Le roman peut-il se passer de héros ?
Publié le 02/12/2021
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héros ?. Ce document contient 3969 mots soit pages. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système gratuit d’échange de ressources numériques. Cette aide totalement rédigée en format PDF sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en: Echange.
Le roman peut-il se passer de
héros ?
Toute Société, toute culture, toute civilisation a besoin de héros. La
littérature, et particulièrement le roman, a vu naître des héros qui ont
traversé les frontières et les époques. Ulysse, illustre pour son courage
et sa ruse, dans l’Antiquité, Jean Valjean bien des années plus tard.
Définir précisément ce qu’est un héros n’est pas aisé. Sa définition
évolue, tout comme il est délicat de définir précisément le roman, tant il
peut être protéiforme. Aussi, ce sujet interroge à la fois sur ce qui fait
d’un personnage littéraire un héros, mais aussi le lien particulier
qu’entretient le roman avec ses personnages et comment ce genre
littéraire en prose d’une certaine longueur permet aux romanciers de
donner vie à ces “êtres de papier”.
Ainsi, le roman peut-il se passer de héros ?
Pour répondre à cette question, nous montrerons tout d’abord que
le roman repose souvent sur des personnages aux qualités
extraordinaires : des héros. Ensuite, nous présenterons en quoi le roman
peut parfois se passer de héros. Et enfin, nous verrons qu’il arrive que le
roman créé lui-même ses héros : il transcende des personnages
ordinaires en héros.
D’une part, dans de nombreux cas, les héros sont plus que des
personnages de l’histoire : ils sont l’histoire. Par exemple, dans les
romans d'aventure, les romans épiques, les épopées, les romans de
supers-héros, etc. le héros est presque incontournable. Il est la clef de
voûte de tout l'édifice. Les textes antiques sont souvent construits
autour de ce modèle du héros tout puissant qui triomphe, de ce
personnage presque légendaire, un être fabuleux aux qualités
incroyables : la renommée, la gloire, la force, la rage de vaincre (Ajax,
Héraclès), le courage, la sagesse, l’intelligence (Ulysse), la grandeur, la
magnanimité, une habileté exceptionnelle dans une activité noble
comme la guerre (héros de l’Iliade) ou l’art (Orphée), l’accomplissement
d’exploits (Héraclès, Jason, Ulysse, etc), etc. ?L'iliade et ?l'Odyssée ou
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même les différents textes de ?La Bible ?reposent sur des personnages
aux caractéristiques héroïques. En 1949, dans son livre ?Le Héros aux
mille et un visages?, Joseph Campbell décrit ce modèle en exposant une
théorie tirée de l’étude des mythes de différentes cultures à travers le
monde, qui est que les histoires racontées par l’humanité suivent
toujours la même structure : « Un héros quitte le monde ordinaire pour
s’aventurer dans une région merveilleuse et surnaturelle : des forces
fabuleuses y sont rencontrées et une victoire décisive y est gagnée. Le
héros rentre de cette mystérieuse aventure avec le pouvoir de faire des
miracles pour le reste de l’humanité. ». Ce modèle permet au lecteur de
s'évader, de vivre des aventures extraordinaires à travers la figure du
héros, de dépasser la réalité de sa vie, de son quotidien.
Mais le héros peut aussi se rendre indispensable au roman sans
forcément triompher comme dans la littérature médiévale. Par exemple,
dans ?Tristan et Iseult?, Iseult aux Blanches Mains et le roi Marc
s’opposent à l’amour de Tristan et Iseult. Ici, Tristan est poursuivi par un
destin contre lequel il ne peut rien, un destin inéluctable, cela fait de lui
un héros tragique. De plus, il a des ennemis (Iseult aux Blanches Mains
et le roi Marc) qui le persécutent et cela renforce sa place de héros, car,
Voltaire disait « C'est le sort d'un héros d'être persécuté. ».
Le lien intrinsèque qu'entretient le roman et le héros peut aussi
être mis en évidence par une omniprésence du héros. Par exemple, dans
La Chartreuse de Parme de Stendhal, les lecteurs suivent les aventures,
les réussites et les échecs de Fabrice del Dongo tout au long de sa vie.
Premièrement, il tente de prendre une place de héros victorieux, héros de
guerre, mais très vite, il est confronté à une réalité moins rose qui permet
aux lecteurs de l’apprécier. De ses réactions face à ses échecs à la
manière presque héroïque dont il rebondit et gère les obstacles qui
viennent à lui. Le roman semble par conséquent être le genre littéraire
par excellence de l’existence du héros. Le romancier peut prendre le
temps de le caractériser, de le faire évoluer, ce qui permet souvent, une
plus forte identification du lecteur.
Toutefois, le roman peut reposer sur d'autres figures que le héros.
Si depuis l’antiquité, la norme en écriture était de faire reposer une
histoire sur un héros, depuis quelques siècles, de nouvelles formes de
roman apparaissent et bouleversent ce lien quasi obligatoire
héros-roman pour s’adapter aux nouvelles envies des nouveaux lecteurs.
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L’antihéros est une belle illustration d’un procédé permettant de
s'affranchir du héros. L’antihéros est un personnage n'ayant aucune des
caractéristiques du héros traditionnel. Par exemple, dans ?Voyage au bout
de la nuit de Louis-Ferdinand Céline, Bardamu emprunte le chemin qu’il
aurait pu prendre s’il avait été un héros, mais ne saisit pas les
opportunités qui se présente à lui, il semble ne pas être maître de lui
même. Par exemple, il sera, sans vraiment le contrôler en perpétuel
changement de profession ; Il sera d'abord carbin, puis soldat volontaire,
puis commis de factorie en Afrique coloniale, puis travailleur à la chaîne,
puis médecin des pauvres en banlieue ouvrière parisienne, puis figurant
de théâtre et enfin employé puis directeur dans un asile d'aliénés. Il
incarne souvent, de plus, au fil du roman, des valeurs loin d’être
positives.
