La science permet-elle de connaître la réalité ?
Publié le 17/05/2020
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La science permet-elle de connaître la réalité ?
La science, ou les sciences, de nos jours, semble être la principale source de connaissance, et parce que telle propriété d'une chose (produits cosmétiques, appareilsélectroménagers…) est prouvée scientifiquement, alors on admet que cette chose est efficace.Les sciences sont alors de façon générale synonymes de savoir en général, ou même d'habileté technique.Durant l'Antiquité, les philosophes grecs définissaient les sciences comme étant une connaissance éminente (savoir supérieur), universelle (opposée aux opinionsparticulières) et théorique (différente des « savoir-faire pratiques »).Finalement, au sens spécifique du terme, les sciences désignent un ensemble de méthodes et de connaissances reposant sur des critères précis de vérificationexpérimentale et permettant une objectivité des résultats.Dans la question posée, on cherche à savoir si les sciences sont capables de nous faire connaître la réalité, Toute la réalité.Après avoir étudier la réponse affirmative à cette question, nous verrons qu'il n'est pas possible de connaître vraiment la réalité à travers les sciences.
Enfin, nousessaierons de répondre à la question en donnant la réponse la plus juste possible.
1°) La science permet de connaître la réalité
Tout d'abord, la science dans son unité ramène à la similitude des méthodes qu'elle emploie, mais il faut certainement parler des sciences au pluriel car les méthodesde la science s'emploient sur des domaines différents : la physique pour le mouvement et l'espace, la chimie pour la qualité des choses et des substances, l'astronomiepour les corps célestes, la biologie pour les êtres vivants, etc.Mais toutes ces sciences reposent sur un principe fondamental qui est de vérifier toutes les hypothèses que l'on propose.Les sciences recherchent l'objectivité des phénomènes, en étant détachées de tout point de vue personnel.Ainsi, toutes les théories scientifiques sont vérifiées de façon strictes, et donc elles permettent de connaître de façon claires et précises tous les phénomènes qu'ellesdémontrent.
Beaucoup de savants, de scientifiques et d'épistémologues pensent que l'ensemble du réel est déterminé, c'est-à-dire que le hasard n'existe pas.
Les choses etphénomènes se déroulent de manières causales, c'est-à-dire que tout phénomène à une cause, et à un effet, et cela à l'infini, dans le passé comme dans le futur.
Le réelentier apparaît donc comme un ensemble de mécanismes qui s'enchaînent continuellement découlant des uns et provoquant les autres.
Et ce que les sciencesconsidèrent d'autre part, c'est que les mêmes causes entraînent les mêmes effets et que des circonstances différentes entraînent des conséquences différentes.Ainsi, si le réel est déterminé, qu'il obéit à des lois qui permettent de calculer et de prévoir, alors on peut prévoir les phénomènes, et si on peut les prévoir c'est qu'onles connaît.D'autre part, la raison humaine n'admet que les choses puissent sortir de rien, et donc il y a nécessairement quelque chose plutôt que rien et que les choses sontdisposées ainsi plutôt qu'autrement.
Il ne peut pas y avoir de réel, puis du néant, et du néant puis du réel.Mais la science ne permet pas seulement de prévoir, elle permet aussi de savoir, donc la science permet donc de connaître le réel.
On peut aussi affirmer cela en partant de la définition même d'un fait scientifique.
C'est un fait objectif donné par la nature dont la théorie scientifique est lareprésentation intellectuelle.
Et cette représentation intellectuelle s'accompagne d'une modélisation du phénomène, qui le décrit de la façon la plus concrète possible.Mais ce schéma peut parfois être éloigné du phénomène qu'il cherche à décrire.
Ainsi, s'il advient que le schéma est remis en cause, c'est que l'observationpréalablement faite est sûrement incorrecte, un nouveau schéma sera alors élaboré en fonction duquel la science reconstruira le réel.De ce fait, la science essaye de décrire de la façon la plus exacte possible le réel.Le principe de modélisation analytique renvoie aussi à cette idée.
Descartes parlait de « diviser chacune des difficultés qu'on examine en autant de parcelles qu'il sepeut et qu'il est requis pour mieux les résoudre ».
Ce principe signifie en fait que l'on peut décomposer la réalité connaissable et observable en parties connaissables.De là on étudie chaque morceau, chaque partie, puis on les recompose pour connaître la réalité entière.
