L'abstention est la manifestation d'une crise de la démocratie ?
Publié le 22/05/2020
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L’abstention est la manifestation d’une crise de la démocratie ?
Les jours passent et ne se ressemblent pas… Comme le dit le vieil adage, que l’on pourrait remplacer par « les élections passent et ne se ressemblent pas », traduit bien le contextepolitico-civique que notre Vème République vit depuis maintenant depuis plus de quarante 40 ans.
Les habitudes démocratiques changent et cette institution qu’est le vote soulèveaujourd’hui quelques questions. Institué par l’Article 3 de la Constitution, le vote est l’un des fondements même de notre société.
Cet article constitutionnalise la Souveraineté appartenant au peuple qui l’exerce pour élireses représentants, cette participation légitime la démocratie représentative. Héritage directe des Lumières, réclamé et défendu pour son respect et son égalité entre les citoyens, le vote est aujourd’hui remis en cause et de nombreux citoyens ne passent pas pluspar cette étape fondamentale dans la vie démocratique d’un individu.
Ils ne s’expriment plus par ce biais.
C’est à ce moment que nous parlons d’abstention. Anne Muxel, directrice de recherche au Cevipof, définit l’abstention comme un « non vote » (par opposition au votes blancs et nuls qui sont des « non choix »), l’abstention étant le fait« d’électeurs inscrits sur les listes électorales qui ne participent pas à l’élection ». Le fait d’être inscrit et de ne pas voter traduit-il un désintérêt de la part des électeurs ? Peut-on voir dans l’abstention autre chose qu’un désengagement civique ? Nous étudierons successivement que l’abstention ne peut se limiter à cela et conduit à la réflexion d’une possible crise au sein de l’institution et, pourtant, nous verrons ensuite commentl’abstention peut-être perçu comme une nouvelle forme de civisme dans le jeu politique actuel civique.
I – Un engagement politique qui s’affaiblit, des citoyens de moins en moins concernés ou simplement indécis nous conduisent vers une crise de la représentation
A – La mesure de l’abstention par les instituts de sondage met en relief cette crise
1 – Une croissance de l’abstention constante depuis 1965
Les taux d’abstentions, obtenus grâce aux divers instituts de sondages, sont les indicateurs favoris des analystes et autres acteurs politiques.
En effet, ils permettent de voir rapidementles résultats recherchés. Outre le taux d’abstention lors de la grande élection qu’est la présidentielle, les instituts surveillent également ce taux lors des élections législatives, européenne mais aussi lors deréférendums.
Depuis l’élection de VGE en 1974, le taux d’abstention ne connaît qu’une croissance constante pour connaître une stabilisation en 2007 avec un taux estimé à 16% enmoyenne. Ces chiffres se répercutent également lors d’autres élections : par exemple, le référendum pour le nouveau statut de la Nouvelle-Calédonie a cumulé prés de 63% d’abstentionniste avecun record en 2000 pour le référendum sur le quinquennat avec un taux estimé à prés de 70% d’abstentionnistes. Chez les jeunes, ce sont 34% qui s’abstiennent au 1er tour et 22% au 2ème tour.
Le score est en réalité beaucoup plus inquiétant : 1 jeune sur 2 n’a pas voté en réalité puisque à cela ilfaut ajouter les jeunes non-inscrits sur les listes électorales. Pourtant, il faut regarder ces résultats avec des « pincettes » : les électeurs, en 2002, n’ayant pas voté à toutes les élections est évalué à 13,1%.
Inversement, 87% ont participé à unmoins un des quatre scrutins.
2 – Le développement de l’abstention par intermittence introduit une limite à cette notion de crise
Selon les résultats centralisés par l’INSEE, l’abstention systématique ne représenterait de 1995 à 1997 que 8% des électeurs.
Cela pourrait infirmer l’idée qu’il y est une crise de lareprésentation, c'est-à-dire de la démocratie, car l’abstention intermittente ne se ferait pourtant que lors de réelles indécision au niveau des électeurs.
Pourtant, cette indécision ne peutque traduire une réelle difficulté dans le jeu politique : cette indécision peut s’interpréter par l’absence de candidats suffisamment représentatifs pour représenter la majorité des citoyens. Il est donc nécessaire que tout les citoyens se manifestent et interviennent dans le jeu politique pour faire valoir les décisions et leurs choix.
B – L’abstention, considérée comme un désengagement politique, pourrait se rapprocher en fait d’un « cens caché » et former ainsi un blocage dans la volonté de voter
1 – Le « cens caché » selon Daniel Gaxie
Le cens, c’était cet impôt qui donnait le droit ou non de pouvoir voter au suffrage censitaire.