Dans le Nouveau roman, le héros semble ne plus avoir sa place.
En effet, le Nouveau roman est construit sur le rejet des “codes”
traditionnels du roman dont la notion de personnage et de héros. Les
personnages sont souvent anecdotiques, très peu développés, il servent
juste à illustrer et faire passer le message et les pensées de l’auteur. Par
exemple, dans ?Le Planétarium de Nathalie Sarraute, l’auteur cherche
presque à déshumaniser ses personnages Alain, Gisèle et tante Berthe
qui ne sont pas individualisés et qui peuvent donc être interchangeables.
L’auteur les utilise seulement comme porteurs d’un esprit dans lequel on
peut plonger, une sorte de coquille vide.
Pour plaire à certains lecteurs, il faut qu’ils puissent clairement
s'identifier au personnage principal et à ses problèmes. Dans ce cas là,
le héros ne conviendrait qu’aux lecteurs orgueilleux (ou eux-mêmes
héroïques), mais pour les autres, il faut un personnage banal avec des
problèmes banaux. Par exemple, dans ?L'Etranger d’Albert Camus le
personnage principal et narrateur interne, Meursault, est employé de
bureau (travail banal), ne fait rien d’extraordinaire, mais pourtant, ce
roman est un considéré comme le meilleur livre d’Albert Camus, et c’est
un grand classique de la littérature française. Peut-être justement parce
que le lecteur s'identifie aisément à Meursault dès le début de l’oeuvre :
il s'identifie par exemple à lui grâce à la perte d’un proche. Puis la
situation échappe aux lecteurs puisqu’en réalité ils n’ont aucun contrôle
sur ce personnage, il commet un crime, se fait arrêter, délaissé par son
amante, puis condamné à mort. Ce processus d'identification est très
important dans ce roman, car sans lui, les lecteurs auraient juste pris
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Meursault pour un fou et n’auraient éprouvé aucune compassion, ils
n’auraient pas vécu l’histoire de l’intérieur, mais ils auraient simplement
lu l’histoire d’un personnage presque demeuré dans lequel ils ne se
reconnaissent pas.
Enfin, dans beaucoup de romans, peut être même la majorité, le
personnage principal n’est pas initialement héroïque. Ce serait le roman
lui-même qui crée ses héros : ce genre littéraire semble transcender des
personnages ordinaires en héros. L'essence de beaucoup de romans est
d'avoir des héros, mais pas forcément au sens premier du terme. Par
exemple, dans ?Jacques le fataliste et son maître de Denis Diderot,
Jacques n’a ni la carrure du héros épique, ni la noblesse du héros
tragique, mais au fil de ses aventures, de ses états d’âme, de ses
pensées, de ses actions et de sa manière de narrer, Jacques devient un
héros picaresque, c’est un personnage qui traverse toute une série
d'aventures qui sont pour lui l'occasion de contester l'ordre social établi.
Ici, il a été fait héros par le roman.
Notre Dame de Paris de Victor Hugo est aussi un belle illustration
de ce phénomène. L’un des personnage principaux : Quasimodo, n’a au
début du livre rien pour lui. A sa description, les lecteurs ont une réaction
effrayée ou amusée, puis au bout de quelques pages, les lecteurs ont
appris à l'apprécier, et culpabilisent presque de leur réaction initiale. A la
seconde ou le lecteur éprouve ce basculement soudain, Quasimodo
devient un héros car les mots de Victor Hugo ont su le rendre
intéressant, en lui donnant un caractère qui force le respect du lecteur et
la bosse qui lui gâche la vie se transforme presque en atout. C’est alors
à la fois le romancier qui fait de ses êtres de papier des héros mais aussi
le lecteur qui donne une dimension extraordinaire aux personnages,qui
en fait des exemples et qui les inscrit dans le patrimoine culturel.
Aussi, souvent, les personnages deviennent des héros par le
regard et la projection des lecteurs. Ces derniers en font des exemples
et des références culturelles et sociales. Dans la littérature ce sont les
lecteurs qui par leur réception placent parfois des personnages au rang
de héros. Par exemple, dans ?Si c’est un homme de Primo Levi, l'auteur
écrit pour témoigner de l'horreur du camp d’extermination nazi
d’Auschwitz. Les lecteurs voient en lui un héros... Parallèlement, dans la
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société ce sont les hommes qui hissent telle ou telle personnalité au
rang de héros : un chanteur, un sportif, etc.
Pour conclure, le sujet nous a, d’une part, invité à questionner la
définition même de héros. Ce dernier peut être un personnage littéraire
principal, banal ou extraordinaire. D’autre part, il nous a permis de mettre
en lumière à la fois le rôle essentiel qu’il occupe dans certains romans,
notamment dans la littérature antique ou médiévale, mais aussi
comment certaines oeuvres romanesques réussissent à s’en affranchir.
Il a relevé le caractère si protéiforme de ce genre littéraire qui réussit à
transcender la réalité et à créer des héros aussi bien parmi ses
personnages que ses lecteurs en poussant ces derniers à s'identifier à
un personnage principal en lui donnant l’illusion qu’il deviendra lui-même
le héros de l’histoire.
Différemment, l'art peut-il se passer de héros ?
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