JEAN RENOIR
Publié le 06/12/2021
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Le lien qui s’établira peu à peu entre le capitaine français (incarné par Pierre Fresnay) et le chef du camp allemand (Erich von Stroheim) est à cet égard exemplaire. Appartenant tous deux à l’aristocratie d’avant-guerre qui est condamnée quel que soit le dénouement de la guerre, leur rapprochement, basé sur le même sens de l’honneur et les mêmes valeurs, apparaît plus fort qu’entre soldats d’une même armée. Si ce code de l’honneur impose une issue tragique à leur relation, deux soldats français réussiront, eux, à s’évader et à passer en Suisse grâce à l’amour d’une paysanne.
Deux ans plus tard, Renoir réalise son autre grand chef-d’œuvre, La règle du jeu. Comme dans plusieurs de ses films, l’histoire apparemment conventionnelle, évoque les chassés-croisés amoureux d’un groupe de personnages rassemblés dans une maison de campagne à l’occasion d’une partie de chasse. Mais cette règle du jeu est celle du jeu social avec ses conventions et l’opposition irréductible entre les maîtres et les domestiques. Dans ce portrait corrosif de la société d’avant-guerre, tous les personnages - l’aviateur, le marquis, la camériste, le braconnier - ont leurs défauts et leurs lâchetés : les uns sont attachés à leurs dérisoires privilèges et à leurs plaisirs, les autres veulent les imiter. Renoir s’intéresse à chacun d’entre eux et les regarde avec lucidité se
défendre contre les élans spontanés de leur cœur. Sa caméra excelle à recréer le côté naturel et impromptu des scènes.
Cette comédie sociale est cependant mal accueillie par le public, rebuté par l’aspect apparemment décousu du film. La règle du jeu est rapidement retiré de l’affiche et le film attendra vingt ans avant d’être distribué dans sa version intégrale et reconnu comme un chef-d’œuvre.
Hollywood et l’Inde
Pendant l’occupation Renoir s’exile aux États-Unis où il travaille à Hollywood. 11 rencontre toutefois de sérieuses difficultés tant avec la langue qu’avec l’organisation propre aux studios américains. Pour soutenir la lutte antinazie, il réalise deux films de commande, l’Étang tragique (1941) et YHomme du Sud (1945) qui reçoivent un accueil mitigé ainsi que Le journal d’une femme de chambre (1946) dans lequel on retrouve plus fortement son empreinte. Renoir part alors en Inde tourner Le fleuve (1951), son premier film en couleurs. Dans celui-ci, il accorde sa vision humaniste aux rites et à l’atmosphère propres à l’Inde.
Quand Renoir revient en Europe, sa carrière entre dans une nouvelle phase, plus orientée vers le seul plaisir de la mise en scène : évocation de la vie des comédiens ambulants (Le carrosse d’or, 1953) ou reconstitution nostalgique des cabarets (French Cancan, 1955). Dans les dernières années de sa vie, il tourne (Le déjeuner sur l’herbe, 1959; Le caporal épinglé, 1962), mais il met aussi en scène Orvet au théâtre, écrit des romans et ses souvenirs. Enfin, il réalise pour la télévision Le petit Théâtre de Jean Renoir (1969), puis se retire aux États-Unis où il vivra jusqu’à sa mort en 1979.
«
Arts
et Culture
Jean Renoir est l'un des plus grands
réalisateurs français.
Avec un naturel
et une poésie rares, ses films oscillent
entre drame et gaieté, jeu et illusion.
J ean Renoir est né à Paris le 15 septembre
1894.
C'est le fils cadet du grand peintre
impressionniste Pierre-Auguste Renoir.
L'at
mosphère bohème et joyeuse de son enfance
marquera de façon profonde sa sensibilité artis
tique.
Après avoir obtenu son baccalauréat,
Renoir s'engage dans l'armée.
