La Fontaine: Les longs ouvrages me font peur, Loin d'épuiser une matière, Il n'en faut prendre que la fleur. Qu'en pensez-vous ?
Publié le 19/12/2021
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«
La Fontaine: Les longs ouvrages me font peur, Loin d'épuiser une matière, Il
n'en faut prendre que la fleur.
Qu'en pensez-vous ?
I.
Aux ouvrages de longue haleine, il préfère les petits poèmes.
1.
La fable est bien le genre qui lui convenait : « Diversité est sa devise.
» Ce genre lui
permet d'adopter successivement et sans s'y attarder, tous les tons : telle fable est un
drame ou une comédie, telle autre un fragment d'épopée ou une élégie, etc.
Toutes sont
parfaites en leur genre, parce que toutes donnent l'impression de quelque chose de fini,
d'achevé, à quoi on ne saurait rien souhaiter.
De plus, poète éminemment « personnel »,
il peut, dans la fable, plus que dans tout autre genre, se révéler tout entier, nous faire
des confidences, nous dire ses joies, ses voeux, ses regrets.
2.
Comme pour ses contemporains, la règle suprême, la règle de toutes les règles, c'est
de plaire.
Or, comment plaire quand on s'ennuie soi-même ? Il se sentait peu fait pour le
genre sérieux.
Son poème sur la captivité de Saint-Marc est un vrai pensum.
Ses
comédies sont légères, spirituelles, gracieuses, mais sans profondeur.
Il ne sait pas
animer des personnages distincts de lui.
Son roman, Psyché, est plein de charmes, mais,
sans doute, il n'aurait eu ni le souffle ni le courage nécessaires pour composer en vers
une oeuvre aussi longue.
II.
C'est, d'ailleurs, chez lui, un principe.
« Loin d'épuiser une matière,...
»
Quelque matière qu'il traite, il n'en prend que la fleur.
On trouve chez lui cette
élégante brièveté qu'il loue dans Phèdre et qui consiste à dire tout ce qu'il faut
et rien que ce qu'il faut.
1.
Soit qu'il peigne l'extérieur des animaux, soit qu'il décrive un paysage, quelques traits
lui suffisent, quelquefois un seul mot : {Le moindre cent qui d'aventure fait rider la face
de Veau...
L'onde était transparente, ainsi qu'aux plus beaux fours...
Le héron au long
bec emmanché d'un long cou...
Un saint homme de chat, bien fourré, gros et gras).
Comparer avec Buffon.
2.
Même discrétion dans ses confidences.
Il sait les mots qui évoquent tout un état d'âme
et qui font rêver : Solitude où je trouve une douceur secrète.
(XI-4.) ...
Ai-je passé le
temps d'aimer? (XI-2.) Comparer avec les effusions sans fin des Romantiques.
3.
On trouve dans les fables la peinture complète de la société du temps, mais au lieu de
procéder par tableaux ou portraits comme La Bruyère, il use seulement de comparaisons
ou d'allusions : Je suppose qu'un moine est toujours charitable.
(VII-3).
De même pour
les courtisans, les bourgeois, les médecins...
La satire, chez lui, est toujours légère et
malicieuse : c'est le serpent que je veux dire et non pas l'homme.
(V-16.)
On voit en quoi consiste cette méthode et comment il l'a appliquée.
L'art de La Fontaine
est délicat, tout en nuances; on peut le préférer non seulement à l'abondance stérile d'un
Scudéry, mais à la magnificence orgueilleuse des Romantiques..
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