L'attentat contre Hitler
Publié le 10/12/2021
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20 juillet 1944 - L'attentat contre Hitler a été remis plusieurs fois avant que la date du 20 juillet 1944 entre avec fracas dans l'Histoire. Ce jour-là, à l'aube, Klaus Philip Schenk, Graf von Stauffenberg, grand mutilé de la campagne de Tunisie, colonel depuis quinze jours et chef d'état-major de l'armée de l'intérieur, prend, à 7 heures, l'avion de la Prusse-Orientale, accompagné de son aide de camp, le lieutenant von Haeften. Dans sa serviette, une bombe d'origine anglaise munie d'un détonateur à retardement. A 10 heures, il se pose à Rastenburg, rejoint la " tanière du loup ", quartier général de Hitler, où il est venu assister à une conférence. Sans grandes difficultés, Haeften et lui franchissent les trois contrôles. Stauffenberg s'assure que le général Fellgiebel, chef des communications du QG, et l'un des membres du complot militaire, est prêt à couper tous les réseaux de transmission dès la réussite de l'attentat. Un peu avant 12 h 30, le maréchal Keitel, chef du haut commandement de la Wehrmacht, prie Stauffenberg de venir à la conférence. Oubliant à dessein sa casquette et son ceinturon, le colonel revient dans le bureau de Keitel, brise la capsule d'acide qui va ronger le fil détonateur de la bombe. Elle éclatera dans dix minutes. Stauffenberg pose sa serviette à ses pieds, à la droite de Hitler, entre celui-ci et l'un des socles de la table de chêne épaisse. Puis il sort sous le prétexte d'attendre un appel téléphonique de Berlin. Restent cinq minutes. Le général Heusinger parle de la situation sur le front de l'Est. Alors un officier qui ignore tout, le colonel Brandt, gêné par la serviette, la soulève et la pose de l'autre côté du socle de bois, qui jouera le rôle de bouclier. A 12 h 42, l'explosion. Stauffenberg, dehors avec Fellgiebel, voit la baraque sauter, les flammes, les débris qui volent avec les corps. A Fellgiebel de jouer : il va téléphoner à Berlin que le coup a réussi, puis interrompre les transmissions. Stauffenberg et Haeften, au bluff, parviennent à sortir du QG, dont les passages sont déjà bloqués. Ils décollent à 13 heures, se posent à Berlin à 13 h 45, escomptant que le " plan Walkyrie ", prévu pour parer un éventuel soulèvement des travailleurs étrangers dans le Reich, est en application depuis le début de l'après-midi, et que le général Beck et le maréchal von Witzleben ont pris leurs fonctions de chef de l'Etat et de commandant en chef de la Wehrmacht. Rien n'est fait. Les conjurés de Berlin, au ministère de la guerre, avec le général Olbricht, ne savent pas si Hitler est mort ou non. Ils attendaient Stauffenberg. Avec trois heures de retard, les ordres rédigés depuis plusieurs mois sortent des tiroirs pour mettre les troupes de l'intérieur en alerte. Beck et Witzleben arrivent sans se hâter. A Paris, Stülpnagel, alerté par Stauffenberg, fait arrêter les mille deux cent membres des SS et de la police. A Berlin, les conjurés négligent de faire occuper les stations de radio. Hitler joue de chance. Car le général Fromm commandant en chef de l'armée de l'intérieur, qui n'a pas été initié au complot, joint au téléphone Keitel. Il en apprend que le Führer est vivant, ce qui suffit à le détourner de l'entreprise. " Tuez-les à vue! " A 18 h 30, le plus puissant émetteur de Berlin annonce que le Führer a échappé à un attentat. A 1 heure du matin, Hitler parle : " Une petite clique d'officiers à la fois ambitieux, irréfléchis, stupides et insensés, a ourdi un complot pour m'éliminer ", et il prescrit de " tuer à vue " tous ceux qui transmettraient encore " des ordres émanant de ces imposteurs ". Les principaux conjurés sont déjà morts. Fromm les a fait fusiller dans la cour du ministère, Bendlerstrasse : Stauffenberg, le lieutenant Haeften, Olbricht, Hoepner, expédiés à la lueur des phares. Beck se rate en se suicidant. Il est achevé par