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Le mal dans Les Confessions de Saint d’Augustin

Publié le 13/12/2020

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  Saint Augustin, le jeune et l’Adulte Saint Augustin est épris la vérité. La vérité est un facteur incontournable qui sera soutenu par sa formation en rhétorique dans sa recherche du vrai. Ceci lui a permis d’acquérir une cohérence ferme du raisonnement grâce à laquelle il a pu déceler, non seulement la vérité, mais aussi la fausseté et le sophisme de certains courants de pensées et doctrines philosophiques de son époque. Nous avons là, la preuve de son ouverture d’esprit dans sa quête de la vérité et de sa fermeté à ne pas se laisser corrompre par la fausseté. Nous n’en voulons pour preuve que, d’une part, sa lecture de l’Hortensius de Cicéron dont il reconnait la véracité du contenu. D’autre part, il va relever les limites voire la fausseté du manichéisme, de l’astrologie, des catégories d’Aristote et de la science de la nature: « Ils se trompaient non seulement sur vous [Dieu], qui êtes la vérité, mais aussi sur les éléments de ce monde, votre création, et, sur ce point, même quand les philosophes ont dit vrai, j’ai dû les dépasser par amour de vous […]. Vérité, vérité, comme du fond de l’âme je soupirais vers vous, quand ces hommes faisaient retentir à mes oreilles, si souvent et de tant de manières, votre nom, mais de bouche seulement, et dans de nombreux et énormes ouvrages ».18 Il est désormais clair pour nous que Saint Augustin identifie la vérité à Dieu ; et, comme telle, elle est immuable et éternelle dans la perspective augustinienne. Augustin reproche alors aux Catégories aristotéliciennes de l’identifier aux substances matérielles et corporelles susceptibles d’être détruites, de disparaître. A la science de la nature, nous pouvons dire qu’il ne reproche pas grande chose, sinon qu’elle doit conduire l’homme à la connaissance de la vérité qu’est Dieu, créateur de cette nature et de tout ce qu’elle contient. Insatisfait de ces doctrines qui l’ont déçu, le penseur d’Hippone poursuit sa recherche du vrai jusqu’à Milan où il rencontre Saint Ambroise19. Cette rencontre sera suivie, plus tard, de la découverte du néo-platonisme. 18 Ibid., III, 6, 98-99. 19 Ibid., V, 13, 176-177. 6 La rencontre du futur saint Augustin avec saint Ambroise, évêque de Milan d’alors, est une étape décisive pour le fils de Monique dans sa quête de la vérité. En effet, la vérité qu’il cherchait depuis tant d’années devrait se trouver, selon lui, grâce à la logique et à la cohérence du raisonnement. Et c’est ce qu’il a découvert chez saint Ambroise qui le séduisait par son éloquence : « Sans aucun souci de m’instruire des vérités qu’il formulait, je n’avais d’oreilles que pour l’art avec lequel il les formulait. […] Cependant avec les mots que j’aimais, les choses qui m’étaient indifférentes trouvaient accès dans mon esprit. Je ne pouvais guère les séparer, et tandis que j’ouvrais mon cœur à son éloquence, la vérité y entrait aussi, quoique par degré »20 . C’est alors qu’il va se séparer des Manichéens et d’autres doctrines philosophiques pour se mettre à l’école du prélat de Milan21. Ainsi, il sera initié à l’enseignement du christianisme. La conception de la vérité que saint Augustin identifie à Dieu trouve son explication et son fondement dans la doctrine de l’Eglise catholique que rejoint, selon lui, le néo-platonisme22 . Par conséquent, il établit, à partir de sa lecture du néo-platonisme, une analogie entre la notion des idées dans l’allégorie de la caverne - monde intelligible / monde sensible – chez Platon et l’affirmation johannique au sujet de l’incarnation de Jésus-Christ, le Verbe éternel de Dieu fait chair pour habiter parmi nous, dont la lumière, brillant dans les ténèbres sans être arrêtée, nous éclaire. De même, il va s’inspirer – implicitement – des trois hypostases, l’Âme - l’Intelligence- l’Un du néoplatonisme de Plotin pour expliquer sa conception de l’homme (âme, corps et esprit)23. Il s’agit là de la vérité augustinienne sur 20 Ibid., V, 14, 177. 