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La pauvreté hérétique : interrogatoire à l'Inquisition de Bologne (9 décembre 1303) - histoire des religions

Publié le 15/05/2020

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« La pauvreté hérétique : interrogatoire à l'Inquisition de Bologne (9 décembre 1303) - histoire des religions Accroche :Le texte présenté est le parfait exemple d'un interrogatoire mené par l'Inquisition au XIIIe siècle.

Il expose alors la vision de l'Eglise et du clergé qu'ont certains laïcsadeptes de la pauvreté évangélique.Nature du texte :Ce document est un compte-rendu de la première injonction (convocation) de l'interrogatoire de Bologne du 9 décembre 1303.

Il fut mené par le Frère Guido deVicence, dominicain de l'Ordre des Prêcheurs, ceci s'occupe entre autres de l'inquisition depuis la bulle du pape Grégoire IX, « Excommunicamus » en 1223.

Cetteinterrogatoire est à l'encontre de Zaccaria, un simple laïc suivant les préceptes de Segarelli de Parme et de son successeur Dolcino de Novare, connus sous le nom d' «apostoliques » ou de « pauvres du Christ » et condamnés depuis 1286.On ne connaît pas l'identité du scribe qui a notifié l'interrogatoire.

Ce rapport est d'une grande utilité pour l'inquisition dans le but identifier, et comprendre l'hérésieafin de pouvoir lutter plus efficacement contre elles.Depuis la fin du XIIème siècle, l'Eglise est particulièrement attentive à toutes sortes de manifestations dissidentes qui pourraient remettre en cause son pouvoirspirituel comme son pouvoir temporel.

Avec la lutte contre les Albigeois, puis les Vaudois, la prolifération de ces mouvements est très complexe à contenir.

Le papeBenoit XI, élu depuis octobre 1303, était à l'origine maître de l'Ordre des Prêcheurs.

Il se retrouve dans une situation délicate entre la diplomatie critique avec laFrance et la constance multiplication des élans laïc.

Ces mouvements sont rapidement jugés hérétiques et pourchassés par l'inquisition afin de les remettre sur le droitchemin.

Parmi ces hérésies, beaucoup sont, comme le dit le texte « des pauvres hérétiques ».

Le clergé estime qu'il y a bien assez d'ordres mendiants avec lesdominicains, les franciscains, les Carmes et les Augustins.Le texte pose donc une problématique fondamentale :Pourquoi et comment l'Eglise lutte-elle contre la multiplication des mouvements de pauvreté hérétique, ceci vu à travers un compte rendu inquisitorial ?Annonce du Plan :Afin de comprendre ce texte dans toute son ampleur, nous allons voir dans un premier temps l'hérésie des pauvres apôtres, puis les croyances qui découlent de cemouvement et enfin le pouvoir de l'inquisition.I- Les pauvres apôtresII- Croyances hérétiquesIII- L' Inquisition, un nouveau pouvoir I- Les pauvres apôtres 1) Sigarelli : le début d'une hérésie Le groupe des Apostoliques, pauvres du Christ ou encore Frères Apôtres, prend naissance à Parme en 1260 autour de Gherardo Segarelli (que l'on retrouve ligne 12et 15).

Celui-ci vend ses biens, distribue l'argent aux pauvres (aux passants selon Salimbene), et vit de mendicité.

Il entend revenir à une conception de l'égliseprimitive (que l'on voit ligne 22 « observer la pauvreté, de tout vendre et de donner aux pauvres, de ne pas avoir ni posséder de bien propres »).

Cela n'est pas sansrappeler l'histoire de Pierre Valdo.

Ils suivent les principes des ordres mendiants et ont une vision empreinte de Joachim de Flore comme la théorie des « quatre âges» ligne 29, dont l'influence est immense dès le XIIIe siècle.

Joachim a également prophétisé la fin du monde pour 1260, cela coïncidant avec une épidémie qui frappal'Italie en 1259, le mouvement de Segarelli eut beaucoup de succès et les disciples ne manquèrent pas.

Après le concile de Lyon, beaucoup de mouvements sesoumirent à la décision des cardinaux, mais les Frères Apôtres l'ignorèrent car ils ne reconnaissent que l'autorité du Christ.

Ils rejettent toute obéissance au papedepuis que l'Eglise a renoncé à observer la pauvreté (ligne 35 « L'Eglise de dieu commença à avoir des possessions et des biens propres »).

Il eurent un succès telqu'ils recevaient plus d'aumônes que les Franciscains et les Dominicains.

L'inquiétude monta et en 1286 Honorius IV condamna la communauté.

Cela dit, c'estseulement en 1300 que Segarelli est traduit devant un tribunal d'inquisition puis brûlé comme hérétique. 2) La relève de Dolcino : une montée de l'anticléricalisme Dulcino ( que l'on trouve ligne 13, 17, 54 et 59) prit alors le relais.

Il serait le fils naturel d'un prêtre du diocèse de Novare.

Séduit par l'idéologie des Frères Apôtres,il aurait quitté le couvent des Franciscains pour rejoindre Sigarelli.

