Le Père Goriot: TROMPE-LA-MORT (commentaire)
Publié le 15/05/2020
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Le Père Goriot: TROMPE-LA-MORT (commentaire)
Au Jardin des Plantes, Poiret et mademoiselle Michonneau conversent avec le chef de la police nommé Gondureau.
Celui-cileur apprend que Vautrin est en fait un forçat évadé du bagne de Toulon où il est connu sous le nom de Trompe-La-Mort.Gondureau demande à mademoiselle Michonneau de vérifier que Trompe-La-Mort est bien marqué à l'épaule.
À la pension Vauquer, les événements se précipitent.
Tandis que, presque malgré lui, Eugène continue son « affaire »auprès de Victorine, Vautrin signale au jeune homme que le duel est lancé contre le fils Taillefer.
Au même moment, Goriotapprend à Rastignac que Delphine, qui se refuse obstinément à lui depuis le début, vient de fui louer un appartement, rued'Artois.
Rastignac veut aller prévenir le père Taillefer, mais Vautrin l'endort avec un somnifère dans la soirée.
Il est donctrop tard pour intervenir.
Le lendemain, un commissionnaire annonce la mort du fils Taillefer.
Victorine est riche.
Rastignacrenonce publiquement à sa main.
Quelques instants plus tard, Vautrin est terrassé par une attaque provoquée par unpoison que mademoiselle Michonneau a versé dans sa tasse.
Elle peut alors, dans la confusion des premiers soins, faireapparaître sur l'épaule de Vautrin les deux lettres « TF » qui dénoncent son passé de forçat.
La police intervient dans la soirée et arrête le forçat.
Il se nomme de son vrai nom Jacques Collin.
Il promet de s'évader.Les pensionnaires, indignés de la dénonciation, demandent à mademoiselle Michonneau de quitter les lieux.
Poiret décidede l'accompagner.
Dans la soirée, Eugène et le père Goriot sont reçus par Delphine dans le nouveau domicile d'Eugène, rue d'Artois.
Le pèreGoriot exulte de joie.
Il va être logé dans une chambre de bonne au-dessus d'Eugène.
Tout semble être pour le mieuxdans le meilleur des mondes.
COMMENTAIRE
Après un chapitre consacré à Rastignac, le narrateur s'intéresse à Vautrin (dont le surnom est Trompe-La-Mort), avant dedédier le dernier chapitre au troisième « héros » du livre : le père Goriot.
Vautrin : le Nucingen du bagne
La révélation de l'identité de Vautrin comme forçat se fait sous le registre de l'hyperbolique : « Il a des qualités qui le rendent extraordinaire » dit de lui Gondureau (p.
197), un « homme d'honneur » renforce Poiret.
Comme Nucingen, Vautrin est un banquier mais le banquier de la contre-société, celle du bagne.
Si Nucingen accomplit ses affaires de jour, Vautrintravaille la nuit.
Mais, comme le révélera Delphine à propos des affaires de son mari, et comme l'a expliqué Vautrin àRastignac, société ou contre-société, tout est affaire de perspective, le crime est toujours là.
L'influence du mélodrame
Après les paroles proliférantes, les discours, les scènes de fond de la partie précédente, l'action subitement s'accélère.L'arrestation de Vautrin relève de la scène de mélodrame, genre très en vogue à cette époque.
Pièce populaire, fertile enrebondissements spectaculaires, le mélodrame met en scène des bons et des méchants, dans des intrigues où lepathétique se conjugue à l'extraordinaire.
La veille de son arrestation, Vautrin est d'ailleurs allé avec madame Vauquerassister à un mélodrame de Guilbert de Pixerécourt, le maître incontesté du genre.
En une journée, une accumulation invraisemblable d'événements (rnort du fils Taillefer, arrestation de Vautrin, exclusion dePoiret et de Michonneau, découverte par Rastignac de sa garçonnière et donc de l'amour de Delphine) rattache Le PèreGoriot au mélodrame.
Eugène de Rastignac s'écrie même : « Mais, [ ...I aujourd'hui le monde est donc renversé ? » (p.
248). Cette parole est particulièrement cruelle puisqu'elle intervient au moment où le père Goriot croit qu'il a retrouvé l'amourfilial de Delphine.
Victorine, une utilité
On a souvent commenté l'abondance de personnages dans Le Père Goriot et notamment l'importance de cette trilogie de personnages essentiels : le père Goriot, Rastignac, Vautrin.
Parmi la multitude de personnages secondaires, VictorineTaillefer apparaît singulièrement desservie.
Elle est réduite au rôle de simple tentation pour Rastignac.
Sa fortune faite,elle disparaît de la vie de Rastignac et du roman sans que le narrateur n'ait un mot pour évoquer ses espoirs déçus, sesregrets.
Comme le souligne Gérard Gengembre : « Son exclusion [l'exclusion de Victorine] de l'intrigue signifie aussi l'exclusion du sentiment plein, harmonieux, heureux de la nature humaine réconciliée avec elle-même.
Il n'a pas sa place dans la société » (Le Père Goriot, coll.
« Texte et contextes », Magnard, 1985).
L'ultime épreuveLa scène hallucinante de séduction de la fille par le père, rue d'Artois, montre que le père Goriot risque de devenirrapidement un gêneur.
Rastignac est littéralement effacé par l'amour presque charnel du père.
Celui-ci ne peut quedisparaître.À ce stade de l'histoire, Eugène semble avoir triomphé et choisi sa voie.
Il a renoncé à Victorine Taillefer (son destin estalors diamétralement opposé à celui du marquis d'Ajuda-Pinto qui a quitté sa maîtresse pour le mariage).
Il manquepourtant une épreuve à l'apprentissage d'Eugène..
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