21 Cf. Ibid., V, 14, 178. 22 Ibid., VII, 9; VII, 10. 23 Cf. ibid., XIII, 21-23. 7 l’homme, cet être pluridimensionnel, que nous lisons dans « l’allégorie de la création »24 . B- Problématiques et résumé des Confessions 1. Problématique des Confessions Les confessions ont été composées vers 397-40025. Cette date nous informe que ce chef-d’œuvre a été écrit pour des objectifs précis ou du moins qu’il est mû par plusieurs interrogations. Nous reconnaissons cela d’abord dans le titre de l’œuvre. En effet, le titre – Confessions – indique le but que saint Augustin assignait à cet ouvrage. Le mot confessio vient du latin et évoque une triple réalité : l’aveu des fautes devant un tribunal (confessio peccatorum), la profession de foi des martyrs (confessio fidei) et la louange adressée à Dieu (confessio laudis)26. Ce titre, « soleil de toute l’ouvre », nous dire pourquoi Saint Augustin l’a écrit. D’une part, on se demande si notre auteur ne répondait pas aux attaques de ses adversaires donatistes, qui lui reprochaient son passé agité. Cela est peu probable ! D’autre part nous reconnaissons que Les Confessions bien qu’elles soient une biographie, s’apparentent davantage aux ouvrages qui intègrent une dimension de propagande, telle qu’elle existait à l'époque dans certains manuels de philosophie. Cela est d’autant plus vrai car Les Confessions ont inauguré beaucoup de thèmes éclatants tels que : « L’inquiétude constitutive de l’homme, le poids de l’enfance, les orages de l’adolescence, la pression du passé sur le présent, la chaine des habitudes, la vague des passions, les séductions des amitiés et des amours, les prestiges du 24 Ibid., XIII, 34. 25 Idem. 26 Ibid. 8 théâtre, la présence originaire du mal, les profondeurs de la mémoire, le mystère du temps, l’errance spirituelle et la proximité de Dieu » 27 A travers ce riche tableau, nous supposons que Les Confessions ont un seul but : convertir ses lecteurs à la philosophie : amour de la sagesse. Saint Augustin assimile cet amour à Dieu. Saint Augustin confirmera cela à la fin de sa vie où il mît en lumière, dans Les Retractationes (426-427), l’objet des Confessions : « les treize livres de mes confessions louent Dieu juste et bon de mes maux et de mes biens, ils élèvent vers Dieu l’intelligence et le cœur de l’homme » 28 Aussi remarquons- nous que tout au long de l’œuvre, le récit que nous relate Saint Augustin « se mue en prière ou en méditation, sans aucun souci de prouver, au gré de la mémoire et des élans intérieurs » 29. Ce qui veut dire, comme Saint Augustin le recommande, que son œuvre est divine c’est-à-dire qu’elle est irradiée d’une lumière divine. En somme, il faut noter que Les Confessions sont une œuvre à double visée : une visée théologique et visée philosophique. La vissée théologique est une sorte de théodicée car pour Saint Augustin « l’être humain est incapable de choisir durablement les vraies valeurs, le Bien et l’Eternel, sans la communion avec Dieu, sans la grâce divine » 30 : Dieu nous a créé pour lui et notre cœur est toujours agité de trouble et d’inquiétude jusqu’à ce qu’il trouve son repos en lui31. La visée philosophique est cette quête du vrai qui a conduit saint Augustin durant toute sa vie. C’est cela qu’il partage et exhorte à imiter. 2. Résumé des confessions Les Confessions sont composées de treize livres qui sont divisés en deux vastes ensembles : le livre I à IX sont consacrés à la progression chronologique 27 Saint Augustin, Op. Cit., p.2. 