Jean-Paul Sartre, Les Mots, Gallimard, 1964.
Publié le 19/12/2021
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«
Jean-Paul Sartre, Les Mots, Gallimard, 1964.
J'ai commencé ma vie comme je la finirai sans
doute : au milieu des livres.
Dans le bureau de mon
grand -père, il y en avait partout ; défense était faite
de les épousseter sauf une fois l'an, avant la rentrée
d'octobre.
Je ne savais pas encore lire que, déjà, je
les révérais (1) ces pierres levées (2) droites ou
penchées, serrées comme des briques sur les rayons
de la bibliothèque ou noblement espacées en allées
de menhirs (3) je sentais que la prospérité de notre
famille en dépendait.
Elles se ressemblaient toutes,
je m'ébattais dans un minuscule sanctuaire (4)
entouré de monuments trapus, antiques, qui
m'avaient vu naître, qui me verraient mourir et dont
la permanence me garantissait un avenir aussi calme
que le passé.
Je les touchais en cachette pour honorer mes mains de leur poussière mais
je ne savais trop qu'en faire et j'assistais chaque jour à des cérémonies dont le sens
m'échappait : mon grand -père - si maladroit, d'habitude, que ma mère lui boutonnait s es
gants - maniait ces objets culturels avec une dextérité d'officiant (5).
Je l'ai vu mille fois
se lever d'un air absent, faire le tour de sa table, traverser la pièce en deux enjambées,
prendre un volume sans hésiter, sans se donner le temps de choisir, le feuilleter en
regagnant son fauteuil, par un mouvement combiné du pouce et de l'index puis, à peine
assis, l'ouvrir d'un coup sec « à la bonne page » en le faisant craquer comme un soulier.
Quelquefois je m'approchais pour observer ces boîtes qui se fe ndaient comme des huîtres
et je découvrais la nudité de leurs organes intérieurs, des feuilles blêmes et moisies,
légèrement boursouflées, couvertes de veinules noires, qui buvaient l'encre et sentaient le
champignon..
»
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