dans l’exaltation ;
l’usage de l’image de la nuit et des tombeaux ;
le goût pour l’exaltation du moi et de l’individualité ;
une fascination pour la nature, considérée comme le moyen d’atteindre une communion avec
des forces transcendantes.
Les grands principes du romantisme français sont donc annoncés par ceux du romantisme allemand et
du romantisme anglais.
Contemplation solitaire de la nature, expression des sentiments
Les grands principes du romantisme sont également annoncés, pour certains, par la dernière œuvre de
Jean-Jacques Rousseau, Les Rêveries du promeneur solitaire (publiée de manière posthume en 1782).
L’auteur des Lumières, alors âgé de 66 ans, y exprimait son goût pour la solitude, pour la
contemplation de la nature et faisait des liens entre ses sentiments et les paysages qu’il traversait.
Si le classicisme représentait la passion amoureuse comme destructrice (le théâtre de Racine en est un
bon exemple), le romantisme, au contraire, exalte la passion et les sentiments exceptionnels qu’elle
fait éprouver.
Ceux-ci transforment l’homme et le font se dépasser.
Il est donc erroné de voir les
auteurs romantiques comme des êtres rendus mornes et tristes par la litanie continue de leurs plaintes ;
cette expression de l’amour et de la passion a au contraire la force d’imposer le « moi » comme
mesure de toute chose.
C’est la publication des Méditations poétiques d’Alfonse de Lamartine (1790-1869) en 1820 qui lance
ce type de poésie en France et lui donne d’emblée une grande ampleur.
Le Lac, L’Isolement, L’Automne et Le Vallon y figurent.
Le Vallon recueille les plaintes du poète, à la
fois comme lieu décrit et comme texte poétique :On retrouve une sensibilité élégiaque, mais doublée
d’un ton très personnel, sincère et sentimental.
Le romantisme français est par la suite profondément marqué par ses revendications de liberté, dont
les implications politiques et linguistiques sont très importantes.
La proclamation de la liberté absolue
dans les arts bouscule le monde des Lettres pour l’ouvrir au peuple et à ceux qui, jusqu’ici, n’étaient
pas les bienvenus dans le règne du « bon goût ».
Les auteurs anciens (grecs et latins), modèles du classicisme, sont délaissés au profit de figures
nationales.
Elles permettent de célébrer un passé plus authentique et de remettre en question l’idée,
jusqu’alors très ancrée, que l’art doit être réservé aux personnes cultivées et « éduquées » :
principalement les nobles et les rois.
Les auteurs romantiques défendent une littérature populaire et
représentent toutes les classes sociales.
Il s’ensuit que l’emploi des mots n’est plus soumis aux consignes du classicisme selon lesquelles un
auteur ne peut employer tous les mots du lexique français – certains étant considérés comme vulgaires
ou à la sonorité désagréable.
Les auteurs romantiques rapprochent le classicisme de l’absolutisme et le romantisme de la révolution
et de la république, et font voler en éclat ces jugements de valeur lexicaux : Victor Hugo, dans «
Réponse à un acte d’accusation », fait entrer la langue dans l’ère post-révolutionnaire, post-1789 :
Le drame romantique et l’élévation du « laid » comme principe esthétique
La liberté dans la langue et la mise en valeur des sentiments s’accompagnent, enfin, d’une liberté dans
les sujets traités.
Cette liberté prône qu’il n’y a pas de « bon » ou de « mauvais » sujet, et qu’il doit
être possible de représenter tous les sentiments de l’âme humaine, toutes les situations, car la
littérature est libérée de sa mission d’élévation et d’éducation.
Elle devient une fin en soi, elle devient
de l’art au sens fort.
C’est au théâtre que ce principe du romantisme, opposé à ceux du classicisme, ressort avec le plus
d’éclat.
Si les auteurs classiques avaient élevé en dogme la nécessité de représenter l’ordre, la
tempérance, la mesure, et de ne rien porter au théâtre qui soit vulgaire ou choquant, le théâtre
romantique s’impose par le droit laissé à l’écrivain de représenter ce qu’il souhaite.
Victor Hugo demande que le théâtre soit le lieu de l’expression de la vie intégrale, et il défend une
thèse restée célèbre sur l’alliance du sublime et du grotesque :
Essayons de faire voir que c’est de la féconde union du type grotesque au type sublime que naît
le génie moderne, si complexe, si varié dans ses formes,....
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