28 Jacquelines Russ, mémo référence, les auteurs, les œuvres, Paris, Bordas, 2003, p.79. 29 Saint Augustin, Op. Cit., p.2. 30 Ibid., p.8 31Ibid., I, 1, 25. 9 et présente la vie d’Augustin de sa naissance(354) à sa conversion et à la mort de sa mère (387). Dans la deuxième partie (livres X à XIII), Augustin se donne à la réflexion sur « sa propre existence de manière plus théorique, en appliquant sa réflexion à Dieu, au temps, à la mémoire… » 32 Notre résumé suivra donc l’itinéraire des deux vastes ensembles. Première partie : livres I à IX Dans les premiers chapitres de la première partie, Augustin nous expose ses premières années. En effet, élevé à Thagaste, saint Augustin acheva à l’âge de quinze ans les cours accessibles dans sa région natale et attendit durant une année que Romanianus, un ami de la famille, finance ses études à Carthage, la capitale de l’Afrique romaine. Ambitieuse, sa mère Monique refusa d’envisager alors le mariage qui aurait fermé à son brillant rejeton les portes d’une carrière universitaire. De sa seizième année passée dans l’oisiveté nous sont parvenus le récit rétrospectif des Confessions sur le vol des poires, les réflexions sur la gratuité du mal et la description de la puissance des désirs charnels qui l’habitaient. Mais il faut souligner qu’avant ces détails, « Augustin donne à voir sa quête de Dieu à partir d’une description quasiment existentielle » 33 . Les Confessions décrivent l’état d’esprit du jeune provincial arrivé à Carthage à dixsept ans pour y poursuivre ses études de rhétorique. Arrivé dans cette ville, Augustin dit qu’il entendait bouillir autour de lui la chaudière des sales amours. Il écrit : « Je n’aimais pas encore, mais je désirais d’aimer (…), mon cœur était tout sec et tout affamé dans la privation et le besoin où il était de cette nourriture intérieure, qui est vous –même, mon Dieu (…) » 34 32 Jacquelines Russ, Op. Cit., p.77. 33 Idem. 34 Saint Augustin, Op. Cit., III, 1,87. 10 Cette passion s’incarna dans la personne d’une concubine dont le nom reste le secret de l’histoire. Augustin l’aima et lui fut fidèle ; il en eut un fils, Adéodat, dont il s’occupa jusqu’à sa mort prématurée en 389. Malgré toutes ses tristes expériences à Carthage, Augustin était devenu un brillant étudiant à l’école de la rhétorique, avec l’objectif de se faire avocat35. Il s’est appliqué à ses études avec beaucoup d’enthousiasme et de plaisir. En 373, la lecture d’un traité aujourd’hui perdu de Cicéron, l’Hortensius, éveilla dans le jeune homme de dix-huit ans l’amour de la sagesse. Formé dans la foi chrétienne, il se dirigea vers la Bible pour y trouver la Sagesse qu’il désirait. Mais il referma le livre aussi rapidement qu’il l’avait ouvert : l’ancienne traduction latine des Ecritures exprimait en un mauvais latin des vérités qui lui paraissaient absolument incompatibles avec sa représentation de Dieu. Il se tourna alors vers les manichéens qui prétendaient expliquer rationnellement le monde et l’origine du mal à partir de la lutte entre deux principes, l’un bon et l’autre mauvais. Augustin avait déclaré l’incapacité de l’Eglise catholique de fournir la connaissance et la sagesse qu’il recherchait. Il désespéra de trouver la vérité dans cette Eglise, et l’abandonna dédaigneusement, convaincu qu’elle enseignait « des fables de petites vieilles ».36 Mais en réalité, il était victime de la propagande manichéenne. Devant cet état d’esprit de son Fils, Monique chercha consolation auprès d’un évêque, qui la renvoya de manière un peu expéditive : « Va-t’en ! Aussi vrai que tu es en vie, il est impossible que le fils de ces larmes périsse ! » 37 En 384, Augustin quitta Carthage pour Rome : les étudiants africains étaient trop tapageurs. Mais ceux de Rome étaient mauvais payeurs… Il finit par obtenir, grâce à un ami manichéen, une chaire officielle de rhétorique à Milan (Italie du Nord), qui était à l’époque la capitale de l’empire. C’est là qu’eut lieu 35 Ibid., III, 3, 93. 