La chute des corps
Publié le 18/04/2024
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«
La chute des corps
Le premier phénomène physique auquel les êtres humains sont confrontés
est celui de la gravitation.
C’est le phénomène que le jeune enfant
observe en laissant tomber, inlassablement, son gobelet du haut
de sa chaise.
Il ne suffit cependant pas d’observer pour pouvoir expliquer et
le chemin de l’expérimentation à la théorie peut être long et difficile,
car souvent l’intuition ne suffit pas.
La cosmologie d’Aristote
La première théorie visant à expliquer
la chute des corps est due au
philosophe grec Aristote.
Pour
celui-ci, l’univers est constitué de
deux régions différentes subdivisées en sphères concentriques.
Ce sont le monde sublunaire, qui
s’étend du centre de la Terre à la
sphère de la Lune, et le monde
supra-lunaire, de la sphère de
la Lune à celle des étoiles.
Pour
Aristote
Aristote, les lois de la nature ne
~385 à ~382
sont pas les mêmes dans ces deux
régions.
Le monde sublunaire est imparfait, le
monde supra-lunaire est parfait et immuable.
2
Dans le monde sublunaire il y a deux sortes de
mouvements : la chute des corps, qu’Aristote
qualifie de mouvement naturel, et le mouvement violent causé par une force extérieure
comme le lancer d’un objet.
Pour expliquer
la chute des corps, Aristote semble avoir été
inspiré par le mouvement des objets dans un
liquide.
En plaçant divers objets dans l’eau,
on constate qu’il y en a qui flottent alors que
d’autres coulent, certains plus rapidement
que d’autres.
En immergeant des objets, on
n
ur
at
toiles
fixes
Jupiter
e
Ma
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M
Vénus
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Terre
on
Lun
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M
DossierGravité
Le monde sublunaire
So
Vol.
11 • été – automne 2016
André Ross
Professeur retraité
de subl
Monde
ire
na
alu
r
p
su
re de
Rotation de la sphè
s fix
es
remarque qu’une fois relâchés, les corps
lourds restent au fond de l’eau alors que les
plus légers remontent à la surface, certains
plus rapidement que d’autres.
Pour Aristote, la chute des corps dans l’air
est un phénomène analogue qu’il explique
en ayant recours aux quatre éléments
d’Empédocle.
Ces éléments sont, du plus léger
au plus lourd, le feu, l’air, l’eau et la terre.
Ces
quatre éléments sont présents dans chaque
corps mais en proportions différentes.
Aristote explique que chaque corps tend
à occuper la place naturelle de son
élément dominant.
Cette tendance
est d’autant plus grande que la
proportion de l’élément dominant est
importante.
Ainsi, plus un corps est
lourd (c’est-à-dire comporte une
grande proportion de l’élément
terre), plus il tombe rapidement
car sa tendance
à occuper son
emplacement
naturel est forte.
Plus un corps
comporte
une
grande proportion
de l’élément feu, plus
il s’élève rapidement.
Cette propension est facile
à constater lorsqu’on observe
un feu : on voit bien que
les flammes s’élèvent et,
tout corps contenant
une forte proportion de
cet élément fera de même.
Dans cette région intérieure de l’univers, des perturbations interviennent
souvent, mais lorsque la cause de ces
perturbations prend fin le mouvement
du corps est à nouveau régi par les
lois naturelles.
Par exemple, en lançant
un objet dans les airs, on lui imprime un
mouvement violent, contre nature.
Lorsque
la cause de ce mouvement violent prend fin,
cet objet tend à reprendre sa place naturelle.
Dans la conception aristotélicienne de la
chute des corps, le vide n’est pas concevable.
Comme dans l’eau, le mouvement requiert la
présence de corps en interaction et la vitesse
du mouvement dépend de la composition de
ces corps.
L’impossibilité du vide force donc
Aristote à ajouter un cinquième élément à
ceux d’Empédocle.
Ce cinquième élément,
appelé éther ou quintessence, est présent
dans le monde supra-lunaire et comble l’espace entre les planètes et les étoiles.
Le monde supra-lunaire
La région la plus externe est le monde supralunaire, qui s’étend de la sphère de la Lune
à la sphère des étoiles fixes.
Dans cette
région, les corps sont parfaits et
immuables.
D’un point de vue
géométrique, la sphère est
le corps le plus parfait.
Les
corps célestes sont donc
sphériques et leur mouvement ne peut être décrit
que par des sphères en
rotation.
La théorie d’Aristote sur le monde
supra-lunaire
s’inspire de la
théorie d’Eudoxe pour
expliquer le mouvement des
planètes.
Depuis longtemps,
les savants avaient constaté
que sept objets célestes
se déplaçaient sur un fond
d’étoiles fixes.
Ces objets
mobiles appelés planètes
(vagabonds en grec) sont le
Soleil et la Lune, ainsi que
les planètes connues à
l’époque : Mercure, Vénus,
Mars, Jupiter et Saturne.
