La fin de la Guerre froide a modifié la carte mondiale du crime organisé
Publié le 09/09/2020
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La fin de la Guerre froide a modifié la carte mondiale du crime organisé
L’évolution de la criminalité organisée au cours des années 1990 offre un
paysage contrasté.
D’un côté, des opérations policières spectaculaires mettant
en cause une partie de la classe politique corrompue et/ou soupçonnée de
collusion avec le milieu donnent à croire que le temps des liaisons dangereuses
est révolu.
C’est le cas en Italie ou au Japon.
De l’autre, des groupes mafieux
semblent faire main basse sur l’économie et la scène politique de pays tels que
la Russie où la corruption a atteint une ampleur inédite depuis l’effondrement
du système soviétique.
Les relations entre les groupes criminels et l’État sont anciennes.
L’exercice
de la violence et de la corruption pour mener leurs activités délictueuses amène
nécessairement les premiers à entrer en contact avec la sphère
politico-administrative jusqu’à, parfois, l’infiltrer.
Certains gouvernements ne
se sont pas privés à leur tour de les utiliser à des fins de contrôle social :
encadrement de la population rurale du Mezzogiorno italien, brimades et
surveillance des détenus politiques dans les camps soviétiques, répression des
mouvements sociaux, etc.
La reconnaissance de l’autorité mafieuse par les
institutions n’est donc pas rare.
Elle est fondée sur une convergence d’intérêts
entre les deux.
Intérêts réciproques
Une autre modalité de ces relations consiste, pour le criminel, à passer un
pacte avec un homme politique, fondé sur le fait qu’il lui assure son élection
en échange de l’impunité de crimes, de transmission d’informations
confidentielles ou de contrôle de marchés publics.
On rejoint alors le problème
de la corruption politique, qui a fait l’objet d’une dénonciation croissante à
partir de la fin des années 1980.
C’est par le biais de son autorité sur une
circonscription, mais aussi par la terreur, que le mafieux est en mesure de
contrôler les votes décisifs pour assurer la victoire de son candidat.
Cette
capacité s’inscrit dans un contexte politique où l’électeur vote moins par
conviction que dans l’attente des avantages matériels ou matérialisables qu’il
peut retirer de son suffrage.
D’après des estimations judiciaires de 1992, la
Cosa Nostra sicilienne contrôlait plus d’un demi-million de voix en Sicile.
Les groupes criminels n’ont pas de préférence partisane arrêtée.
C’est le
pragmatisme qui commande leurs orientations, même s’ils font montre d’une
inclination certaine pour les partis au pouvoir, les plus utiles.
Mais les
mafias ont aussi en commun un anticommunisme viscéral.
C’est du reste en vertu
de ce principe que les gouvernements ou pouvoirs de tutelle ont pu les
favoriser, comme les autorités alliées d’occupation au Japon et en Italie dans
l’après-guerre ou les États-Unis soutenant la reconstitution de l’armée du
Kuomintang, appuyée sur les triades chinoises, contre Mao.
C’est également ainsi
que l’on explique l’alliance périodique entre groupes criminels et organisations
d’extrême droite avec parfois la complicité d’une partie des services secrets de
leur pays : aventure nationaliste des yakuza (mafieux) japonais au tournant du
siècle, implication de Cosa Nostra dans la stratégie de la tension des années
1970.
Enfin, l’infiltration se réalise par la présence directe d’élus émanant
des rangs criminels.
Elle a été telle en Italie qu’un décret du 31 mai 1991 a
autorisé la dissolution des conseils municipaux en odeur mafieuse.
En 1994,
trente-deux communes ont ainsi été sanctionnées en Campanie, dix-neuf en Sicile,
onze en Calabre.
La situation est autrement dramatique en Russie, où le
ministère de l’Intérieur a alerté la commission électorale d’octobre 1995 sur la
présence de quatre-vingt-sept candidats sous enquête ou ayant déjàété incarcérés
pour crime organisé.
Le temps des attachés-cases
Cette stratégie d’implication directe dans la vie politique témoigne d’une.
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