36 A. Trapè, Saint Augustin : l’homme, le pasteur, le mystique, trad. de l’italien par victor Arminjon, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1988, p. 48. 37 Cf. Saint Augustin, Op. Cit., III, 11, 110. 11 l’étape centrale de son cheminement intellectuel et personnel : sa conversion, en août 386. Augustin était particulièrement inquiet en arrivant à Milan. Les manichéens n’avaient pas pu satisfaire sa soif de vérité et il s’était tourné un temps vers la doctrine sceptique des philosophes Académiciens. Les sermons de l’évêque Ambroise, brillant orateur qu’il était allé écouter pour la beauté de sa langue, éclairèrent de manière inattendue ses deux pierres d’achoppement intellectuelles : Ambroise interprétait au sens “figuré” les récits bibliques inacceptables au sens propre et, dans la tradition philosophique néoplatonicienne, il considérait le mal comme une absence d’être. Les obstacles intellectuels à la conversion d’Augustin au christianisme furent alors levés. Restait son attachement aux plaisirs de la chair. Jeune, il priait ainsi: « Seigneur, donnez-moi la continence… mais pas maintenant ! »38 . Augustin vécut sa conversion comme l’adhésion à la véritable philosophie. Les philosophies antiques visaient la sagesse ; pour les chrétiens, la véritable Sagesse, c’était le Christ, en tant que Dieu. Mais ils considéraient que les philosophies ne permettaient pas d’atteindre la sagesse qu’elles professaient, alors que le Christ, en devenant homme, avait ouvert la voie qui menait à la véritable Sagesse. En lui, Augustin estima avoir trouvé la Patrie qu’il désirait atteindre et la Voie pour y parvenir. Durant les quelques mois (automne et hiver 386-387) où il se retira avec des amis à Cassiciacum, dans la campagne milanaise, il mena la vie rêvée des philosophes antiques, faite d’otium, de temps libre permettant la réflexion commune. Après son baptême à Milan, Augustin décide de regagner sa ville natale de Thagaste, en Afrique. L’hiver l’obligea à s’arrêter en chemin, dans la 38Ibid., VIII, 6, 271. 12 ville portuaire d’Ostie, près de Rome, en attendant la reprise de la navigation au printemps. Monique y mourut fin 387. Seconde partie : livres X à XIII C’est la partie spéculative des confessions. Dans le livre X, saint Augustin nous décrit la quête de Dieu et sa montée vers ce dernier. Cherchant par le moyen de l’âme, qui seule appartient aux hommes, qui incarne ce Dieu aimé, saint Augustin analyse d’abord la puissance de la mémoire ce « sanctuaire d’une ampleur infinie » 39, qui contient la totalité de nos connaissances, aussi bien les traces des expériences des sens que celles de notre science. La mémoire, est le lieu où se déroule l’activité de la pensée. « Elle unit passé, présent et futur et l’oubli n’est jamais total » car « lorsque la mémoire même perd quelque chose, comme il arrive quand nous l’oublions et que nous le cherchons pour nous en ressouvenir(…) » 40, c’est à la mémoire nous nous recourons. Aussi nous fait-il savoir dans le chapitre XVII que la mémoire seule ne suffit pas pour accéder à Dieu. La spéculation que saint Augustin nous livre sur la mémoire dans ce livre est liée à méditation sur Dieu. Ce Dieu qui est pour lui la source du Bonheur. « Rejetant alors tout ce qui vient des sens, les faux bien, refusant la voie des néoplatoniciens, Augustin conclut qu’il n’y a qu’un médiateur : jésus- christ qui nous amène vers Dieu. Le livre XI est cosmologique. Pour Augustin, l’univers est l’œuvre de la parole divine et comme Dieu, il est éternel. Il faut concevoir cette infinitude divine en dehors des réalités temporelles .De plus, Augustin nous fait saisir dans ce livre, le mystère du temps humain qui représente une énigme et une privation d’être, car trois néants le forment, le passé qui n’est plus, l’éphémère présent et le futur inexistant. 