Après l'emprisonnement puis la mort de ce dernier, les persécutions des inquisiteurs dispersèrentles pauvres du Christ.

On voit apparaître cette notion dans le texte ligne 8 « sauf aussi qu'il n'a pas l'intention ni vouloir d'accuser ou dénoncer des personnes qui luiauraient donné à manger ou à boire ou qui l'auraient accueilli, lui et ses semblables ».

On peut y percevoir une traque inquisitoriale que l'on trouve également ligne 40à 45 « pour l'avoir capturé et poursuivi ».

Mais Dulcino est parvenu à les regrouper en envoyant trois lettres, dont l'existence est connue grâce à l'inquisition.

Lapremière lettre fut envoyée en août 1300, juste après la mort de Segarelli.

Il s'y présente comme l'élu de Dieu et rappelle tous les frères de rejoindre la communautécar Dieu les a choisis pour sauver l'humanité.

Il affirme même que leurs persécuteurs, les Franciscains comme les Dominicains ainsi que tout le clergé séculier sontdes serviteurs de Satan.

On peut ainsi voir que Dolcino durcit la visions des Frères Apôtres et la rend foncièrement anticléricale.

Ce n'est pas la même communautéque celle de Segarelli.

La vision de Dolcino fait évoluer les préceptes des « apostoliques », il transmet aussi tout un regroupement de prédictions comme «l'avènement de l'état de pauvreté » (ligne 56) dont il désire ardemment la réalisation.

Il considère que cela ne pourra arriver qu'après la destruction de l'Eglise, qu'ilconsidère comme foncièrement mauvaise contrairement à la ligne 50 à 51 « Interrogé si l'Eglise romaine est bonne ou mauvaise, il a répondu qu'il la considère et tientpour bonne ».

Peut-être avait-il une vision légèrement différente des Pauvres Apôtres, ou qu'il craignait de dire toute la vérité sur des points aussi sensibles.L'activité de Dulcino s'étendait surtout en Lombardie, il n'est donc pas étonnant de lire dans le document ligne 4 « mandé par le siège apostolique dans la province deLombardie ».

Les prophéties messianiques de Dulcino gagnèrent chaque jour un nombre considérable de pactisants.

En raison des proportions prises par lemouvement, le pape Clément V déclencha une croisade contre les Apostoliques qui fut confiée à l'évêque de Verceil, afin de combattre les idées et la théologie decette hérésie. II- Croyances hérétiques 3) Volonté de retour à la pureté de l'évangile Depuis le XIIe siècle, on peut percevoir de la part des laïcs, un véritable désire de retrouver la pureté évangélique et les principes des apôtres que transmet la bible.Une vie de pauvreté choisie, de mendicité, faite de prière et de prédication.

C'est grand principe repris par les ordres mendiants comme les Dominicains ou lesFranciscains qui semblent connaître un véritable relâchement depuis la mort de leurs fondateurs (comme il est dit de la ligne 39 à 41 « mais il ne croit pasqu'aujourd'hui l'état desdits frères mendiants ait conservé la même perfection de bonté qu'au temps desdits Dominique et François ») .Les Franciscains par exemple se déchirent entre deux divisions « la communauté » et les « spirituels ».

Les Dominicains eux, en revanche, représentent, depuis 1233,l'inquisition qui fit un début fracassant, utilisant des méthodes sanguinaires avec sans doute un trop plein de zèle.

Car certains aboutissent à la conclusion qu'il valaitmieux sacrifier cents innocents que de laisser échapper un seul coupable.

Certains monastères dominicains subirent des attaques venant des habitants du voisinage.Tout ceci pousse certainement les laïcs à pratiquer l'ascèse selon leurs propres conceptions.

C'est ainsi que naquit les Boscarioli, ou les Saccati.

Salimbene, unchroniqueur franciscain du XIII a écrit « Nous et les frères prêcheurs avons appris aux hommes à mendier ; aussi à présent, n'importe qui se met un capuchon demoine sur le tête et cherche à fonder un ordre mendiant » cela illustre à la perfection le phénomène.Ainsi, ce Zaccaria suivit les principes des Pauvres Apôtres enseignés par Dolcino de Novare ou comme les très célèbres inquisiteurs Bernard Gui le nomme le «continuateur de l'hérésiarque Gherardo Segarelli ».

Comme beaucoup de mouvements de l'époque, il s'agit de suivre une vie de pauvreté volontaire, de mendicité, deprière, et de répande la bonne.On peut voir chez l'accusé une réelle conviction de foi dans ce mouvement puisque si l'on en croit la ligne 12, il a déjà abjuré « la doctrine, croyance, vie et secte deGerardo Segarelli » et qu'il admet y être retourné car selon lui « il croyait mieux faire en observant la vie desdits apôtres qu'en ne l'observant pas » (Ligne 19).Il faut rajouter à cela, que les Franciscains ne sont pas les seuls à voir d'un mauvais œil la prolifération de ces « ordres mendiants ».

Le Pape Grégoire X fit adopter,. »

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