La légitimité
Publié le 22/05/2020
Extrait du document
«
Introduction :
Dans le contexte de l’abdication du roi Juan Carlos I en Espagne en juin dernier, la réflexion autour de la légitimité
s’inscrit dans un mouvement de contestation de la monarchie absolue, de l’autorité politique sans fondement jugé
valable.
En doutant du caractère héréditaire et incontestable d’un pouvoir, on questionne le caractère de fait d’une
autorité, c’est-à-dire on recherche les éléments d’une légitimité.
En effet, la légitimité est ce qui désigne ce qui est
fondé en droit, en justice, en équité.
C’est lorsque le conflit principal ne se situe plus entre un souverain et un
usurpateur, mais entre gouvernants et gouvernés que la question de la légitimité se pose.
Discuter la légitimité,
c’est s’interroger sur les fondements d’une allégeance.
(…)
Néanmoins, on peut se demander si ces fondements sont clairement définis ou s’ils doivent être recherchés.
La légitimité doit-elle être reconnu ou s’impose-t-elle comme une évidence ?
Plan :
I – Le distinction entre la légitimité et la légalité.
Tout d’abord, il convient de préciser que ce qui est légal n’est pas forcément juste, donc la loi n’est pas nécessairement légitime.
En
effet, le légal désigne ce qui est prévu et conforme à la loi, la législation.
Il s’agit d’une convention écrite qui résulte d’un consensus,
d’une volonté rationnelle de s’accorder, de définir des principes moraux communs.
On parle d’un droit positif qui s’appuie sur les
droits naturels et défend les droits fondamentaux (liberté, égalité, sécurité).
Cependant, les législations ont un caractère relatif, on
retiendra la phrase de Pascal : « Vérité au-deçà des Pyrénées, erreur au-delà ».
Au contraire, la légitimité désigne ce qui est conforme au droit, à la justice ou à l’équité.
Ainsi, la légitimité vise l’universel, une
morale valable qui échappe aux contextes, aux devenirs, aux aléas, et qui ne relève pas de la temporalité quotidienne.
Le critère de la
légitimité doit transcender parce qu’elle est fondée sur une nature humaine immuable.
La légitimité est indissociable d’une
justification, qui dépasse la simple conformité.
Par conséquent, légalité et légitimité ne coïncident pas toujours.
C’est le cas de la loi
injuste, à l’exemple des lois antisémites du régime de Vichy en 1940.
Dans ce cas, il est légitime de ne pas respecter la loi et de se
révolter face à une autorité arbitraire.
Un autre exemple pourrait être le cas d’Antigone qui désobéit à la loi de Créon en donnant une
sépulture à son frère.
Elle enfreint alors le droit au nom de la justice : son action est illégale mais légitime.
De plus, il ne suffit pas de tenir compte de la morale.
Parfois, les lois sont trop générales et ne tiennent pas assez compte des
particularités.
C’est la définition de l’équité selon Thomas d’Aquin.
Ainsi, il faut peut-être adapter la sanction pour une mère qui vole
pour nourrir son enfant.
Lorsque la légalité correspond à la légitimité, cette dernière se fonde alors sur la raison.
Selon Platon, la raison, la
vérité, appartient aux philosophes.
Ainsi, le seul pouvoir qui peut être légitime est celui des philosophes rois, qui
sont les sages capables d’assurer la gouvernance de la cité.
On aboutit alors à une rationalisation de la légitimité.
Advient alors un débat sur la gouvernance, sur la manière de gérer, d’administrer, si la conformité aux lois ne suffit
plus à assurer la légitimité ? La légitimité exprime l'adhésion profonde de la population à la manière dont elle est
gouvernée.
II – L’idéal démocratique de la légitimité.
En s’appuyant sur cette distinction entre légal et légitime, Rousseau définit la légitimité politique à travers le projet
idéaliste du Contrat social.
Il s’agit d’un ordre politique fondé sur l’accord au sein d’une communauté d’individus
libres.
Tous les individus s’accordent pour accepter la renonciation à leurs droits naturels au profit de l’Etat, qui, en
échange, assure la protection de ces individus, en conciliant égalité et liberté.
Ainsi, le peuple tout-puissant
sauvegarde le bien-être général contre les intérêts individuels.
Dans cette optique, la légitimité repose sur la volonté
de vivre-ensemble dans les meilleures conditions, même si cela requière des compromis.
Dans notre société actuelle, la démocratie apparaît comme l’idéal de la légitimité.
En effet, dans une démocratie,
les représentants politiques tirent leur légitimité de leur élection.
Celles-ci permettent alors d’aboutir à un
consensus social.
Cependant, cela ne suffit pas à obtenir une légitimité sans faille.
Un pouvoir légitime doit servir
l’intérêt général et rester au pouvoir.
Pour cela, des contrôles démocratiques sont mis en place, de façon à assurer
conjointement l’impartialité, la réflexivité et la proximité, à travers des institutions.
On peut prendre l’exemple du
Conseil constitutionnel en France, qui peut faire obstacle à l’application d’une loi s’il la juge contraire à la
constitution.
Ainsi, ce qui fait la légitimité d’un pouvoir, c’est le fait qu’il résulte d’un consensus et qu’il puisse
être régulé.
Dans cette hypothèse, se pose la question de la violence légitime.
En effet, le peuple renonce à ses droits naturels en contrepartie d’une
garantie de l’Etat de lui apporter, entre autres, la sécurité, ce qui peut impliquer l’usage de la violence.
Dans ce cas, pourrait-on dire
que la force physique tant blâmée peut être justifiée ? Ainsi, selon Weber, l’Etat est alors l’institution détenant le monopole de l’usage
légitime de la violence, cela fait partie de ses prérogatives légales et de ses devoirs.
Toutefois, toute violence autre que celle de l’Etat.
»
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