39 Ibid., X, 15, 354. 40 Ibid., X, 19, 360. 13 Le livre XII, s’intéresse à la création de la matière qui selon Augustin est venue de « rien par Dieu ». Enfin, le livre XIII, porte sur « la trinité, père, Fils et Saint-Esprit : l’homme est à l’image de la Trinité, qu’il ne peut cependant comprendre ». Augustin s’en remet à Dieu, qui seul éclaire nos esprits. Ce parcours dans la vie saint Augustin nous a permis de comprendre la pensée de saint Augustin qui est fondée par « la lumière de Dieu ». C’est autour de cette Lumière qu’il articulera désormais ses conceptions telles que la conception du mal. CHAPITRE II : SAINT AUGUSTIN ET LA CONCEPTION DU MAL. Lorsque nous faisons une lecture minutieuse de la vie de Saint Augustin nous constatons que si toute sa vie était selon les normes de l’époque ou de la religion de son temps, nous n’aurions pas peut être aujourd’hui une théorie venant de lui. Augustin est en déphasage entre ses actions et ce qui pourrait être fait, il y avait pour lui un combat permanent entre deux entités : le bien et le mal. 14 Nous pouvons alors dire que c’est la recherche de la compréhension du mal qui nourrit plus l’itinéraire spirituel de Saint Augustin. Qu’est-ce que le mal ? La difficulté majeure que l’on rencontre quant à l’essai de définition que l’on pourrait donner au concept du mal se situe dans sa validité. En effet, sont considérés comme des maux, des actes, des situations ou encore des sentiments jugés inadéquats par rapport à une attente déterminée que l’on considère comme normale. Dans le sens courant, le mal est ce qui affecte négativement. De façon relative, par rapport à un bien, il est compris comme une privation ou absence de bien. A l’instar du corps humain, dont son bien-être ou sa dégénérescence est déterminée par des facteurs précis, « le mal caractérise l’imperfection d’une réalité ; il désigne l’écart entre la manière dont une chose se présente dans l’expérience (ici un corps malade) et ce qu’elle devrait être idéalement » 41. Cette définition englobe les trois dimensions qu’on attribue à ce qui est mauvais : « La souffrance (ou mal physique), la faute (ou mal moral), l’injustice qui désigne la distance entre ce que le monde est et ce que nous espérons qu’il soit. Plus précisément, elle est l’inadéquation entre le mal physique et le mal moral : est injuste une souffrance qui n’est pas la conséquence d’une faute. » 42 D’après Durozoi et Roussel, le mal pris comme adverbe, est ce qui est contraire aux normes admises, quel que soit leur domaine d’action. Pris comme nom, il désigne tout ce qui fait obstacle à la perfection de l’homme et englobe des expériences où dominent la souffrance et le dommage. Le mal est perçu comme un manque dans la pensée théologique, une dégradation progressive de l’être chez Platon43 . La conception augustinienne ne nie pas en intégralité toutes ces théories sur le mal. Les grandes étapes de son évolution intellectuelle et sa vie toute entière, si l'on en croit les Confessions, sont polarisée par la question du mal : 41 M. Foessel, Le mal, textes expliqués, sujets analysés, glossaire, Paris, La gaya scienza, 2011, P.6 42 Idem. 43 G. Durozoi et A. Roussel, Dictionnaire de philosophie, Paris, Nathan, 2009, p.210. 