James Boswell1740-1795Le John Bull du XVIIIe siècle, Samuel Johnson, LI.
Publié le 22/05/2020
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James Boswell
1740-1795
Le John Bull du XVIIIe siècle, Samuel Johnson, LI.
D, a eu comme Sherlock Holmes son Dr
Watson.
Un Watson qui, au premier abord, est la naïveté en personne, pauvre hère, dont se
moquent avec une condescendance en général bienveillante son héros, la société, et le
lecteur.
Inlassablement, James Boswell suit la piste des célébrités — que ce soit Lord X et
Sir John Y, ou Paoli, Voltaire, Rousseau, enfin son idole Johnson — les suit, pour nous
servir de sa propre expression, comme l'épagneul fidèle ; bouche bée, il note dans ses
carnets les moindres bribes de conversation qui tombent des lèvres augustes ; sans dignité,
sans honte aucune, il se voit rabrouer ou se fait caresser distraitement par la noblesse de la
naissance ou par celle de l'intelligence.
Mais, à le regarder de plus près, on commence à soupçonner que, tout comme le Dr
Watson, Boswell a calculé sa dose de naïveté jusqu'à la dernière goutte.
Il a deux buts dans
la vie : le premier (et certes, pour lui, le moins important), de se former le caractère par le
contact avec les grands ; le second, de faire disserter ses héros, devant la société et devant
la postérité, sur tous les sujets imaginables.
Les naïvetés qu'il place, lui, Boswell, dans la
conversation, sont inventées exprès pour provoquer les ripostes des grands.
La joie qu'il
éprouve à se voir traiter de haut en bas n'est guère celle d'un masochiste ; on pense plutôt
à une marquise en train de créer son salon, sauf que dans le cas de Boswell ce n'est pas
l'esprit, mais le Beati pauperes spiritu qui devient instrument de création.
(Voyez-le devant
Rousseau, tout fier d'avoir réussi à pénétrer dans l'intimité du grand solitaire en se
présentant comme un jeune homme passionné qui aurait besoin de conseils et qui ne se
formalise pas devant les duretés du maître.) Sa fierté porte sur le but et ne se préoccupe
pas des moyens : il a d'ailleurs le plaisir de pouvoir se moquer tout doucement du lecteur
qui n'aurait pas compris son délicat amalgame de naïveté et de subtilité, et de lui montrer
le revers de la médaille quand, dans Le Voyage aux îles Hébrides , où il part avec Johnson
pour l'Écosse, l'épagneul fidèle est devenu “ un chien qui s'est emparé d'une grosse
tranche de viande et s'est sauvé avec ”.
Dans ce XVIIIe siècle qui abonde en Hurons, en Persans, en voyageurs frais arrivés de
Sirius, James Boswell, sans besoin d'inventer, se trouve dans la position privilégiée de
l'observateur du dehors — car il est l'Écossais qui vient à Londres.
Là encore, une
apparente naïveté couvrira des attitudes plus complexes : il aura la fraîcheur de vision et
les admirations enthousiastes d'un provincial devant le foyer des “ lumières ” ; et
cependant, comme tout bon Écossais, il crierait au sacrilège devant ce mot provincial ; il
prend un plaisir malin à être sur pied d'égalité avec les autres nations de l'Europe et à voir
dans les Anglais des êtres un peu bizarres et (chuchotons-le) un peu inférieurs.
Là où le Dr
Johnson n'est qu'un John Bull hautain et exclusif, Boswell se sent citoyen du monde ; là où
le Dr Johnson décoche ses plus cruelles épigrammes contre l'Écosse, Boswell, et il le dit
tout haut, avec une tranquille conscience de la supériorité de l'Écosse, s'en amuse et le
traite en enfant.
Le Persan est venu faire ses observations sur la société.
Mais nous sommes dans la seconde
moitié du XVIIIe siècle ; les discussions sévissent sur Le Bon Sauvage (Johnson, nettement
contre, démolit le détesté Monbodds) ; Le Fingal d'Ossian fait rage (là aussi Johnson se.
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