À l’exception de Mars qui, parfois, semble
ralentir et même se déplacer en sens inverse
durant quelques semaines, on avait observé
que les planètes se déplacent d’ouest en est.
Eudoxe, né en ~408, a tenté d’expliquer ces
phénomènes en proposant un modèle dans
lequel la Terre est fixe et les planètes sont
situées sur un ensemble de sphères transparentes, homocentriques et interreliées qui
tournent à différentes vitesses constantes
autour de la Terre.
Quant aux étoiles, elles
étaient fixées à la sphère la plus extérieure.
La théorie d’Aristote sur la chute des corps présentait des failles majeures, mais en l’absence
d’une meilleure explication du mouvement, elle
fut adoptée pendant près de 2000 ans.
La chute des corps
selon Galilée
La théorie aristotélicienne du
mouvement est une théorie
« spéculative », c’est-à-dire un
ensemble d’hypothèses échafaudées à partir d’une observation superficielle et qui ne sont
pas vérifiables expérimentalement.
On doit à Galilée (1564-1642)
Galilée
la première démarche pour
1564-1642
établir expérimentalement une
description de la chute des corps.
Plusieurs des objections soulevées à l’encontre
du modèle héliocentrique de Nicolas Copernic
(1473-1543) découlaient de l’incompatibilité
de ce modèle et de la théorie du mouvement
d’Aristote.
Galilée a compris qu’il fallait développer une autre théorie du mouvement pour
que le modèle héliocenCorps lourd
trique puisse être adopté.
Il
montre d’abord, en adopCorps léger
tant un raisonnement par
l’absurde, que l’explication d’Aristote n’est pas
En attachant les corps,
valide :
le corps léger ralentit
Si les corps lourds
tombent plus vite que
les corps légers, en
attachant ensemble un
corps léger et un corps
lourd, le plus léger des
deux ralentira le corps
lourd et l’assemblage
doit tomber moins
le corps lourd.
L’assemblage doit donc
tomber moins vite que le
corps lourd.
Attachés, ils forment un
nouveau corps plus lourd
que le corps lourd.
L’assemblage doit donc
tomber plus vite
que le corps lourd.
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vite que le plus lourd des deux corps.
Cependant, une fois attachés ensemble,
ils forment un nouveau corps plus lourd
que le plus lourd des deux.
Ce nouveau
corps doit donc tomber plus vite que
le plus lourd des deux.
Ce qui est une
contradiction.
Par conséquent, tous les corps doivent
tomber à la même vitesse.
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Du pendule à l’inertie
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Galilée s’est intéressé aux phénomènes que
les aristotéliciens ne pouvaient expliquer à
l’aide de leur théorie du mouvement, entre
autres, le mouvement du pendule.
Avec la
théorie d’Aristote, il est facile de comprendre
que le corps lourd suspendu au bout de la
corde va descendre pour retrouver sa place
naturelle.
Une fois qu’il l’a atteinte, pourquoi
remonte-t-il ? Ne serait-il pas naturel qu’il
demeure suspendu au point le plus bas de la
trajectoire ?
En étudiant le mouvement des pendules
Galilée utilise divers montages dans lesquels
le mouvement s’apparente à celui du pendule.
En modifiant le dispositif, il constate que la bille
remonte à peu près à la même hauteur d’où
elle a été lancée, même en diminuant la pente
et en allongeant le parcours de la remontée.
La bille perd graduellement de la vitesse dans
la remontée et, en l’absence de frottement, la
hauteur atteinte devrait être exactement celle d’où la bille est partie.
Que va-t-il se passer s’il n’y a pas de
remontée et que la partie de droite
du dispositif demeure horizontale ?
Par un passage à la limite, Galilée
conclut que la bille devrait rouler
indéfiniment à vitesse constante.
Le mouvement continue donc sans
qu’aucune force n’agisse pour le
maintenir.
Cette conclusion sera
reprise par Isaac Newton qui en
fit sa première loi du mouvement
appelée principe d’inertie.
Pour Aristote, l’état naturel d’un
corps, c’est le repos et une force doit
s’exercer pour qu’un objet puisse
quitter cet état.
Avec les expériences
de Galilée sur les pendules, il faut
abandonner cette idée.
Le déplacement en mouvement rectiligne à
vitesse constante ne nécessite pas l’intervention d’une force qui le maintiendrait en mouvement.
Il n’y a plus de différence qualitative
entre repos et mouvement.
La chute des corps
La chute d’un corps est trop rapide pour qu’il
soit facile d’en prendre des mesures.
Pour
procéder à une étude quantitative de ce
mouvement, il faut pouvoir le ralentir.
Galilée s’est servi du plan incliné pour établir un
lien entre le temps et la distance parcourue.
Laissons-le relater l’expérience :
On utilise un plan incliné de 1 coudée1
environ, large....
»
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