"Le rire de rabelais est en grande partie un superbe déguisement pour essayer de détourner les ennemis, brouiller les pistes, éviter la censure si terrible alors" Dans quelle mesure ces propos de Michel Butor s'appliquent-ils à votre lecture de gargantua ?
Publié le 16/05/2024
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"Le rire de rabelais est en grande partie un superbe déguisement pour
essayer de détourner les ennemis, brouiller les pistes, éviter la censure
si terrible alors" Dans quelle mesure ces propos de Michel Butor
s'appliquent-ils à votre lecture de gargantua ?
Le XVI ème siècle est celui de l’audace.
Si le Moyen-âge avait négligé le grec, les
auteurs du XVI ème siècle feront la part belle à cette langue et à ses textes.
Ce
trait sera d’ailleurs l’une des principales caractéristiques de l’humanisme,
mouvement qui mettra l’homme au cœur des raisonnements.
S’opposant à toute
forme de dogmatisme et cherchant à faire rire son lecteur, Rabelais, figure
littéraire du XVI ème siècle, sera avec Erasme l’un des principaux représentants
de l’humanisme.
Dans Gargantua, l’auteur utilise les personnages des géants
pour illustrer les tords et les vices des hommes.
Or, ce rire exposé sur le thème
du gigantisme amène à la curiosité.
En effet, dans ses propos, Michel Butor
présente le rire comme une stratégie littéraire dont l’unique but serait d’éviter la
censure.
A cet égard, nous nous demanderons si le rire n’est qu’un « superbe
déguisement » pour masquer une satire importante ?
Nous commencerons par montrer que le rire est un déguisement, puis nous
analyserons sa fonction primordiale : le divertissement.
Enfin, nous terminerons
par dire que le rire veut avant tout déstabiliser l’ordre établi.
Le rire est un « superbe déguisement » d’une part pour détourner l’attention
et d’autre part pour dénoncer des instituions.
Dés le début du livre François Rabelais utilise un pseudonyme « Alcofribas
Nasier » pour garder l’anonymat derrière les propos qu’il faisait circulé.
En
publiant "Gargantua" à une époque où la censure religieuse était omniprésente,
Rabelais prenait un risque considérable.
Son œuvre était audacieuse, remettant
en question l'autorité de l'Église et critiquant ouvertement les mœurs de la
société de son temps.
Pourtant, Rabelais était conscient de l'importance de ses
idées et de sa liberté d'expression.
Ainsi, il a cherché à éviter la censure en
utilisant des tactiques astucieuses.
En présentant ses critiques sous forme de
satire humoristique, il rendait son message plus difficile à attaquer directement.
De plus, en dissimulant ses véritables intentions derrière des métaphores et des
allégories, il offrait une certaine protection à son œuvre.
En effet ,dans son
prologue il parle longuement des petites boîtes silène en comparaison avec
Socrate « toujours dissimulant son divin savoir » , c’est une manière pour faire
comprendre au lecteur quel est le but de son livre « vous ne pensiez pas trop
que leur contenu n’est que moqueries » « vous-mêmes dites que l’habit ne fait
pas le moine ».
Il utilise donc le rire comme couverture pour « brouiller les
pistes ».
Pour continuer Rabelais, grâce à ce « superbe déguisement » offre une
critique très constructive des institutions.
En effet la critique de religion possède
un rôle important dans Gargantua.
Notamment par le personnage de Frère Jean,
un moine qui ne cache son refus d’être savant, son alcoolisme et sa manière de
jurer.
Ce protagoniste est grossier, pour se battre il utilisera même le bâton de la
croix pour blesser et tuer alors que c’est un symbole religieux.
De plus la satire
de l’éducation est elle aussi principale car c’est un thème central de l’humanisme.
Dans notre œuvre c’est surtout l’éducation médiévale des sophistes qui est
critiqué : par son programme étonnant fait d’une accumulation de savoir inutiles.
L’étymologie du prénom « Thubal » (qui signifie confusion) précurseur sophiste
ou encore le protagoniste Holopherne dont le prénom est symbole de l’ivresse est
une manière pour Rabelais de se moquer et de dénoncer .Enfin le thème de la
guerre est abordé lors de la guerre Picrocholines.
L’auteur dénonce l’absurdité
des causes de la guerre, les dégâts causés sur en grande partie des innocents et
la durée assez longue pour retrouver un état de paix.
C’est le cas de la guerre
entre Picrochole et Grandgousier dont la cause est un malentendu sur l’achat de
fouaces « les fouaciers ne voulurent pas accéder à leur requête ; qui pis est, ils
les insultèrent d’abondance » et cela engendre un réel conflit démesuré «
Picrochole aussitôt entra dans un furieux courroux, et sans plus s’acquérir du
quoi ni du comment, fit proclamer par tout son pays le ban et l’arrière du ban »
Cette décision de guerre est insensée.
Mais le rire n’est pas seulement un rire dénonciateur ,qui permet de
« détourner les ennemis » .
Le rire dans sa fonction principale permet de tenir le
lecteur en haleine tout en lui offrant un divertissement digne de ce nom.
Nous
verrons cela à travers un comique de mot recherché puis à travers un humour
scatologique et grotesque.
Pour commencer, nous retrouvons des comiques de mots à plusieurs reprises,
notamment au chapitre 16 avec le pays de La Beauce « Tout le pays fut
transformé en champs.
Ce que voyant, Gargantua [...] dit : — Je trouve beau ce.
C'est pourquoi, depuis lors, on appelle ce pays la Beauce.
».
En effet, lorsqu'il se
rendait à Paris avec une jument assez particulière, venue d'Afrique.
Cette
dernière détruisit tout sur son passage avec sa queue à cause des mouches.
Le
terme « coquecigrue » est un terme inventé par une vieille dame dans ce livre
qui est un mélange de trois oiseaux différents et qui exprime l'impossibilité
qu'une action se déroule.
Elle emploie ce mot pour dire à Picrochole qu'il ne
récupérera pas son domaine.
Ce dernier qui n'a pas compris attend
désespérément que cette prophétie se réalise, en vain.
Cela fait écho au Malade
imaginaire, de Molière ou le jeu de mot est subtilement utilisé avec un
néologisme, lorsque Toinette annonce la venue du père et du fils Diafoirus, elle
se moque de lui en employant le mot « gendrés » car ce dernier veut à tout prix
marier sa fille à un médecin.
Le dernier comique....
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