15 après avoir été auditeur de la religion des manichéens pendant au moins dix ans, il se convertit au christianisme, puis découvre les livres platoniciens, ce qui lui permet enfin de développer sa propre réponse à la question. A- Le manichéisme et le néoplatonisme pour quelle conception du mal. 1. Du manichéisme au platonisme. Durant neuf ans, Augustin était séduit et séduisait les gens par les théories manichéennes. En effet, le manichéisme est une secte qui enseignait le dualisme, c’est-à-dire, la cohabitation du bien et du mal dans l’homme et dans l’univers de telle sorte qu’ils arrivaient à penser que Dieu n’est pas tout-puissant parce que le mal est une réalité qui contrebalance son pouvoir. Il y a donc « dans le ciel une cause inévitable qui fait pécher(…) » 44. L’homme est donc exempté de toute faute. Autrement dit, les souffrances terrestres des hommes sont le résultat d'un combat cosmologique entre un principe de lumière, Dieu, et un principe de ténèbres, tous deux matériels. Les manichéens ne pensent pas l'abolition du mal, mais seulement la séparation des deux principes, qui rendrait la puissance mauvaise inoffensive, dans le cadre d'un temps cyclique où les deux principes sont d'abord séparés, puis mélangés, puis à nouveau séparés. Le mal est donc à la fois éternel, substantiel et nécessaire : c'est une puissance mauvaise en nous qui enchaîne la liberté et nous fait mal agir, tout comme c'est la matière mauvaise, sous la forme du corps, qui est responsable de nos douleurs45 . Mais un tel dualisme des principes est évidemment incompatible avec la religion chrétienne : comment un Dieu qui se débat avec les ténèbres pourrait-il être tout puissant, incorruptible, et surtout immuable ? Voilà donc les termes du problème pour Augustin : comment le mal est-il possible si Dieu est immuable ? D'après le récit Des Confessions, c'est véritablement cette question du mal qui 44 Saint Augustin, Op. Cit., IV, 3, 119. 45 Voir Henri-Charles Puech, Sur le Manichéisme et autres essais, Paris, Flammarion, 1979. 16 l'empêche d'embrasser pleinement la foi monothéiste, car il ne parvient pas à comprendre comment expliquer le mal sans supposer, à côté de Dieu, un principe antagoniste : en effet, il cherche un principe ontologique, c'est-à-dire quelque raison d'être du mal. « Je cherchais d’où pouvait procéder le mal ; mais je le cherchais par un faux raisonnement, et ainsi ma recherche était inutile pour le découvrir […] D'où peut donc procéder le mal ? Viendrait-il de la matière de laquelle Dieu aurait créé toutes choses ? Y avait-il quelque matière mauvaise qu’il ait formée et mise en ordre ; mais en telle sorte néanmoins qu’il ait laissé quelque chose de mauvais qu’il n’ait pas voulu changer en bien ? Etc. »46 2. La découverte de la vérité dans le néoplatonisme : le mal et le néant. La lecture des platoniciens, présentée comme une véritable révélation dans Les Confessions, va permettre à Saint Augustin de comprendre qu'il n’a y qu'un seul principe de l'être et de la vérité : « Cherchant donc, en effet, d'après quel critère j'appréciais la beauté des corps tant célestes que terrestres, et de quelle base je disposais pour juger correctement les choses muables lorsque je disais : ‘ceci doit être ainsi, cela non’, cherchant donc d'après quel critère je pouvais émettre un jugement quand j'en émettais un comme celui-là, j'avais trouvé l'immuable et véritable éternité de la Vérité, pardessus ma pensée muable. »47 Dans le récit de ces extases, très proches de celles de Plotin, Dieu est identifié à la vérité : le monisme ontologique est compris comme la condition de possibilité de nos jugements de valeur, et c'est la découverte de cette idée qui permet enfin à Augustin de se détacher du manichéisme.  

« UNIVERSITE D’ABOMEY-CALAVI (UAC) *-*-*-*-*-*-*-*-*-* FACULTE DES SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES (FASHS) *-*-*-*-*-*-*-*-*-* DEPARTEMENT DE PHILOSOPHIE (DPH) *-*-*-*-*-*-*-*-*-* MEMOIRE DE LICENCE Présenté par : Sous la direction de : Joseph Comlanvi ZANGBE Dr.

Koffi Eustache ADANHOUNME MC /CAMES Année Académique : 2019 - 2020Le mal dans Les Confessions de Saint d’Augustin. »

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