Jean Froissart
Publié le 15/05/2020
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«
FROISSART
1333 - vers 1401
LoRSQU'ON pense aux chroniqueurs de notre moyen âge, un nom vient tout de suite de préférence
et comme de lui-même à l'esprit, celui de Jean Froissart, et c'est justice: non seulement sa Chronique
est, de toutes, la plus étendue et celle qui a eu le plus de succès, celle qui a été représentée dans les
bibliothèques seigneuriales par le plus grand nombre de manuscrits et les plus richement enlu
minés, mais encore aucun auteur n'a été au même degré que lui le fidèle interprète de ce milieu
féodal
et chevaleresque dont l'image vibrante s'anime tout naturellement devant nous avec tout
le pittoresque d'un film lorsque nous nous replongeons dans le lointain passé médiéval.
D'autres
ont illustré avant lui ce genre de la chronique écrite en français qui a laissé dans nos anthologies
des pages
si savoureuses, à commencer par l'écrivain homme d'action, qu'on peut légitimement
nommer l'initiateur, Geoffroy Villehardouin, apologiste non toujours désintéressé, mais sans
cesse
primesautier et éloquent, de la quatrième croisade, et sans omettre non plus ce délicieux
Joinville
qui a peint, dans ses admirables Mémoires, de si jolies scènes de la vie édifiante de notre
glorieux roi
Saint Louis; d'autres, à la génération suivante, mettront en belle prose des récits
attachants et colorés, tels ceux de Jean Cabaret d'Orville ou du Bourgeois de Paris, échos respec
tivement de la vie militaire et de la vie quotidienne à travers les phases les plus tragiques de la
guerre de Cent ans, tels ceux surtout de l'incomparable Philippe de Commynes, qui joint
la profondeur du psychologue à la vertu d'un écrivain-né, en attendant la Renaissance et
l'entraînant Monluc : dans cette riche galerie, dont la suite ininterrompue tient une si large place
dans l'ensemble de notre histoire littéraire, Froissart mérite une estime exceptionnelle, parce qu'il
est,
de tous, le plus représentatif.
«On m'appelle, qui tant me voet honnerer, sire J ehan Froissart, net de la conté de Haynaut,
et de la bonne, belle et friche ville de Valenciennes.
»C'est dans ces termes, où le culte de la petite
patrie transparaît de façon vraiment émouvante, que notre auteur se présente lui-même et nous
fait connaître, ainsi
que le ferait un moderne, ce que nous appellerions aujourd'hui son étal civil.
Valenciennes était,
en effet, la ville natale de cet enfant du Hainaut.
Elle s'en est souvenue en
1937, pour célébrer le sixième centenaire de l'illustre Hennuyer : un beau volume commémoratif,
où l'on trouvera, sous forme de reproductions sélectionnées, de magnifiques spécimens des
miniatures
qui ornent les principaux manuscrits de la Chronique, a paru à cette occasion.
En
réalité, Froissart avait vu le jour en 1333, puisqu'il nous dit, en 1390, qu'il a cinquante-sept ans et
travaille à son
ouvrage depuis trente-sept ans.
Il faut déduire de ce passage non seulement la
date de sa naissance, mais encore le fait très instructif pour nous qu'il a commencé à écrire à l'âge
de vingt ans.
Il appartenait à une famille aisée : aussi bien s'expliquerait-on mal, s'il en était autrement,
la facilité avec laquelle, dès son jeune âge, il s'est déplacé à travers le vaste monde.
Plus tard, le
succès
aidant, et grâce à une célébrité brillamment acquise, ce grand « reporter » a été reçu et
hébergé
par les plus illustres représentants de la noblesse du xive siècle; mais, à ses débuts, il a
bien fallu
qu'il consentît à faire lui-même les frais de ses chevauchées :pas plus sous les Valois qu'à
aucune époque, on ne se lance sur les routes sans avoir à débourser largement.
L~ premier voyage de Froissart en Angleterre date de 1360 environ.
L'écrivain, qui veut
se faire connaître, offre à la reine d'Angleterre, Philippa de Hainaut, femme d'Edouard III, une
FROISSART Dessin du Recueil d'Arras (xve siècle).
Phote> Giraudon.
l.
»
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