LE GUATÉMALA AU XXe SIÈCLE
Publié le 15/09/2020
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État de l'Amérique centrale, au S. du Mexique ; capitale Guatemala. 3 millions d'hab. en 1950, 6 en 1975, 12,2 en 2002. Le territoire actuel du Guatemala, qui appartenait au début du XVIe s. à la civilisation des Mayas, fut conquis par Pedro de Alvarado en 1524 et fit partie jusqu'en 1821 de l'Empire colonial espagnol. À partir de 1544, la capitainerie générale du Guatemala, directement dépendante de Madrid, engloba toute l'Amérique centrale. En 1821, l'Amérique centrale, à la suite du Mexique, proclama son indépendance. D'abord inclus dans l'Empire mexicain d'Iturbide (1822/23), le Guatemala fut le centre de la Confédération des États-Unis de l'Amérique centrale (1823/38). Indépendant de fait en 1839, officiellement en 1847, le Guatemala eut une histoire politique relativement plus stable que la plupart des autres États latino-américains. Elle se résume en quatre longues dictatures : celles de Rafael Carrera (1839/65), de Justo Rufino Barrios (1873/85), de Manuel Estrada Cabrera (1898/1920) et de Jorge Ubico (1931/44). Le Guatemala moderne fut essentiellement la création de Barrios, qui brisa la puissance de l'aristocratie locale, confisqua les biens du clergé, stimula la culture du café, construisit des routes, des chemins de fer, des lignes télégraphiques. Mais il mena aussi une politique hégémonique à l'extérieur et tenta de réaliser par la force l'union de l'Amérique centrale ; il fut tué en combattant les troupes salvadoriennes, à la bataille de Chalchuapa (1885). Après cet échec, les États-Unis prirent une part grandissante dans les affaires guatémaltèques. À leur suite, le Guatemala déclara la guerre aux puissances de l'Axe (1941). La révolution du 20 oct. 1944, qui suivit la démission d'Ubico, orienta la politique du pays vers la gauche et vers un nouveau nationalisme. Sous Juan José Arévalo (1945/51), l'armée cessa de faire peser son poids sur le gouvernement. Le successeur d'Arévalo, Jacobo Arbenz Guzmán, élu en mars 1951 avec le soutien des communistes, décida en juill. 1952 une réforme agraire et fit distribuer à la population des terres non exploitées. La réforme lésa les intérêts de la compagnie américaine United Fruit, qui avait constitué de grandes plantations de bananes et possédait en réserve une partie des terres incultes. L'influence de Washington ne fut pas étrangère au mouvement du colonel Carlos Castillo Armas, qui contraignit Arbenz à démissionner en juin 1954. À la tête d'une junte militaire, Castillo Armas, soutenu par les Américains, engagea la lutte contre les communistes, mais il fut assassiné en 1957. L'armée resta cependant maîtresse du pays. Depuis le début des années 1960, le Guatemala a vécu dans un état de guerre civile larvée du fait de l'action des guérilleros centristes, auxquels répliqua bientôt une contre-guérilla d'extrême droite animée par les organisations Mano Blanca (Main blanche) et Ojo por Ojo (Œil pour œil). Différents officiers se sont alors succédé au pouvoir et ont maintenu l'alliance de l'armée et de l'oligarchie foncière. La guérilla a continué, en particulier dans le Nord, malgré le regroupement des paysans dans des villages contrôlés par l'armée et censés couper les guérilleros de leurs bases populaires. Le dernier chef militaire en date, Oscar H. Meija Victores, au pouvoir depuis un putsch en 1983, parvint à transmettre le pouvoir aux civils en 1985, par l'élection de Vinicio Cerezo à la présidence de la République. Jorge Serrano, élu président en janv. 1991, a engagé de nouvelles négociations avec la guérilla. Cependant, les perpétuelles violations des droits de l'homme et l'impunité des forces armées ont retardé la conclusion d'un accord. À partir de 1991, la perspective d'un apaisement a fait rentrer au pays de nombreux Indiens exilés au Mexique, au premier rang desquels Rigoberta Menchu, qui obtint le prix Nobel de la paix en 1992. Nommé président par le Parlement en juin 1993, Ramiro de León (procureur des droits de l'homme) a placé les négociations avec la guérilla sous la surveillance de l'ONU. En mars 1995, les négociations ont débouché sur un accord entre le gouvernement et la guérilla sur « l'identité et les droits du peuple indigène ». En janv. 1996, l'élection présidentielle porta au pouvoir Alvaro Arzu, candidat de la droite modérée, et des négociations entre le pouvoir et la guérilla ont permis la signature, en déc. 1996, d'un accord de cessez-le-feu entre les deux parties, mettant fin à une guerre civile de trente-six ans qui a fait plus de 100 000 morts et 40 000 disparus. Les accords de paix prévoyaient des réformes constitutionnelles sur la justice, les forces de sécurité, l'identité et les droits des peuples indigènes, la séparation des pouvoirs et l'équité sociale. La commission d'éclaircissement historique (CEH), créée à la signature des accords, a rendu son rapport sur la guerre civile en mars 1999. Elle pointait la responsabilité de l'État guatémaltèque dans ce qu'elle a qualifié de « génocide » de la population indienne. Les premières élections générales de l'après-guerre civile, fin 1999, ont porté un coup aux espoirs des Indiens en faisant triompher, face aux partis issus de la guérilla, le Front révolutionnaire guatémaltèque (FRG) de l'ancien dictateur Efrain Rios Montt. Le référendum du 16 mai 1999, qui portait sur la reconnaissance des droits de la majorité indienne (60 % de la population), a été l'objet d'une abstention massive et s'est soldé par une victoire du « non » ; enfin, l'élection présidentielle de janv. 2000 a abouti à l'élection d'un personnage controversé, Alfonso Portillo, lui aussi membre du FRG.
