Johann Paul Friedrich Richter, dit Jean-Paul1763-1825" Ce fut en l'année
Publié le 23/05/2020
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«
Johann Paul Friedrich Richter, dit Jean-Paul
1763-1825
“ Ce fut en l'année 1763 que vint au monde, le 15 février, la paix de Hubertsbourg (qui mit
fin à la guerre de Sept Ans) et, quelque temps après elle, Johann Paul Friedrich Richter,
— et ce, dans le mois où avec lui vinrent encore la lavandière jaune et la grise, le
rouge-gorge, la grue, la poule d'eau et maints autres oiseaux des marécages, à savoir en
mars —, et ce, le jour du mois où, si l'on avait voulu couvrir son berceau de fleurs, la
cochléaria et le tremble commençaient leur floraison, ainsi que le mouron, à savoir le 21
mars, — et ce, à l'heure la plus matinale et la plus fraîche du jour, à savoir à une heure et
demie du matin ; mais ce qui met le comble à tout, c'est que le commencement de sa vie fut
aussi celui du printemps de cette année.
”
C'est Jean-Paul lui-même qui situe de la sorte, tout uniment, la date de sa naissance, dans
des mémoires qui ne purent être achevés, on le conçoit.
Il naquit donc au moment où
Chamfort commençait à écrire ; il mourut un an après Paul-Louis Courrier ; ses premières
œ uvres, les plus touffues, les plus laborieusement humoristiques, parurent alors que
Rivarol dissertait sur les causes qui valaient à la langue française une audience universelle.
Ces repères font aisément deviner pourquoi, dans un pays où Lamartine est réputé
romantique, Richter, dit Jean-Paul, évoque vaguement quelque sage hindou.
Il appartient à une humble famille de pasteurs et d'instituteurs de campagne de la région
de Bayreuth, ville où il mourut le 14 novembre 1825, laissant, manuscrit, un traité sur
l'immortalité de l'âme.
La pauvreté, la misère même de son enfance, de sa jeunesse (un de
ses frères se jeta dans une rivière pour augmenter la pâture des autres), de ses années
d'Université à Leipzig, ne purent jamais menacer en lui un idéalisme absolu qu'à la fin de
sa vie il accentuait de quelques pots de bière ou de quelques rasades de vin.
Si c'est Dieu
qui a créé l'univers, Jean-Paul l'a recréé, en démiurge.
Dieu a créé le bien et le mal ;
Jean-Paul a éliminé le mal.
S'il s'exerce dans le genre de l'idylle, c'est-à-dire dans le tableau
de m œ urs rustiques exempt de tout réalisme agressif ( Vie de Fixlein, professeur de cinquième ,
1795 ; Siebenkaes , 1796-1797 ; Le Jubilé , 1797 ; Vie de Fibel, créateur d'un abécédaire , 1812), il
magnifie si bien ses modestes héros que l'on ne souhaite pas d'autre destin aux grands de
ce monde.
Écrit-il des romans — des romans de formation, comme on dit en allemand ( La
Loge invisible , 1793 ; Hesperus , 1795 ; Titan , 1800-1803) — c'est moins pour raconter une
histoire : le roman est manichéen et Jean-Paul se donne une peine trop visible pour créer
des intrigants, des méchants, des vicieux, que pour donner libre cours à son lyrisme qui
l'emporte sur les cimes, d'où seuls quelques accès d'humour ou d'humeur peuvent le
ramener jusqu'à nous.
L'essor de ce lyrisme est dû à un amour prodigieux pour tous les aspects, visibles et
invisibles, de l'activité divine et humaine.
Le moindre bout de ficelle qui se trouvait sur
son chemin, Jean-Paul le ramassait : pour qu'il ne fût pas dit que ce qui témoignait du
travail de l'homme serait foulé aux pieds.
Bien entendu, de si belles ferveurs devaient
surtout aller aux femmes.
Peintes sous des traits proprement angéliques, pourvues de sacs lacrymatoires d'une
inépuisable fécondité, dotées d'un privilège de lévitation inconnu même aux saintes de la.
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