Il rejoint la cavale
rie en 1913, combat pendant la Première Guerre
mondiale, est grièvement blessé en 1915 puis
devient pilote jusqu'à la fin du conflit.
Cette expé
rience de la guerre se retrouvera dans son film La
grande illusion, l'une de ses œuvres majeures.
Après la guerre, Jean Renoir se consacre au tra
vail de la céramique qui correspond bien à son
goût du concret, de l'esthétique artistique et à sa
volonté d'indépendance.
Passionné de cinéma, il
fonde sa propre société de production pour
amorcer la carrière d'actrice de sa jeune épouse,
Catherine Hessling, qui fut l'un des modèles de
son père.
Après avoir collaboré au scénario d'Une
vie sans joie d'Albert Dieudonné, il réalise son
premier long métrage La fille de l'eau, en 1924, et
en 1926, Nana, qui est probab lement son
meilleur film muet.
Essais
d'avant-garde, farces populaires et films
de commande alternent jusqu'à l'arrivée du par
lant, qui convient parfaitement à son style natura
liste.
Son film La chienne (1931), avec Michel
S�gih et Catherine Hessling, évoque la déchéan
ce d'un homme persécuté par la prostituée indif
férente et cupide dont il est épris.
C'est le début
de la grande époque réaliste de Renoir.
Même si
l'ironie, la satire et la comédie marqueront ses
films suivants, cette veine réaliste sera toujours
présente et fera de Renoir pendant une dizaine
d'années le maître du genre.
Renoir emploie de nouveau Michel Simon
dans Boudu sauvé des eaux (1932), qui y trouve
l'un de ses meilleurs rôles.
Les extravagances de
ce vagabond, qui bouleverse le ménage de l'hom
me qui lui a sauvé la vie, font de cette comédie
satirique un véritable pamphlet anarchiste.
La veine réaliste
À l'instar de Boudu, Le crime de Monsieur Lange
(1936) croque sur le vif des scènes de la vie quoti
dienne.
La spontanéité du film doit beaucoup à la
liberté d'interprétation que Renoir a laissé à ses
acteurs.
Le réalisme est rendu par le recours à des
plans d'ensemble, à des scènes qui privilégient
l'environnement.
Cette technique correspond si
bien à l'atmosphère que Renoir souhaite évoquer
qu'il ia conserve même quand il filme de loin, au
risque de rendre la bande-son assez inaudible.
I§UIIIILJiM
Le cinéma p.
775
Le cinéma français p.
781
Le cinéma muet p.
787
L'art du comédien p.
859
Le Front populaire p.
1575
Hollywood p.
1869
_ Les grands réalisateurs p.
3483
......
Dans French
Cancan (1955),
Renoir a recréé
l'atmosphère des
cabarets de variétés
où les bourgeois
venaient se divertir.
C'est son film
le plus endiablé
et le plus populaire.
L'acteur Jean Gabin
y incarna l'un de
ses plus beaux rôles
au cinéma.
Ce fut
aussi sa dernière
app arition à l'écran.
' Jean Renoir
sur le plateau de
tournage de French
Cancan.
Il aimait
travailler en étroite
collaboration
avec ses acteurs.
// leur laissait
une grande liberté
d'interprétation
et d'Improvisation
et acceptait leurs
suggestions.
En 1934, les ligues d'extrême droite descen
dent dans la rue et la gauche se mobilise jusqu'à
l'arrivée du Front populaire au pouvoir en 1936.
Jean Renoir sympathise avec ce dernier.
Plusieurs
films illustrent alors son engagement politique :
Toni (1935), La vie est à nous ! (1936), qui fut pro
duit par le parti communiste avec des fonds
recueillis lors d'un meeting, et tourné avec des
acteurs et des techniciens bénévoles, et La mar
seillaise (1938), commanditée par la CGT.
Pendant la même période, Renoir réalise un
moyen métrage bucolique, réaliste et doux-amer :
Une partie de campagne (1936, sorti en 1946)..
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