La magie du « mot » dans la phrase littéraire. Essayez d'en rendre compte par des exemples empruntés à des textes étudiés en classe ?
Publié le 08/12/2021
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(L'Aigle du Casque) A la base de ces suggestions se trouvent généralement : 1) une association d'idées : par exemple le son du cor évoquant pour Vigny la mort héroïque de Roland (Le Cor); ou « le bois retentissant sur le pavé des cours » devenant pour Baudelaire, dans Chant d'Automne : un échafaud qu'on bâtit, une tour qui succombe sous les coups du bélier, un cercueil qu'on cloue... Les mots employés dans le texte devront donc être aptes à autoriser ces passages et à les susciter. On peut même ne pas donner l'explication du transfert pour n'en décrire que le résultat. C'est ce qui arrive dans l'impressionnisme de sensations où l'écrivain ne consigne que l'interprétation première de sa perception. Ainsi Mallarmé décrivant les vitres de sa fenêtre au petit jour : Noire, à l'aile saignante et pâle, déplumée, Par le verre brûlée d'aromates et d'or... L'aurore se jeta sur la lampe angélique... L'association d'idées peut avoir également lieu ENTRE l'acception courante du mot et son sens étymologique, le mot Occident représentant pour Lamartine la mort du soleil et sans doute l'effroi d'une mort cosmique, ou l'eau scrupuleuse de Valéry nous amenant à penser au sens du mot latin scrupulum : petit caillou; 2) ou encore un simple glissement de sens comme dans la métonymie, d'un si large emploi : Une clef vigilante a pour cette journée Dans le cèdre enfermé sa robe d'hyménée Et l'or dont au festin ses bras seraient parés... ou bien encore une comparaison ou une métaphore, c'est-à-dire une association d'idées, mais plus spécialisée, par contiguïté ou par ressemblance. Ainsi pour Vigny, la nuit : Jette son manteau noir sur le bord des rivages Et des fleurs de la nuit entrouvre la prison. 3) Un degré plus haut, et nous aurons une analogie, c'est-à-dire non plus une ressemblance physique, mais une similitude de rapports; et l'on arrive au symbole tel que les romantiques l'ont pratiqué avec plus ou moins de discrétion, le poète devenant successivement pélican (Musset), scorpion (Vigny), pin des Landes (Gautier), etc.
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La magie du « mot » dans la phrase littéraire.
Essayez d'en rendre compte par des exemples empruntés à des textesétudiés en classe.
Introduction :a) Les arts de littérature s'expriment par des mots, enchaînés dans des phrases, comme la musique par les notes de la gamme, lapeinture par le dessin et les couleurs.b) D'où l'intérêt d'étudier le mot en lui-même, comme support de la pensée,c) pour discerner la pluralité — quasi miraculeuse — de ses utilisations, et les conditions de cette magie verbale.
I.
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Polyvalence directe du mot :
C'est qu'un mot — quelle que soit sa nature : nom, adjectif, verbe, adverbe, etc.
— peut être doué d'une quadruple valeur :intellectuelle, sensorielle, sentimentale ou musicale.
a) Valeur intellectuelle.
Il est d'abord toujours porteur d'un message pour l'intelligence.
Ainsi, lorsque nous lisons ces vers duPauvre Diable :L'Abbé Trublet avait alors la rage D'être à Paris un petit personnage; Au peu d'esprit que le bonhomme avait L'esprit d'autrui parsupplément servait...nous saisissons immédiatement les idées du texte; nous savons de qui il s'agit, en quel lieu il est, quelles sont ses occupations et enquelle estime le tient Voltaire.
b) Valeur sensorielle.
Souvent aussi le mot nous permet de nous représenter une image, en l'absence de l'objet.
On dit que nous «imaginons », en fonction d'un quelconque de nos sens, mais plus particulièrement en fonction de la vue.
Comment, en effet, ne pas« imaginer » Perrette, sur ce début de fable :
Perrette, sur sa tète ayant un pot au laitBien posé sur un coussinet, Prétendait arriver sans encombre à la ville.Légère et court vêtue, elle allait à grands pas, etc..
mais trois vers sur quatre seulement ont cette valeur descriptive.
Le vers 3, qui semble une réflexion d'auteur, reste purement devaleur intellectuelle et explicative.
c) Valeur sentimentale.
Lié ou non à ces deux premières valeurs, un mot peut encore prendre une valeur affective agréable oudésagréable.
Les mots triste, tristesse, tristement, mélancolique, martyr, etc.
ont directement une telle teneur.
Certains écrivains secaractérisent par le fait qu'ils aiment écrire dans telle tonalité plutôt que dans telle autre : si Victor Hugo, Chateaubriand, leFlaubert de Salammbô, insistent sur le registre sensoriel, Rousseau, Lamartine, ne donnent bien souvent à notre esprit que ceretentissement sentimental dont nous parlons, comme le montre cette période tiréed'une lettre de Rousseau à M.
de Malesherbes :« Quand mes douleurs me font tristement mesurer la longueur des nuits, et que l'agitation de la fièvre m'empêche de goûter un seulinstant de sommeil, souvent je me distrais de mon état présent, en songeant aux divers événements de ma vie; et les repentirs, lesdoux souvenirs, les regrets, l'attendrissement se partagent le soin de me faire oublier quelques moments mes souffrances ».
d) Valeur musicale.
Enfin, en liaison le plus souvent avec son sens, mais aussi quelquefois avec ses sonorités (par exemple syllabelongue ou brève, ou bien voyelle ouverte ou fermée) chaque mot est doué d'un pouvoir musical, lui aussi agréable ou désagréable,donc très propre à marquer tel ou tel sentiment.
Le vocabulaire qu'on a qualifié, d'une façon peut-être exagérée de poétique :azur, onde, cavale, céruléen, possède souvent cette puissance incantatoire.
Et tout le monde connaît le fameux sonnet deMallarmé auquel l'accumulation de mots àsonorités en i confère un aspect « constrictif » :
Quand du stérile hiver a resplendi l'ennuiou ce vers crispant, tiré d'un autre sonnet du même auteur :Aboli bibelot d'inanité sonore,crispant, car tout entier fondé sur de subtiles dissonances..
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