Il était nécessaire de dépasser un certain seuil pour voter et un autre plus élevé pour êtreéligible.
Daniel Gaxie, professeur de sociologie politique, a voulu mettre en évidence ce comportement de vote intermittent, qu’il a définit comme étant le « cens caché » du vote. Ce « cens caché » est surtout le fait de personnes qui accumulent souvent des problèmes d’intégration sociale, qui se trouvent dans des situations de chômages ou d’emploi précaires.Egalement, l’INSEE déclare que « l’absence de diplôme est le premier facteur de l’abstention durable ».
L’étude réalisée par l’institut prend l’exemple de deux hommes, habitant la mêmecommune et de situation familiale, mais l’un sans diplômes et l’autre diplômé du supérieur.
La probabilité de s’abstenir est pour le premier de 19% et pour l’autre de 1% seulement. Au-delà des soucis d’intégrations et d’emplois, le problème se situe au niveau de l’individu : celui intériorise cette infériorité et s’abstient de voter pour des raisons socioculturelles. Le « cens caché » traduit bien une crise de la démocratie dans le sens où tous les électeurs devraient se sentir légitimes face au vote et ne pas croire en l’existence d’inégalités entreeux.
2 – Un profil sociodémographique de l’abstentionniste de plus en plus inquiétant
Le profil sociodémographique, qui permettait aux instituts de sondages de prévoir les taux d’abstentions, connaît une évolution des plus inquiétantes. En effet, l’abstentionnisme, présent fortement dans les couches sociales les moins aisées, qui subissent des difficultés au niveau de l’intégration sociale dans la société ou dans leurtravail, est un fait qui est plus sensible chez les femmes comparés aux hommes, chez les jeunes, etc.… Mais depuis peu, les couches qui sont considérés comment« participationnistes » tendent à rejoindre les couches classiques d’abstention.
Anne Muxel déclare que cette nouvelle forme d’abstentionniste est difficile à cerner et à prévoir et encoreplus à expliquer sociologiquement. Au final, il existerait deux types d’abstentionnistes : De type sociologique : électeurs qui connaissent des soucis au niveau sociales.
Ils n’ont pas le temps de penser à la politique.
Possible lien entre niveau d’intégration sociale et niveaud’intégration politique De type politique : Ces électeurs sont concernés par la politique et veulent par ce geste envoyés un signe fort politiquement
Si les personnes susceptibles de participer ne participent plus, nous aurions des raisons de nous inquiéter pour la suite de la démocratie en France. Mais nous allons voir que l’abstention ne traduit pas obligatoirement la fin de notre système civique.
II – L’abstention ou l’apparition d’une nouvelle forme d’expression et de civisme A – « L’abstention comme nouvelle forme d’expression politique »
1 – S’abstenir c’est se manifester
Comme nous l’avons vu, l’abstention peut-être le reflet d’une indécision ou même du fait de la non préoccupation du vote par les électeurs.
Mais aussi, l’abstention peut également serévéler comme un signe de militantisme et de manifestation.
L’électeur refuse de voter pour tel ou tel candidat, signale son hostilité vis-à-vis des candidats et voire même l’élection elle-même. Il est observable que la Vème République est le régime que les français affectionnent le plus.
Toutefois, ils mettent en place des formes d’expression protestataires pour manifester leuridée. Selon une étude, pour 62% des français, il est très important et extrêmement important que les électeurs manifestent leurs opinions.
C’est un phénomène que l’on retrouve égalementchez les jeunes.
Les évènements du CPE ont montré que les jeunes étaient conscients de leurs droits. Leurs idées sont passées par la manifestation mais l’ « abstinence électoral » (expression inventée par un membre de la Cause Ouvrière) est également une forme d’expression.
2 – Une crise de la démocratie illusoire
L’abstention est souvent prise comme un échec.
Les citoyens ne participent pas ou plus à la démocratie, ils ne souhaitent plus manifester leurs choix. En réalité, la situation est tout à fait inverse.
Les périodes d’abstentions ne coïncident jamais avec le fait que les citoyens ne manifestent plus lors de grèves ou autres.
Nous sommes àune époque où les manifestations et les grèves font partie de ces moyens d’expressions directe, du citoyen aux gouvernants.
B – « Vers une nouvelle forme de citoyenneté ? »
1 – Une démocratie par le vote qui s’efface
Sommes-nous les spectateurs d’une mutation de l’engagement politique ?.
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