John Constable
Publié le 15/05/2020
Extrait du document
«
CONSTABLE
1116-1831
JOHN CoNSTABLE naquit au cours d'une décade du XVIIIe siècle qui fut prodigue en génies
et en talents dans tous les arts, non pas seulement en Angleterre.
Constable, Turner, Scott, Bee
thoven, Holderlin, Wordsworth, Coleridge, Kaspar David Friedrich et Philipp Otto Runge
sont tous nés entre 1770 et 1780, et tous arrivés à l'âge d'homme au moment où un monde nou
veau d'idées émergeait de l'ancien.
L'époque était particulièrement favorable aux artistes qui,
après le tumulte des années révolutionnaires, se tournèrent vers la nature, l'enfance et le passé,
et trouvèrent dans la nature des correspondances métaphysiques, dans les levers et les couchers
de soleil, dans les nuages et dans la pluie, dans les états de la lumière et de l!ornbre, une expres
sion de leurs aspirations propres.
En conséquence, les artistes de cette période romantique, et
en Angleterre plus encore que dans la plupart des autres pays d'Europe, furent enclins à aborder
l'art par leur sensibilité et non au moyen de leur intelligence, à le mêler intimement à leur
religion, qui était souvent d'un caractère personnel, mystique et peu orthodoxe.
Constable
eut une vie sentimentale tourmentée, mais une grande simplicité d'esprit.
Moins
excentrique que bon nombre d'artistes anglais de l'époque, il fut, en apparente, plus soumis aux
règles du bon sens chères au XVIIIe siècle, plus opposé à toute extravagance.
Aussi son art,
r?rnantique sans doute mais non point métaphysique, ne dépasse-t-il guère sa propre personnalité.
Sa peinture est une autobiographie désordonnée où, croyant reproduire les harmonies de la na
ture, il expose son propre cœur agité et son aspiration insatisfaite au calme ensoleillé d'un cœur
heureux.
En examinant sa peinture, il est indispensable de faire une distinction entre ce qu'elle est
réellement et ce
qu'elle a signifié dans l'évolution de l'art en Europe.
Constable était avant tout
un ébaucheur: il existe dans ses ébauches.
Mais l'entière conception d'un grand maître ne s'ex
prime pas par l'ébauche.
Les grands maîtres ne sont pas « au service» du spectacle, comme
Constable prétendait l'être; ils ne disent pas; «Je reste toujours tranquille jusqu'à ce que je voie
un être vivant, parce que, si un être vivant apparaît, il est forcément en harmonie avec l'endroit.
Si aucun être vivant n'apparaît, je n'en mets pas dans rna toile.
» (Constable, cité par W.
P.
Frith dans Further Reminiscences, r888.) Les grands maîtres ne désirent pas, même s'ils en ont les
moyens,
peindre toujours en plein air, en serviteurs de la nature.
Aussi l'art de Constable est
il un art étroit, dont il parlait lui-même comme d'une chose« limitée et sommaire».
Son tempéra
ment personnel l'écarte de l'art imaginatif et le pousse au pathos, l'écarte de lui-même pour le
conduire vers un art encore plus sommaire, l'art du détachement.
Il disait de Gainsborough:
« Il ne s'inquiète pas des détails, son but est d'exprimer la beauté d'un sentiment.» Constable
ne s'inquiétait guère plus de ces détails; et son but, ou du moins son procédé habituel, était de
s'exprimer lui-même au moyen de généralisations, telles la lumière, la pluie, la verdure.
Cette
généralisation de soi-même et de la nature, cette absence du constant, du substantiel, du solide
ct de la poésie
du solide, font (quand on sc remémore ce qu'il y a de plus parfait en peinture depuis.
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