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LE GUATÉMALA AU XXe SIÈCLE
Au xixe siècle, malgré les réformes économiques et politiques libérales de Justo
Rufino Barrios (1873-1885), l’ancienne Capitainerie générale du Guatémala, en
Amérique centrale, reste largement marquée par des rapports sociaux
précapitalistes fondés sur une main-d’ œuvre indigène extrêmement peu coûteuse
favorisant l’exportation du café à bas prix plutôt que les investissements
productifs.
Au début du xxe siècle, la dictature de Manuel Estrada Cabrera
(décrite par le prix Nobel Miguel Angel Asturias dans son roman Monsieur le
Président), qui se maintient au pouvoir de 1898 à 1920 au moyen de plébiscites
frauduleux, essaye de maintenir l’équilibre entre les forces modernisatrices et
la structure latifundiste héritée de l’époque coloniale.
Rompant avec la
monoculture caféière, M.
Estrada Cabrera octroie des concessions sans conditions
à des entreprises bananières et ferroviaires étrangères, inaugurant le règne
omnipotent de la United Fruit Company (États-Unis).
La consolidation d’une
bourgeoisie agro-exportatrice ne met pas fin à la surexploitation des masses
indigènes, tandis que les conflits internes au régime culminent en 1920 avec la
« semaine tragique », entraînant la chute du dictateur.
Après une série de coups d’États, le général Jorge Ubico Castañeda (1931-1944)
est élu président et instaure un pouvoir autoritaire fondé sur un parti unique
et étroitement lié à l’ambassade des États-Unis.
J.
Ubico est chassé du pouvoir
par un coup d’État qui ouvre la voie au premier régime véritablement
démocratique.
Le président Juan José Arévalo (1945-1951), élu avec 86 % des
suffrages, accorde le droit de vote aux analphabètes et aux femmes, la liberté
de presse et l’autonomie municipale.
Son successeur, le colonel Jacobo Arbenz
Guzmán (1951-1954) amorce une profonde réforme agraire dans un pays où 2 % des
propriétaires accaparaient plus de 70 % des terres cultivables, exproprie la
United Fruit et stimule la concurrence privée en matière de concessions
ferroviaires.
Cette tentative de consolider un capitalisme national amène la CIA
(Central Intelligence Agency) américaine à organiser en 1954, depuis le
Honduras, une invasion armée dirigée par le colonel Carlos Castillo Armas.
Il
instaure un régime de terreur systématique contre tous les secteurs
oppositionnels, contestataires ou récalcitrants, qui frappe en particulier les
populations indigènes, dont certains villages sont bombardés.
Après l’assassinat
de C.
Castillo Armas en 1957, et sous les divers régimes militaires qui se
succèdent jusqu’en 1985, ainsi que sous les régimes civils de Vinicio Cerezo
Arévalo (1986-1991) et Jorge Serrano Elias (1991-1993), le Guatémala connaît
trente-six ans de guerre civile entre les forces gouvernementales assistées par
les États-Unis et une guérilla pourvue de faibles moyens.
Opérations
génocidaires contre les populations civiles, tortures et disparitions
caractérisent un conflit qui ne s’achève qu’avec les accords de paix signés en
1996 entre le gouvernement d’Alvaro Arzú Irigoyen et la guérilla de l’UNRG
(Union nationale révolutionnaire guatémaltèque) et aura fait plus de 200 000
victimes.
La retour à la paix et à l’alternance démocratique n’a pas éliminé la
culture de violence qui règne dans ce pays (qui, en 1998, connaissait le plus
fort indice de criminalité après la Colombie), la répression dans les campagnes,
l’exclusion des 60 % d’indigènes et les profondes inégalités sociales, tandis
que les terribles crimes commis pendant la guerre civile ont toutes les chances
de rester impunis..
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