un sous-officier. Dans les semaines qui suivent, la Gestapo arrête sept mille personnes. Près de cinq mille sont exécutées, jusqu'au derniers jours avant la capitulation, souvent dans des conditions abominables. Ce n'était pas seulement une conjuration militaire circonstancielle que Hitler châtia, ni une révolte de palais sans conséquences comme l'avaient cru les Alliés c'étaient toutes les formes d'une résistance allemande qui avait déjà ses millions de victimes anonymes, enfermées dans des camps dès 1933. Le complot du 20 juillet procédait de desseins à plus long terme, amorcés dès 1938 à la tête de l'armée par le général Beck, et de l'administration avec Karl Goerdeler, ancien maire de Leipzig. Leurs réseaux de relations s'étendaient loin, mais leurs projets politiques se heurtaient soit à des considérations éthiques : la difficulté de rompre le serment fait au chef de l'Etat, fût-il Hitler, fût-il criminel soit au scepticisme et à l'absence totale de compréhension des gouvernements alliés, notamment des Anglais soit enfin à l'incohérence des objectifs politiques d'un pouvoir qui aurait succédé au nazisme. De jeunes officiers se sacrifièrent à l'heure même où, sur tous les fronts, la déroute était certaine, où il n'était plus question de calculs politiques, de pari sur la disposition des Anglo-Américains à faire front commun contre l'avance des Russes. Le peuple lui-même, écrasé, fourbu, soutenait encore Hitler et n'était pas aux bords d'une révolution, d'autant moins que, hormis quelques dirigeants socialistes et syndicalistes, les différents groupes de la conjuration ne comprenaient pas de chefs populaires. Ils avaient tous été exterminés ou mis de côté. Pourtant, la rébellion, avortée dans le sang, du 20 juillet 1944 et les refus dont elle a été l'issue ont donné sa légitimité à la République fédérale et restauré les conditions d'un patriotisme allemand fondé sur des valeurs communes aux peuples d'Europe, acceptant l'Histoire et rejetant l'hégémonie.
20 juillet 1944 - L'attentat contre Hitler a été remis plusieurs fois avant que la date du 20 juillet 1944 entre avec fracas dans l'Histoire. Ce jour-là, à l'aube, Klaus Philip Schenk, Graf von Stauffenberg, grand mutilé de la campagne de Tunisie, colonel depuis quinze jours et chef d'état-major de l'armée de l'intérieur, prend, à 7 heures, l'avion de la Prusse-Orientale, accompagné de son aide de camp, le lieutenant von Haeften. Dans sa serviette, une bombe d'origine anglaise munie d'un détonateur à retardement. A 10 heures, il se pose à Rastenburg, rejoint la " tanière du loup ", quartier général de Hitler, où il est venu assister à une conférence. Sans grandes difficultés, Haeften et lui franchissent les trois contrôles. Stauffenberg s'assure que le général Fellgiebel, chef des communications du QG, et l'un des membres du complot militaire, est prêt à couper tous les réseaux de transmission dès la réussite de l'attentat. Un peu avant 12 h 30, le maréchal Keitel, chef du haut commandement de la Wehrmacht, prie Stauffenberg de venir à la conférence. Oubliant à dessein sa casquette et son ceinturon, le colonel revient dans le bureau de Keitel, brise la capsule d'acide qui va ronger le fil détonateur de la bombe. Elle éclatera dans dix minutes. Stauffenberg pose sa serviette à ses pieds, à la droite de Hitler, entre celui-ci et l'un des socles de la table de chêne épaisse. Puis il sort sous le prétexte d'attendre un appel téléphonique de Berlin. Restent cinq minutes. Le général Heusinger parle de la situation sur le front de l'Est. Alors un officier qui ignore tout, le colonel Brandt, gêné par la serviette, la soulève et la pose de l'autre côté du socle de bois, qui jouera le rôle de bouclier. A 12 h 42, l'explosion. Stauffenberg, dehors avec Fellgiebel, voit la baraque sauter, les flammes, les débris qui volent avec les corps. A Fellgiebel de jouer : il va téléphoner à Berlin que le coup a réussi, puis interrompre