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LACAN (Jacques)

Publié le 06/12/2021

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LACAN (Jacques), psychanalyste français (Paris 1901 - id. 1981). Psychiatre [De la psychose paranoïaque dans ses rapports à la personnalité, 1932), il côtoie l'aventure surréaliste et s'engage dans la psychanalyse sous le signe du « retour à Freud ». Dès sa définition (1936) du stade du miroir (étape par laquelle l'enfant, entre six et dix-huit mois, s'appréhende comme sujet autonome en se reconnaissant dans un miroir), son audience déborde largement la thérapeutique, à travers l'enseignement qu'il donne à Sainte-Anne (1950-1962), à l'École pratique des hautes études (1963), dans le cadre de l'École freudienne de Paris (qu'il fonde en 1964 et qu'il dissoudra en 1980), et dont l'essentiel sera publié dans Écrits (1966) puis dans le Séminaire (à partir de 1975). Son système se fonde sur une double proposition : l'inconscient est le discours de l'Autre ; l'inconscient est structuré comme un langage. L'être humain ne se constitue que dans l'Autre et l'objet de son désir est d'abord celui qu'il aperçoit dans l'Autre ; le désir est la pierre angulaire de l'inconscient en ce qu'il est désir d'autre chose : la cause du désir manque et l'objet du désir est primordialement perdu. Lacan reprend la triade freudienne [surmoi, moi et ça) : le surmoi devient le symbolique (lieu de l'ordre, de la loi, du discours paternel, de la culture) — qui inscrit la psychanalyse dans l'anthropologie ; le moi devient l'imaginaire (lieu de la fiction, des « accessoires » de la subjectivité) ; le ça devient le réel (lieu des non-lieux, cause absente de la structure), qui, faute d'être symbolisé, peut faire retour dans la psychose (forclusion). Lacan reformule d'autre part les catégories linguistiques (la transposition, définie comme « glissement du signifié sous le signifiant », rassemble la métaphore et la métonymie) et insiste sur la fonction constituante du signifiant (« le langage est corps ») : le langage troué, lacunaire, « condition de l'inconscient » se lit dans la pratique du temps, dans son rapport à d'autres mots, présents ou absents (c'est la ponctuation, support de la pratique analytique de Lacan). La notion de signifiant, telle que l'entend Lacan (« Ce qui s'énonce bien se conçoit clairement », déclarait-il, en inversant la formule de Boileau), permet de dégager la fonction poétique du rôle ornemental où la tient souvent la critique formaliste, et rend ainsi caduque la dichotomie entre forme et fond, expression et contenu. Aussi comprend-on que la psychanalyse, telle qu'il la conçoit, s'intéresse moins à la littérature (« Pour la psychanalyse, qu'elle soit appendue à l'œdipe, ne la qualifie en rien pour s'y retrouver dans le texte de Sophocle », Littérature, 3, 1971) qu'à la lettre {l'instance de la lettre dans l'inconscient, 1957). Position à la fois littérale et littorale, par laquelle la psychanalyse propose aux textes (et à la critique moderne) de se mesurer à elle, « l'énigme étant de son côté ». D'où la valeur emblématique de sa référence à la nouvelle d'E. Poe la Lettre volée, qui place la lettre (littera) du côté de la rature (litura). Et le fondement équivoque, dans la ligne joycienne, de la littérature par glissement de letter à litter (ordure) — qu'un Beckett assume avec toutes ses conséquences dans un univers humain et langagier du déchet, et de la parole impossible et inévitable.

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