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La seule liberté, les hommes ne la désirent point. La Boétie (Le discours de la servitude volontaire)

Publié le 22/02/2012

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discours
? D'ordinaire, on connaît d'abord La Boétie (1530-1563) pour la célèbre amitié qui l'unissait à Montaigne et que celui-ci, en une formule devenue proverbiale, expliquait ainsi : « Parce que c'était lui, parce que c'était moi. » La Boétie mérite cependant qu'on voie en lui autre chose que le « faire-valoir » de l'auteur des Essais. Personnage à bien des égards exemplaire du XVI' siècle, authentique représentant de l'humanisme renaissant, il nous a laissé un des ouvrages les plus nécessaires peut-être pour la compréhension de notre propre temps : Le discours de la servitude volontaire dont la citation présentée ci-dessus propose le plus bref, mais aussi le plus juste des résumés.
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« «[...] ce seul tyran, il n'est pas besoin de le combattre, il n'est pas besoin de le défaire, il est de soi-même défait,mais que le pays ne consente à sa servitude; il ne faut pas lui ôter rien; il n'est pas besoin que le pays se mette enpeine de faire rien pour soi, pourvu qu'il ne fasse rien contre soi.Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres.

Je ne veux pas que vous le poussiez ou l'ébranliez, maisseulement ne le souteniez plus, et vous le verrez, comme un grand colosse à qui on a dérobé sa base, de son poidsmême fondre en bas et se rompre.

» C'est donc une voie nouvelle hors de la servitude que La Boétie dessine pour nous dans cet ouvrage.

Il n'en appellepas à la révolte armée, au meurtre du tyran, car il sait qu'assassiner celui-ci n'est pas mettre un terme à son règnemais simplement préparer la route à un autre tyran ou, pire, devenir soi-même le double de celui qu'on a défait.

Ceque prône finalement La Boétie, c'est une prise de conscience collective qui, en dehors de toute violence, rendepossible la réforme de la société et prépare le peuple à sa nouvelle liberté.

Avec des auteurs comme Pierre Clastres ou Claude Lefort, la philosophie française contemporaine a redécouvert lavaleur pour notre temps du texte de La Boétie.

Il est vrai que c'est seulement à réintroduire l'hypothèse d'une «servitude volontaire » qu'on peut saisir de larges pans de notre réalité historique : l'adhésion passionnée des foulesallemandes au nazisme, par exemple, ou la solidité des systèmes totalitaires.En France, surtout, nous vivons sur une sorte de mythologie nationale de la liberté qui nous interdit peut-être deprendre véritablement acte de cette indéniable réalité : il n'est pas évident que partout et en tout temps, la libertésoit ce que les hommes désirent avec le plus de force.Tocqueville (1805-1859) déjà nous avait mis en garde, démontrant que la démocratie, minée par l'individualisme,peut devenir le lieu d'une nouvelle tyrannie où les hommes échangent de bon coeur leur liberté contre un peu plusd'égalité et de bien-être.De nos jours, les analystes les plus lucides des sociétés contemporaines ont beau jeu à démontrer que leconformisme — celui des sociétés capitalistes ou communistes — peut être tout à fait lu comme le visage modernede cette servitude volontaire que dénonçait La Boétie.

Ainsi le dissident Zinoviev, dans son ouvrage Le communismecomme réalité (1981), peut de manière tout à fait convaincante avancer que le système soviétique est sans doutele plus solide de tous les systèmes, car c'est celui qui correspond le plus exactement à cette soif de servitude quipossède les hommes et à laquelle il donne le nom de « communautarisme ».

Des tyrannies d'aujourd'hui comme decelles d'hier, La Boétie nous livre la clé qui devrait nous les rendre intelligibles pour mieux nous permettre de nous endéfaire.. »

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