les transmissions. Stauffenberg et Haeften, au bluff, parviennent à sortir du QG, dont les passages sont déjà bloqués. Ils décollent à 13 heures, se posent à Berlin à 13 h 45, escomptant que le " plan Walkyrie ", prévu pour parer un éventuel soulèvement des travailleurs étrangers dans le Reich, est en application depuis le début de l'après-midi, et que le général Beck et le maréchal von Witzleben ont pris leurs fonctions de chef de l'Etat et de commandant en chef de la Wehrmacht. Rien n'est fait. Les conjurés de Berlin, au ministère de la guerre, avec le général Olbricht, ne savent pas si Hitler est mort ou non. Ils attendaient Stauffenberg. Avec trois heures de retard, les ordres rédigés depuis plusieurs mois sortent des tiroirs pour mettre les troupes de l'intérieur en alerte. Beck et Witzleben arrivent sans se hâter. A Paris, Stülpnagel, alerté par Stauffenberg, fait arrêter les mille deux cent membres des SS et de la police. A Berlin, les conjurés négligent de faire occuper les stations de radio. Hitler joue de chance. Car le général Fromm commandant en chef de l'armée de l'intérieur, qui n'a pas été initié au complot, joint au téléphone Keitel. Il en apprend que le Führer est vivant, ce qui suffit à le détourner de l'entreprise. " Tuez-les à vue! " A 18 h 30, le plus puissant émetteur de Berlin annonce que le Führer a échappé à un attentat. A 1 heure du matin, Hitler parle : " Une petite clique d'officiers à la fois ambitieux, irréfléchis, stupides et insensés, a ourdi un complot pour m'éliminer ", et il prescrit de " tuer à vue " tous ceux qui transmettraient encore " des ordres émanant de ces imposteurs ". Les principaux conjurés sont déjà morts. Fromm les a fait fusiller dans la cour du ministère, Bendlerstrasse : Stauffenberg, le lieutenant Haeften, Olbricht, Hoepner, expédiés à la lueur des phares. Beck se rate en se suicidant. Il est achevé par un sous-officier. Dans les semaines qui suivent, la Gestapo arrête sept mille personnes. Près de cinq mille sont exécutées, jusqu'au derniers jours avant la capitulation, souvent dans des conditions abominables. Ce n'était pas seulement une conjuration militaire circonstancielle que Hitler châtia, ni une révolte de palais sans conséquences comme l'avaient cru les Alliés c'étaient toutes les formes d'une résistance allemande qui avait déjà ses millions de victimes anonymes, enfermées dans des camps dès 1933. Le complot du 20 juillet procédait de desseins à plus long terme, amorcés dès 1938 à la tête de l'armée par le général Beck, et de l'administration avec Karl Goerdeler, ancien maire de Leipzig. Leurs réseaux de relations s'étendaient loin, mais leurs projets politiques se heurtaient soit à des considérations éthiques : la difficulté de rompre le serment fait au chef de l'Etat, fût-il Hitler, fût-il criminel soit au scepticisme et à l'absence totale de compréhension des gouvernements alliés, notamment des Anglais soit enfin à l'incohérence des objectifs politiques d'un pouvoir qui aurait succédé au nazisme. De jeunes officiers se sacrifièrent à l'heure même où, sur tous les fronts, la déroute était certaine, où il n'était plus question de calculs politiques, de pari sur la disposition des Anglo-Américains à faire front commun contre l'avance des Russes. Le peuple lui-même, écrasé, fourbu, soutenait encore Hitler et n'était pas aux bords d'une révolution, d'autant moins que, hormis quelques dirigeants socialistes et syndicalistes, les différents groupes de la conjuration ne comprenaient pas de chefs populaires. Ils avaient tous été exterminés ou mis de côté. Pourtant, la rébellion, avortée dans le sang, du 20 juillet 1944 et les refus dont elle a été l'issue ont donné sa légitimité à la République fédérale et restauré les conditions d'un patriotisme allemand fondé sur des valeurs communes aux peuples d'Europe, acceptant l'Histoire et rejetant l'hégémonie.
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