Enfin, on peut dire que si la science ne peut répondre à certaines questions, c'est parce que ces réponses présupposent l'existence de choses qui ne sont pas réelles.En effet, le monde dans lequel nous vivons est matériel et soumis à des lois qui préfigurent que tout à un rapport de causalité, même l'esprit humain, au sujet duquelon pourrait prétendre qu'aucun déterminisme ne s'exerce sur lui.
Mais en réalité, et Spinoza le soulignait déjà dans Ethiques (« l'homme n'est pas un empire dans unempire »), l'esprit humain est une « création » de la nature, il appartient à cette nature, et donc est nécessairement soumis à ses lois.Ainsi le réel est donc purement matérialiste et les sciences, en ce sens, peuvent résoudre toutes les questions le concernant, à travers leurs méthodes.
Les questions ausujet desquelles la science n'a pas réponse sont peut-être sans intérêt ou mal posées.
2°) La science ne permet pas de connaître la réalité
Piaget identifie le principe d'inséparabilité qui montre que c'est l'interaction entre le phénomène à connaître et le sujet connaissant qui forme la connaissance.
Ainsi,la connaissance que ce sujet construit par son expérience dresse en même temps le mode de construction de la connaissance.
En réalité, le sujet ne connaît pas lesphénomènes vraiment, mais plutôt l'acte par lequel il le perçoit.Comme dit Bachelard, « Rien n'est donné, tout est construit », c'est-à-dire que le sujet se construit la connaissance de ce qu'il voit par des représentations qu'il a lui-même choisies.Donc au final, la science ne nous fait connaître les phénomènes que de la façon dont ils nous apparaissent, et non de la façon dont ils sont réellement (il y a alorsremise en cause de l'objectivité de la science).
La science étudie les phénomènes tels qu'ils nous apparaissent, c'est-à-dire sous une forme déterminée par notre propre structure.
C'est parce que notre sensibilités'organise à partir de l'axe spatio-temporel et que notre entendement s'établit autour du principe de causalité que les phénomènes nous apparaissent localisés dansl'espace et se succédant temporellement de manière causale.
En réalité la science ne permet pas vraiment de connaître la réalité.De plus, en reprenant le principe de causalité, si toute chose à une cause, il faut alors remonter à cette cause qui en a elle-même une, alors il faudrait qu'il y ait unecause première, sauf que nous ne connaissons pas cette cause première, il y a alors un « trou » au niveau de la connaissance de la réalité…nous sommes ici dans l'idéeque finalement la nature n'est peut-être pas déterminée.Et cet indéterminisme se retrouve avec l'idée que des phénomènes avec des propriétés nouvelles apparaissent constamment, et que donc s'il y a du nouveau, c'estqu'un effet est un peu plus que sa cause, et s'il est un peu plus que sa cause, c'est qu'il est partiellement sans cause.
Et certains de ces phénomènes ne sont pas encoreconnus (observés, mais pas connus !).
de ce point de vue, la science ne permet pas de connaître toute la réalité.
La science rencontre des obstacles épistémologiques, car les concepts scientifiques ne sont jamais donnés, mais toujours produits ou élaborés.
Hormis les obstaclesexternes (complexité des phénomènes, faiblesse des sens…), il y a des obstacles inévitables à l'acte même de connaître comme le souligne Bachelard.Le premier obstacle que rencontre le scientifique est celui que Bachelard appelle l'expérience première, c'est l'obstacle du sensualisme (ou empirisme naïf).
Cetteexpérience première « prétend recevoir directement ses leçons d'un donné clair, net, sûr, constant, offert à un esprit ouvert ».
L'observation première se présente defaçon claire, concrète et précise, et dans ce sens, le scientifique croit connaître le phénomène.
Ainsi cette expérience première s'oppose à l'expérimentation, quidemande une critique et exige une rupture psychologique avec l'observation première.Deuxièmement, le scientifique rencontre l'obstacle verbal, c'est-à-dire qu'avec un simple mot, il croit « exprimer les phénomènes les plus variés.
Ces phénomènes, illes exprime et croit donc les expliquer, il les reconnaît et croit donc les connaître.
En réalité, cela cache une certaine ignorance des phénomènes.
Molière l'avait vuavant Bachelard et se moquait bien des médecins qui, en employant des mots sophistiqués, laissaient penser qu'ils étaient savants alors qu'ils ne connaissaient rienaux maladies.Troisièmement, l'obstacle de la connaissance générale (qui est une généralisation du précédent) et la recherche du général ont constitué un obstacle au progrès de laconnaissance scientifique du réel dans la mesure où une connaissance générale est presque toujours une connaissance vague, voire incorrecte..
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