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La conclusion de Terre des hommes

Publié le 06/07/2020

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« I. Il y a quelques années, au cours d'un voyage en chemin de fer, j'ai voulu visiter la patrie en marche où je m'enfermais pour trois jours, prisonnier pour trois jours de ce bruit de galets roulés par la mer, et je me suis levé. J'ai traversé vers une heure du matin le train dans toute sa longueur. Les sleepings étaient vides. Les voitures de première étaient vides. Mais les voitures de troisième abritaient des centaines d'ouvriers polonais congédiés de France et qui regagnaient leur Pologne. Et je remontais les couloirs en enjambant des corps.Je m'arrêtai pour regarder. Debout sous les veilleuses, j'apercevais dans ce wagon sans divisions, et qui ressemblait à une chambrée, qui sentait la caserne ou le commissariat, toute une population confuse et barattée par les mouvements du rapide. Tout un peuple enfoncé dans les mauvais songes et qui regagnait sa misère. De grosses têtes rasées roulaient sur le bois des banquettes. [...] Un enfant tétait une mère si lasse qu'elle paraissait endormie. La vie se transmettait dans l'absurde et le désordre de ce voyage. Je regardai le père. Un crâne pesant et nu comme une pierre. Un corps plié dans l'inconfortable sommeil, emprisonné dans les vêtements de travail, fait de bosses et de creux. L'homme était pareil à un tas de glaise. Ainsi, la nuit, des épaves qui n'ont plus de forme, pèsent sur les bancs des halles. Et je pensai : le problème ne réside point dans cette misère, dans cette saleté, ni cette laideur. Mais ce même homme et cette même femme se sont connus un jour et l'homme a souri sans doute à la femme : il lui a, sans doute, après le travail, apporté des fleurs. Timide et gauche, il tremblait peut-être de se voir dédaigné. Mais la femme, par coquetterie naturelle, la femme sûre de sa grâce, se plaisait peut-être à l'inquiéter. Et l'autre, qui n'est plus aujourd'hui qu'une machine à piocher ou à cogner, éprouvait ainsi dans son coeur l'angoisse délicieuse. Le mystère, c'est qu'ils soient devenus ces paquets de glaise. Dans quel moule terrible ont-ils passé, marqués par lui comme par une machine à emboutir? Un animal vieilli conserve sa grâce. Pourquoi cette belle argile humaine est-elle abîmée? [...] II. Je m'assis en face d'un couple. Entre l'homme et la femme, l'enfant, tant bien que mal, avait fait son creux, et il dormait. Mais il se retourna dans le sommeil, et son visage m'apparut sous la veilleuse. Ah! quel adorable visage! Il était né de ce couple-là une sorte de fruit doré. Il était né de ces lourdes hardes cette réussite de charme et de grâce. Je me penchai sur ce front lisse, sur cette douce moue des lèvres, et je me dis : voici un visage de musicien, voici Mozart enfant, voici une belle promesse de la vie. Les petits princes des légendes n'étaient point différents de lui : protégé, entouré, cultivé, que ne saurait-il devenir! Quand il naît par mutation dans les jardins une rose nouvelle, voilà tous les jardiniers qui s'émeuvent. On isole la rose, on cultive la rose, on la favorise. Mais il n'est point de jardinier pour les hommes. Mozart enfant sera marqué comme les autres par la machine à emboutir. Mozart fera ses plus hautes joies de musique pourrie, dans la puanteur des cafés-concerts. Mozart est condamné. III. Et je regagnai mon wagon. Je me disais : ces gens ne souffrent guère de leur sort. Et ce n'est point la charité ici qui me tourmente. Il ne s'agit point de s'attendrir sur une plaie éternellement rouverte. Ceux qui la portent ne la sentent pas. C'est quelque chose comme l'espèce humaine et non l'individu qui est blessé ici, qui est lésé. Je ne crois guère à la pitié. Ce qui me tourmente, c'est le point de vue du jardinier. Ce qui me tourmente ce n'est point cette misère, dans laquelle, après tout, on s'installe aussi bien que dans la paresse. Des générations d'orientaux vivent dans la crasse et s'y plaisent. Ce qui me tourmente, les soupes populaires ne le guérissent point. Ce qui me tourmente, ce ne sont ni ces creux, ni ces bosses, ni cette laideur. C'est un peu, dans chacun de ces hommes, Mozart assassiné. Seul l'Esprit, s'il souffle sur la glaise, peut créer l'Homme. Antoine de Saint-Exupéry : Terre des hommes (1939) Gallimard éd. COMPRÉHENSION DU TEXTE Le contexte : Saint-Exupéry autour des années 30, au moment de la grande crise économique mondiale, entreprend un voyage en Europe centrale. ...»

« La conclusion de Terre des hommes I.

Il y a quelques années, au cours d'un voyage en chemin de fer, j'ai voulu visiter la patrie en marche où je m'enfermais pour trois jours, prisonnier pour trois jours de ce bruit de galets roulés par la mer, et je me suis levé. J'ai traversé vers une heure du matin le train dans toute sa longueur.

Les sleepings étaient vides.

Les voitures de première étaient vides. Mais les voitures de troisième abritaient des centaines d'ouvriers polonais congédiés de France et qui regagnaient leur Pologne.

Et je remon­ tais les couloirs en enjambant des corps.Je m'arrêtai pour regarder.

Debout sous les veilleuses, j'apercevais dans ce wagon sans divisions, et qui ressem­ bl,:1-it � une chambrée, qui sentait la caserne ou le commissariat, toute une population confuse et barattée par les mouvements du rapide.

Tout un peuple enfoncé dans les mauvais songes et qui regagnait sa misère.

De grosses têtes rasées roulaient sur le bois des banquettes.

[ ...

] Un enfant tétait une mère si lasse qu'elle paraissait endormie.

La vie se transmettait dans l'absurde et le désordre de ce voyage.

Je regardai le père.

Un crâne pesant et nu comme une pierre.

Un corps plié dans l'inconfortable sommeil, emprisonné dans les vêtements de travail, fait de bosses et de creux.

L'homme était pareil à un tas de glaise.

Ainsi, la nuit, des épaves qui n'ont plus de forme, pèsent sur les bancs des halles.

Et je pensai : le problème ne réside point dans cette misère, dans cette saleté, ni cette laideur.

Mais ce même homme et cette même femme se sont connus un jour et l'homme a souri sans doute à la femme : il lui a, sans doute, après le travail, apporté des fleurs.

Timide et gauche, il tremblait peut-être de se voir dédaigné.

Mais la femme, par coquetterie naturelle, la femme sûre de sa grâce, se plaisait peut-être à l'inquiéter.

Et l'autre,. »

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