La mondialisation de l'économie n'est pas synonyme d'abolition des territoires
Publié le 09/09/2020
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«
La mondialisation de l’économie n’est pas synonyme d’abolition des territoires
Le monde est passé au cours du dernier quart du XXe siècle d’un système
économique international à un système économique « global ».
Il s’agit d’une
mutation géopolitique majeure des conditions de production, de compétition et
d’interdépendance.
Le vieux régime international était caractérisé par la
souveraineté des États, qui définissaient, entre autres, leurs politiques
monétaires et douanières.
Celui qui lui succède est un ordre global diffus où
les relations entre les États s’estompent dans une certaine mesure, au profit de
connexions entre des économies régionales éloignées, reliées entre elles par des
échanges complexes faits de compétition et de collaboration.
Certes, le temps des nations n’est pas fini, les États jouent toujours un rôle
crucial dans beaucoup de domaines, mais, pris entre échelon local et global,
leur place dans l’économie se redéfinit.
On assiste d’une part à un mouvement «
vers le haut », celui de l’internationalisation de l’activitééconomique dans un
monde de plus en plus dépourvu de frontières, au point que certains n’hésitent
pas à avancer l’hypothèse d’une prochaine disparition de l’État souverain
classique fondé sur la notion de territoire.
D’autre part, glissement « vers le
bas », on souligne l’intensification de la croissance économique d’un certain
nombre de régions, reconnues comme les moteurs de la prospérité mondiale, et qui
donne lieu à une recomposition de la hiérarchie des espaces productifs.
Ces
régions sont principalement métropolitaines.
Le produit de l’agglomération de
Tokyo est le double de celui du Brésil.
Celui de Chicago équivaut à celui du
Mexique, dont la moité est concentrée à Mexico.
Globalisation ne signifie donc
pas homogénéisation de l’espace mondial, mais, au contraire, différenciation et
spécialisation.
Des grands pôles se sont constitués, formant une économie en «
oasis », ou en « archipels », c’est-à-dire un réseau des régions les plus
dynamiques, qui laissent derrière elles le reste du monde.
Les territoires ont le vent en poupe
Les régions, ou encore mieux les territoires, sont ainsi devenues les sources
d’avantages concurrentiels.
Au cours des années 1970 et 1980, les États ont
connu une aggravation de leurs déficits publics qui les a incités à mener des
politiques de décentralisation.
La gestion de nombreux biens collectifs locaux,
tels que l’éducation, la formation, les infrastructures de transports, les aides
sociales, a alors été fréquemment régionalisée.
Ce fut l’occasion de découvrir
que la densité des relations entre les acteurs locaux (entreprises, universités,
collectivités territoriales, syndicats, etc.) peut jouer un rôle déterminant
dans la compétitivité des activités économiques [voir « Les pouvoirs locaux
s’affirment, y compris sur la scène internationale »].
Les districts industriels - un concept introduit au début du XXe siècle par
l’économiste britannique Alfred Marshall - sont désormais de retour aussi bien
sur le terrain que dans les analyses.
Ces lieux ont une caractéristique interne,
une « personnalité régionale », comme disait jadis Paul Vidal de La Blache
(1845-1918), l’un des pères de la géographie française.
Leur spécificité découle
d’une capacité, souvent héritée d’une culture ancienne, à négocier des modes de
coopération entre capital et travail, entre grandes entreprises et
sous-traitants, entre administration et société civile, entre banque et
industrie, etc.
Comme le note l’économiste français Alain Lipietz, en
Émilie-Romagne ou dans le Bade-Wurtemberg, deux pôles de croissance économique,
la stratégie du Parti communiste italien (PCI) comme de la démocratie chrétienne
allemande (CDU) a consisté à rechercher le meilleur compromis social là où il
était possible de le négocier, c’est-à-dire au niveau local : les hauts
salaires, l’amélioration du cadre de vie, la qualification de la main-d’ œuvre
sont la contrepartie de la compétitivité des entreprises de ces régions.
Une nouvelle géopolitique de la production.
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